J'ai attendu ce film pendant plusieurs années, et Malick sait se faire désirer vu le temps de réalisation pour chacun de ses films. C'est un perfectionniste et il a bien raison. Il est la preuve vivante qu'un artiste peut réaliser dans le plus grand secret un film sans laisser échapper aucune info jusqu'au dernier moment. Les seules infos se réduisaient aux titres et à un synopsis qui tenait sur deux lignes. J'en ai passé des heures à extrapoler sur ce malheureux synopsis et à me demander à quoi ressemblerait le résultat final. (J'ai des passe temps bizarres, je sais.)

Après 2H18 de visionnage, je suis sortie de la salle abasourdit. Ce film est une expérience unique, tenter de l'analyser serait vain et raconter les différentes scènes gâcherait le plaisir, de toute façon aucun mot ne peut décrire ce film. Il joue avec la perception des spectateurs, chacun y verra sûrement quelque chose de différent et ressentira un nombre incroyable de sensations différentes. Je n'ai pas honte de dire que émotionnellement le film est percutant et touchant, Malick a prouvé qu'il a atteint une maturité cinématographique que peut de réalisateurs atteignent.

Se déroulant sur la base d'une histoire des plus simples (la vie d'une famille dans les années 50 présentant un père autoritaire en chef de famille), le film est une ode à la vie et à la mort. La caméra vole, s'immisce dans cette famille des plus étranges, explorant les deux chemins énoncé au début du film : le chemin de la nature et le chemin de la grâce. Alternant entre des visions cosmiques et les visions de paysage, le spectateur retourne à l'état sauvage. La caméra explore la beauté des paysages naturels et contraste avec la symétrie déroutante de l'urbanisation. Il sonde l'espace et la vie sous toutes ses formes, filmant à un niveau microscopique et macroscopique.

En bon prof de philosophie, les thèmes sont évidemment métaphysiques, le rapport de l'homme à la nature, la place de la religion dans l'éducation, le sens de la vie. Oui, c'est des thèmes ultra prétentieux mais quelle claque visuelle et intellectuelle !

Malick met à rude épreuve les sens du spectateur.

Visuellement, le film est époustouflant, chaque plan de caméra atteint la perfection, la fluidité des mouvements de la caméra et sa précision laisse complètement béat. Mais le film est enchanteur sur le plan auditif aussi, accompagnant les pérégrinations de la caméra, la musique sait se faire discrète quand il faut et submerger les spectateurs lorsque c'est nécessaire. (Sur fond d'opéra et de musique classique).

Bourré d'allégories et de symboles, le film paraîtra élitiste pour beaucoup, et effectivement il n'est pas tout public et j'en suis content parce qu'au fond c'est ce qui fait le charme des films de Terrence Malick. Ce film est anti-conformiste dans son essence même, le réalisateur joue avec le temps et l'espace, le scénario y est quasiment inexistant et il n'est pas nécessaire qu'il soit plus développé. Ce qui compte avant tout c'est les sensations, comme toujours la nature y tient le rôle principal, à la limite on a le sentiment que tout est inversé. Ainsi, le décor serait les acteurs et la nature, l'actrice principale. Pourtant, avec aussi peu de dialogues, Malick a su donner une profondeur époustouflante à ses personnages. Sean Penn et Brad y sont évidemment bouleversant de justesse.

On pourrait parler des heures de toutes les références, symboles et idées que Malick a développé mais je laisse ce travail à des experts qui le feront mieux que moi. Parcequ'au final en sortant de la séance la seule idée qu'il m'est venu à l'esprit est que ce film racontait simplement l'histoire de la vie, celle que tout le monde vit tout les jours, celle qui existe depuis des siècles.

Débordant de lyrisme et de poésie, ce film est intemporel, dans un siècle il sera probablement regardé encore et les gens qui le verront seront autant bouleversés que nous. Malick vient de donner une grande leçon de cinéma. Laissé vous porter par ce film car il ne demande qu'a être aimé et à faire aimer.

« La seule façon d'être heureux est d'aimer » dit la voix off : J'ai aimé et j'en suis heureux.
CREAM
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le 17 mai 2011

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