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La première chose qui m’a frappée, c’est Demi Moore.

Je savais que le film parlait de jeunesse et de beauté, et pourtant, dès les premières minutes, je suis percutée par la sienne. Sa beauté. Son corps. Et tout de suite, je me dis qu’on se fout un peu de ma gueule : comment le personnage de Demi Moore peut-il lutter contre la jeunesse quand elle-même semble défier le temps ? Et pourtant, il suffit de quelques scènes pour comprendre : ce n’est pas la nature qui la condamne, ce sont les hommes. Ceux qui l’éjectent du plateau, la rendent « has been », et finissent par défigurer, métaphoriquement, son visage.

Le personnage de Dennis Quaid m’a écœuré.

Déjà, les gros plans où il bouffe ses fruits de mer me donnent envie de vomir : clairement, ce personnage dégoûte dans tous les sens du terme, de sa façon de manger à ce qu’il prononce, mais aussi dans le cadeau de merde (un livre de cuisine) qu’il offre à Elizabeth, la réduisant à moins que rien. Bref, jusque-là, on comprend le symbole : les hommes bof.

On le sait, le film est une critique acerbe de la manière dont on traite les femmes passées un certain âge. Et la scène où Elizabeth se maltraite devant le miroir est criante de vérité. Combien de femmes ont vécu ce moment d'humiliation, ce moment où l'on se déteste tellement qu'on s'inflige de la souffrance?


Mais ce qui m’a quand même titillée, c’est l’absence de relation d’Elizabeth. Moi, ce que je vois : une femme seule, pas très aimable, qui a probablement été arrogante et désagréable. Pas de mari, pas d’ami(e)s, pas de passions, pas de disques, pas de livres, pas de photos de voyages, rien d’autres qu’elle-même. D’où le grand portrait qui trône dans le salon : elle s’est figée dans le culte d’elle-même, n’apportant rien d’autre que la beauté à la société. Alors, bon, elle croyait vraiment qu’elle était figée à ce point dans le temps au point de ne pas s’occuper d’autre chose que d’elle-même ?? Next… Ou une autre moi-même… En mieux. Personnellement ça me ferait mal, je préfère me focaliser sur autre chose comme la musique (apprendre un instrument par exemple, ou à danser le tango bordel) que de faire sortir de mon dos, une version de moi, plus jeune et plus belle, qui me rappellera combien je suis vieille…


Quoi d’autre ?

La viande. Parce que quand Coralie Fargeat parle de corps, elle parle de bouffe. Et c’est un peu ce que j’ai ressenti devant ce film : que le corps de la femme, c’est de la viande. De la barbaque. D’ailleurs, il n’y a presque plus rien de sexuel (même si les fesses de Qualley sont magnifiques). Coralie Fargeat a le don de savoir sublimer le corps de la femme, et Revenge en témoignera également. Mais ici, on est davantage dégoûtées par une overdose de viande que véritablement excitées (enfin, c’est mon avis).


Les références à Cronenberg et David Lynch pullulent (on sent la fan incontestée) ainsi que certains plans à la Stanley Kubrick, on sent l’artiste inspirée. Certaines scènes sont vraiment dégoûtantes, mais forcément nécessaires pour faire passer le message.

Le son est travaillé et les symboles, peut-être simples (l’étoile sur le trottoir, l’overdose de bouffe, etc…), mais tellement claquants dans la face, que même cette fin un peu nanardesque est incroyable bien menée.


gabylarvaire
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le 27 oct. 2025

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gabylarvaire

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