Un film dont l’appréciation dépend des conditions de visionnage est-il un bon film ? Telle est la question soulevée par les récentes transformations connues par le cinéma. Car avec le besoin de motiver un spectateur à privilégier un spectacle payant au lieu d’un stream gratuit est apparue une nouvelle catégorie de longs-métrages, qui ne s’apprécient pleinement qu’avec écran géant, son Dolby Giga Truc et 3D Imax. AVATAR a ouvert le bal, suivi de GRAVITY, deux merveilles technologiques aux scénarios trop légers pour survivre sur petit écran.
THE WALK complète-t-il la collection ?
Un peu. Difficile d’être époustouflé par ces scènes d’altitude qui, filmées pour la 3D, ne provoquent ni frisson ni vertige. Preuve que lorsque la technologie n’est plus disponible, la caméra de Zemekis n’a pas été en mesure de prendre le relais. Voilà qui est dommage : ce qui devait constituer –littéralement– le point culminant du film retombe comme un soufflet.
Fort heureusement, seule cette scène pâtit d’un visionnage sans fanfreluches. Le film a, par ailleurs, l’intelligence de se parer d’autres atouts, au premier rang desquels son ton. Loin du traditionnel biopic linéaire et hagiographique, il donne la parole à son protagoniste. Fantasque, colérique et mégalo, Philippe Petit rend la narration subjective, autorisant du même coup tous les décalages. Ainsi, tout (du cabotinage francophone de Gordon-Levitt au Paris de cartes postales, en passant par la parodie des films de braquages) se veut hyperbolique et théâtral. Ce pourrait être agaçant, ça l’est parfois (le protagoniste étant souvent déplaisant), mais ça permet au film d’avoir une personnalité propre, au-delà de ses innovations technologiques.
Le tout aurait sans doute gagné à aller encore plus loin dans le décalage, pour gagner en force d’émerveillement et en rythme. Mais l’on salue tout de même le geste du cinéaste et de son acteur principal d’avoir tenté de mettre la technologie au service de la poésie.
Mention spéciale pour le dernier plan, magnifique hommage à ses deux tours aujourd'hui disparues.