Comme tout humble cinéphile qui se respecte, j’aime aller au cinéma sans trop savoir ce qui m’attends. Pour cette œuvre, faut admettre qu’on a été servi : résumé volontairement grossier, affiche extravagante, un réal qui tente quelque chose d’inhabituel dans sa filmographie récente… Les seuls retours que j’ai pu gratter ci et là étaient positifs. Je me voyais pas passer un si mauvais moment que ça.
Pourtant je ne suis pas énormément compliqué. J’ai défendu le dernier Ducobu, le trouvant limite meilleur que la dernière comédie d’Ethan Cohen (Drive Away Dolls ; en France on est très critique sur nos propres comédies alors que les américains font souvent encore pire) et il est rare pour moi de mettre des notes en deçà de 5. On peut trouver de la beauté de partout quand on insiste un peu ! Mais alors là … Va quand même falloir qu’on m’explique ce qu’il y a d’intéressant dans ce film.
Si ce n’est à quelques moments dans le premier acte, la réal est quasiment inexistante. L’image est fade, absolument pas travaillée. Limite moins bonne qu’un épisode de Scènes de Ménages. Franchement je ne rigole pas. Tout le monde s’extasie sur la scène de danse mais où est le cinéma là dedans ?! La lumière est pauvre mais pauvre … le cadre ne se pose jamais, ne propose aucune idée, c’est vraiment vide. Un dialogue ? Champ contre champ. Parfois un plan général de la scène. Voilà. Ah si parfois on filme les gens de dos quand ils marchent … probablement parce qu’il faut continuer à vivre sans jamais rien regretter et ne jamais se retourner bla bla bla.
Oui il y a le quartier plongé dans le noir dans l’acte 1, la scène finale du même chapitre, puis lorsque le gosse sort pour réfléchir au sens de la vie dans l’acte 3, mais sinon c’est un téléfilm le truc ! Bon allez, d’accord, la scène dans les escaliers devant la porte fusil de Tchekov quand le grand père s’énerve mais sinon … franchement ?!
Et bon dieu, pourquoi faire ce machin en trois actes alors qu’à quelques scènes près, le premier se suffisait largement à lui même ?! « Oh mais c’est stylé de faire ça dans le sens inverse. On est trop des artiiiiistes. Même si on doit tout expliquer LOUR-DE-MENT sur le deuxième et troisième acte, le faire à l’envers c’est trop classe, non ? ».
Parce que oui, le film ne fait que s’expliquer sur la seconde et dernière partie. Et c’est d’une lourdeur… Déjà un film porté par une voix off ça n’a jamais été une grande idée. Et sur l’acte 2, mon dieu c’est à s’arracher les cheveux. Surtout qu’encore une fois, c’est suivi par une image absolument oubliable. Le ou les personnages ne font alors strictement rien ou réagisse juste à ce qui est dit en off.
Voix OFF : « Son mec rompt avec elle en utilisant un procédé très contemporain ».
- Plan sur le téléphone où le mec a envoyé des messages bateaux de rupture.
Voix OFF : « Elle s’énerve »
- Elle s’énerve.
Voix OFF : « Elle marche, pensant à comment elle va passer sa soirée ». (En ayant déjà oublié qu’elle était censé être énervée soi dit en passant).
- Elle marche en faisant mine de réfléchir. On le comprend subtilement (à lire très vite et avec ironie) lorsque elle rentre dans un passant. Elle avait les idées ailleeeeeeeurs.
C’est insupportable. Pourquoi diable nous dire exactement ce que l’on voit ?? Montre ! T’es au cinéma ! Fais un podcast si tu veux causer tant que ça !
Et quand la voix off nous explique pas tout ce qui se passe, il étale la vie « ordinaire » de ces deux personnages et leur fin inéluctable. Mais qu’est ce que c’est looooong pour rien ! Ça dure 20 minutes au moins je jure ! C’est une version malvoyante ouuuuuu ???
Cette scène d’ailleurs est censée te montrer qu’il faut lâcher prise, se laisser aller, profiter de la vie etc. Comment traduis t-on ça à l’image, au risque de me répéter ? Une scène de danse sans intériorité, sans grandes émotions, où tout le monde sourit bêtement et applaudit machinalement comme s’ils étaient tous.tes formaté.es à ne faire que ça. Des PNJ les mecs.
Ah si, Chuck, le personnage principal s’arrête une fois pour faire comprendre aux spectateurs bieeeeeen subtilement en enlevant ses lunettes et en plissant les yeux tout en pinçant son nez, qu’il commence à être malade (un des très nombreux fusils de Tchekov de cette scène d’ailleurs). Ils le montrent encore à la fin dudit acte lorsque Chuck regarde au loin avec un air vague …
Dites vous que c’est juste après qu’on ai vu la mort du personnage principal … Vous avez oublié ce que vous avez filmé à la fin de l’acte 1 ou vous nous prenez pour des cons de premier ordre ?
D’ailleurs qu’est ce que ça aurait été mieux si la scène montrait justement deux personnes qui ne savent pas danser … De la maladresse, on montre le plus beau de l’humanité et de cet ordinaire là (montrer la joie par la danse c’est quand même d’un niais désolé), on crée donc l’extraordinaire, car rien n’est maîtrisé, tout est embaumé par l’émotion et ça aurait été cent fois mieux.
A l’acte 3 pareil. Tout est rabâché sur la fin. Chuck se voit dans son lit de mort, la voix off te le dit. Et elle parle encore et encore des multitudes, du sens de la vie, aaaaaaaaah. Mais laisse moi regarder, merde !!
Bon, que raconte le film ?
Le sujet complexe de la beauté d’être, de vivre. Que tout l’univers, le monde, vit à travers chacun de nous. Et lorsque l’on meurt, c’est tous les souvenirs qui sombrent avec et de ce fait, l’existence même de ce monde. Durant l’œuvre, on explique par des faits scientifiques que l’espèce humaine ne dure qu’un mois sur l’échelle de la création de l’univers - de la galaxie, ´fin de la vie quoi (on nous le rabâche entendez plutôt). Mais, vrai de vrai, c’est un sujet magnifique.
Et encore une fois, l’Acte 1 rend plutôt justice au traitement de cette idée - surtout avec l’idée que son image revient de plus en plus jusqu’à imprégner les fenêtres de toutes les maisons du monde. Belle idée soyons honnête.
Par la suite tout devient niais. C’est imprégné de fusils de Tchekov qui brisent toute la construction du récit selon moi.
Vous voulez parlez de la vie ordinaire, la mettre en avant ? Arrêtez déjà de nous présenter un gosse insupportable qui a un don de danse SURexploité à la fin du récit et qui ne raconte rien de plus que ce qu’on sait déjà.
C’est de l’ordinaire vu par un enfant de cinq ans biberonné par les contes hollywoodiens. Tout est cucul, faux, niais quoi. Et c’est vraiment dommage parce que la partie 1 envisageait de belles choses.
Je vous conseil Perfect Days pour ce qui est de sublimer l’ordinaire. Et pour le rapport à l’homme et à l’univers, je ne peux que vous inciter à retrouver Tree of Life de Terence Malick, qui est absolument merveilleux.
Cependant, Life of Chuck semble faire beaucoup de bien aux gens qui le regarde et, franchement, si ça peut vous rendre tout aussi heureux alors foncez le voir. J’ai pu aussi passer complètement à côté de l’œuvre et j’accepte de me prendre une leçon s’il faut …
Mais merde je hais les voix off.
PS : j’ai vraiment détesté Ducobu. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !