Eh bah… Une palme cannoise qui ne me laisse pas indifférent, ça remonte à loin ma parole !
Ça remonte à… 2003 et « Elephant » de Gus Van Sant l'air de rien...
Alors après, ne nous mentons pas non plus : j’avoue qu’au final, ce « The Square » combine à la fois ce que j’aime voir au cinéma d’un côté et tout ce qui m’horripile dans la mécanique politico-idéologico-morale que des festivals comme Cannes finissent par imposer aux auteurs de l’autre…
Et en gros, si au final je mets une note plutôt tiède (enfin, un bon tiède hein : 6/10 pour moi c’est quand même chouette), c’est parce qu’à bien tout prendre, j’ai eu durant ce film une vraie alternance de saunas revigorants et de douches bien froides.
Côté saunas, je louerai d’abord la beauté plastique de ce film.
C’est propre et léché. C’est élégant.
Idem pour la narration. Le film sait vaciller habilement entre absurdité d’un côté et humour noir de l’autre.
Tout cela est notamment permis par d’astucieuses associations d’éléments qui s’opposent, d’humour par le hors-champ, ou bien encore tout simplement par l’effeuillage progressif du vernis bourgeois dont chaque personnage se recouvre.
Une mécanique qui se développe au travers d’une histoire qui a le mérite d’explorer pas mal de situations et d’éléments d’intrigue en même temps.
En somme, on a donc à faire là à une forme riche, à une démarche intelligente, et tout cela au service d’un film qui a indéniablement une identité qui lui est propre…
Seulement, au milieu de tout ça, il y a aussi toutes ces douches froides.
La longueur d’abord.
Même si les situations sont nombreuses, on a quand même droit à un film qui est bien plus dans une logique de regard sur une situation plutôt que de regard sur une dynamique, ce qui fait que tenir presque trois heures sur ça, ça fait quand même un peu beaucoup.
Surtout qu’au fond, le propos n’est pas non plus si diversifié que ça.
En gros, tout tourne essentiellement autour de bourgeois qui ne cessent de réfléchir sur comment rendre les gens sensibles à la misère du monde alors qu’eux-mêmes n’y sont pas sensibles.
Tenir autant de temps avec si peu en guise de fond, forcément ça peut nous conduire à percevoir certaines scènes – bien que convenables – assez superficielles sur le temps long.
Et enfin, dernière douche, c’est justement ce propos.
Bon, en soi, il ne me dérange pas plus que ça, même si ça fait encore une fois cinéma de bourgeois par des bourgeois pour des bourgeois (…ce qui, dans le contexte cinématographique français actuel m’agace toujours un peu).
Non, ce qui m’agace au fond, c’est le martèlement.
Une fois ça va, mais là le propos est illustré à satiété, jusqu’à ce qu’on arrive carrément à un long monologue du personnage principal qui récite carrément la morale de l’histoire.
Plus que superflu, c’est juste lourd. Et dans un film de trois heures qui aime souvent jouer d’un rythme posé, le lourd, c’est juste vraiment pas une bonne idée…
Mais enfin bon, comme je le disais donc, je trouve que l’un dans l’autre ce film vaut le détour.
Au final il est malin et a clairement sa patte.
Ce sont là deux qualités suffisamment rares dans le cinéma d’aujourd’hui pour être grossièrement boudées…