On le sait depuis La Colline a des yeux, les déserts sont des endroits dangereux, et ce n’est pas The Outwaters et son excursion entre amis qui nous feront changer d’avis. Annoncé comme «l’un des films d’horreur les plus effrayants et dérangeants de l’année», le film de Robbie Banfitch promettait des saillies gores et cauchemardesques ainsi que mont et merveilles cosmiques au public à travers la forme d’un found-footage désireux de reproduire le tour de force marketing du Projet Blair Witch.
Le témoignage commence comme des tas d’autres : un montage photographique des personnes supposées disparues à l’endroit où les autorités auraient retrouvé le film authentique des événements. Le recours au found-footage sert ici de prétexte à une œuvre expérimentale et suggestive visant à désorienter le public. La lecture des cartes SD est donc l’occasion de nous immerger au cœur d’une randonnée dans le désert des Mojaves en Californie. Aussi nous apprenons à travers ces interactions peu palpitantes que ce groupe d’amis cherchent à tourner un clip vidéo, et à obtenir le cliché idéal pour la couverture de leur nouvel album musical. En dehors de cela, les personnages tentent de capter du mana en se reconnectant à mère nature, parfois aussi à leurs souvenirs et émotions.
L’affiche énigmatique est aussi obscure que le long-métrage et ne dévoile rien de l’indicible menace frappant les randonneurs. Suite à la découverte d’une hache et de bruits paranormaux captés dans un trou à fleur d’une colline, les hypothèses vont alors bon train pour tenter de combler la vacuité de cette exposition interminable. Car la question n’est pas tant de savoir si l’excursion va dégénérer mais de savoir quand, comment et surtout pourquoi ? Auraient-ils été victimes d’une tribu d’irradiés anthropophages ? Se pourrait-il qu’un membre du groupe se soit mis à dépecer ses compagnons suite à la consommation d’un champignon hallucinogène ? Cette dernière théorie paraîtrait être la plus plausible des deux. En effet, la caméra semble traduire les visions oniriques et délirantes d’un bad trip extra-sensoriel.
Toutes ces questions seront néanmoins laissées en suspens au cours d’une dernière partie brouillant tous les repères de temps et d’espace. Le surréalisme de la mise en scène permet de donner vie aux horreurs lovecraftiennes les plus nébuleuses. Plongé dans l’obscurité la plus totale, les faibles halo lumineux nous éclaire sur la nature de cette menace indicible et noir. Des silhouettes de corps mutilés se dessinent dans le cadre, des vers hurleurs dévoreurs de chair viennent ainsi rompre la quiétude des ténèbres. Le réalisateur figure la puissance d’abstraction de son image à travers des effets d‘éclairages naturels diurnes et nocturnes stimulant le sentiment d’enfermement. Le montage chaotique, visuel et sonore participe largement à l’inconfort de visionnage.
Malheureusement, si le film est pétri de bonnes intentions (narration éclatée, composition malickienne, travail de la matière sonore, point de vue immersif, suggestion du hors-champs) celles-ci restent le plus souvent mal voir surexploités, provoquant une forme de lassitude et de saturation de la part du public. C’est donc au bout de l’enfer mais surtout de l’ennui qu’il vous faudra chercher l’intérêt à cet ovni filmique, tenant plus du canular opportuniste que du cauchemar cryptique et organique. L’avantage de cet isolement, c’est que personne ne vous entendra crier, ou bien ronfler, si ce n’est un troupeau de mulets.
T'es nostalgique du Projet Blair Witch, t'aimais bien mater des VHS sur ta télé carrée ? Tu regrettes le numérique dégueu des années 2000 ? Tu voulais du rab de Found footage ? Eh bien rends-toi sur L’Écran Barge où tu pourras bouffer de la bande magnétique par tous les pores de ton corps jusqu'à t'en dégoûter définitivement.