The Revenant : A vivre sans modération

Une expérience inoubliable.


Tout d'abord, il faut préciser qu'il serait dommage de réduire le film à la performance de Di Caprio, qui, bien sûr, est excellente (pour changer). Pour continuer avec les acteurs, Tom Hardy dans la peau du très méchant Fitzgerald a une vraie présence, et mention à Will Poulter et Domhnall Gleeson qui sont aussi bons. Je me dois de mentionner la bande-son de Ryuichi Sakamoto, qui est belle et sobre.


The Revenant est visuellement splendide, une magnificence poussée à l’extrême avec des plans qui frappent la rétine. Le décor (naturel) et les paysages sont filmés d'une certaine manière à ce que la nature devienne belle, dangereuse et mystique à la fois. Merci à l'incroyable Emmanuel Lubezki ! La caméra d'Iñárritu se balade dans cette forêt et ces plaines enneigées, se pose parfois quelques secondes puis repart, afin de capter toute ce que la nature a de plus incroyable. On a toujours une mise à l’échelle de l'homme au milieu de la nature, avec les arbres, les montagnes... Dans ce film, elle est elle même un personnage, accompagnée par ses animaux, cette dernière respire et vit. D'ailleurs, les indiens sont presque les garants de celle-ci , surtout quand on voit la scène finale où


Glass les laisse prendre soin du tueur de son fils, en disant qu'il faut laisser la punition au créateur, et qui renforce leur rôle quasi mystique, et religieux, qui fait référence à une sorte de panthéisme (le résultat d'une inspiration de Terrence Malick ?) . Ils arrivent un peu comme un deus ex machina, et c'est justement cette apparition irréaliste (comme par hasard quand Glass est sur le point de tuer Fitzou) qui font de ces personnes des êtres spirituels.


En parlant des indiens, ça fait du bien de les voir traités d'une manière différente que traditionnellement, avec beaucoup plus de nuance, et donc encore une fois un certain réalisme. Le thème de la colonisation, et l'histoire des Etats-Unis y sont aussi abordés. Bien sûr, le film porte un message humaniste à travers le fils de Glass, ce sang-mêlé, mais aussi avec une scène bien précise ou le héros est


sauvé par un indien, et avec ce moment de pure innocence où les deux, assis, comme des enfants, ouvrent la bouche vers le ciel pour y recevoir des flocons de neige.


The Revenant est sensoriel. Le film nous fait ressentir chaque blessure et souffrance du héros, mentale (le meurtre de son fils devant ses yeux sans qu'il ne puisse bouger) mais surtout physique. Le meilleur exemple est la fameuse scène de l'ourse (très réaliste d'ailleurs : Ce combat est insoutenable, Glass à terre en train d'essayer de faire le mort avec la bête qui le lacère de toute part, tout ça renforcé par le plan-séquence pour faire ressentir réellement l'action et sa durée, c'est à se tortiller sur son siège. Une scène impressionnante... Parmi d'autres : le combat final est acharné, sauvage, ce n'est pas deux hommes qui se battent mais deux corps qui se détruisent mutuellement, oreille arrachée, doigts coupés, jambe et abdomen troués. Dans ce film, il y a un véritable ressenti de la matière, de l'organique, ce n'est pas juste "gore", les corps sont traités avec une véritable attention à ce que ça fasse vrai, à ce que le spectateur se disent "aie", une véritable leçon... Tout au long du film on accompagne et on endure, mais sans que cela soit totalement insoutenable, car le dosage est le bon, certains passages nous permettent de souffler, de reprendre nos forces, tout comme le personnage de Glass. L'animalité de l'humain est aussi très bien mise à l'écran !


The Revenant est poétique, notamment avec ces flashbacks et apparitions fantomatiques de sa compagne et de son fils, distillés un peu partout lors de cette odyssée extrême, mais aussi avec ce travail des images, de la nature, et de leur sens... comment interpréter le tout dernier plan du film, ce regard caméra étonnant après 2h30 d'immersion totale, un regard au spectateur de la part d'un homme qui a tout perdu, vécu tellement, et qui se tourne vers ceux qui restent, les témoins de son aventure ?


Le regard caméra ici, est pour moi le fait d'un dépassement, il achève la transcendance, Glass se transcende durant tout le film, et fini par transcender le film lui même en brisant le quatrième mur (on entend en plus toujours sa respiration à l'apparition du générique). D'ailleurs, les spectateurs n'en sont plus vraiment, et cette cassure est juste logique vu comment on a été impliqué dans le long-métrage, et s'inscrit alors comme le grand final de l'immersion, puisque le cinéma prend le pas sur la réalité...

Seili
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le 1 mars 2016

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