"Life of Chuck" est un film absolument déroutant à plus d’un titre. Dès son intro on se dit qu’on va passer deux longues heures devant un film ronflant, pseudo-intellectuel et moralisateur. Car au début il en a tout l’air. Déjà parce la voix off intrusive fleurait la mauvaise idée de prime à bord. Elle nous renvoie forcément au média qu’est le livre, par l’entremise dudit narrateur, puisque tout ceci est finalement tiré d’une nouvelle de Stephen King à la base.
D’ailleurs on aperçoit, lors d’un plan large au tout début du film, une magnifique Plymouth Fury de 1958 tous verres teintés, comme pour nous envoyer des signaux, certes peu subtils, mais aisément reconnaissables par tous.
Mais très vite on se rend compte que le film est bien plus intéressant qu’il n’y paraît. Des éléments fantastiques apparaissent alors subrepticement ici et là, comme des Samples harmoniques le feraient dans une musique électro pour construire le fond sonore ; lentement, sûrement et sournoisement ainsi le récit et la magie opère.
À ce sujet, les passages musicaux, notamment celui à la batterie mettant en scène diverses danses, sont complètement dingues! Certes ils dénotent avec l’ambiance générale du film – là est la subtilité, la vraie -, mais en même temps c’est magistralement intégré dans l’intrigue. Ni début, ni fin, seulement une boucle qui s’interpénètre dans un cycle en trois actes, que ce soit dans un sens ou dans un autre. Et ça c’est du rock!
D’ailleurs le côté inquiétant du film, tout relatif et diffus, est souvent relégué en arrière-plan, dans une sorte d’étrange dissonance, comme un malaise inidentifiable. Ce qui a pour conséquence de souligner davantage ces furtifs moments incongrus et surréalistes, qui font irruption sans crier gare.
Le film en tout cas est vraiment incroyable à plus d'un titre. C’est un objet insaisissable et abscons ; au début il est inquiétant avec cette "catastrophe" qu'on n'identifie pas vraiment, pleinement dans le style King. Puis ensuite il devient Spielbergien dans son ambiance fantastique mettant en scène l'enfance, l'amour et l'exploration vers l'inconnu. Alors qu'il glisse entre ces styles et sans préavis, dans un registre nettement plus musicale.
Finalement "Life of Chuck" est un long-métrage qui fait la part belle à la poésie et à un certain romantisme. Il est un petite claque esthétique et la technique n’est pas en reste non plus. Alors il est vrai que le film est un tantinet cryptique, avec un côté loufoque, mais on aime.