Suite du tableau documentaire autour du conflit russo-ukrainien depuis le début des années 2010, après "20 Jours à Marioupol" (une équipe de journalistes ukrainiens documente la vie dans la ville assiégée) ou encore "Pierre Feuille Pistolet" (un van polonais évacue des habitants qui fuient leur pays). À la différence de ces deux-là, "The War of Chimeras" est un docu amateur qui n'a pas fait le tour des festivals et qui aborde le sujet de la guerre sous un angle beaucoup plus intimiste, celui de la relation entre une des réalisatrices Anastasiia Starozhitska et un homme qui s'est porté volontaire pour le front, suite à l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014.
"The War of Chimeras" appartient à la catégorie sans fin des documentaires auxquels il manque une vraie colonne vertébrale, une vraie charpente, une ligne directrice qui permette d'établir un discours pertinent et intéressant. La matière première est bien là : beaucoup d'images sont dédiées au parcours du jeune soldat dans les zones de conflits, avec quelques séquences assez fortes (blessures et morts), ainsi qu'à son retour auprès de sa compagne avec une regard très distancié sur le stress post-traumatique — il y a notamment le cas de ses camarades soldats qui sont morts, faisant de lui le seul rescapé de son unité souffrant du syndrome de culpabilité du survivant. Mais les réalisatrices mère et fille Starozhitska ont adopté une narration dans un style épistolaire recouvrant l'ensemble d'un voile intime un peu forcé, en tous cas qui s'accommode assez mal à mes yeux avec la majorité du contenu.
Le soldat a notamment participé au siège d'Ilovaïsk, une bataille marquante de la guerre du Donbass qui visait, pour l'armée ukrainienne, à couper en deux les forces séparatistes de Donetsk et Louhansk. Sans surprise, les paysages dévastés et les villes en ruines sont très présents : eux, à la différence des réflexions sur l'essence de la guerre et de l'amour, sont marquants. D'autres éléments en filigrane revêtent un intérêt non-négligeable, comme par exemple la psychologie du volontaire qui pensait se battre pour défendre sa patrie et rentrer en étant couvert d'honneurs, esquissée sans sensationnalisme.