J'ai toujours eu doutes sur le prétendu génie de Pasolini. J'avoue que je ne connais pas son œuvre poétique mais il me semble parfois qu'il manque de certaines choses élémentaires qui font les très bons metteurs en scène de cinéma. La vison assez tardive de ce mythique "Théorème" ne fait que renforcer ces doutes.
Il me semble par exemple que Pasolini ne sait pas très bien raconter les histoires. ici, l'arrivée du personnage de Terence Stamp est bâclée et assez incompréhensible. Puis son charme agit d'une façon éparse et mécanique, quasi-magique, à la limite du risible. Les scènes s'additionnent parce qu'il le faut bien, sur le mode "papa maman la bonne et moi", mais les personnages ne sont témoins de rien. Enfin on subit un étrange déséquilibre entre les deux parties du film, à tel point qu'on se met à remettre en cause la brutalité imposée par cette structure en deux parties étanches.
Par ailleurs, Pasolini a un sens du découpage très approximatif et je dirais même, au risque qu'on me jette des pierres, que ses cadres ne sont pas folichons. Enfin, si on excepte quelques gros plans où l'on s'absorbe dans le fard à paupière de Silvana Mangano, je trouve que la sensualité de ce film ne prend pas, qu'elle est noyée sous la sécheresse de la démonstration politique. Il faut dire aussi que cette manie du cinéma italien de rejeter tout son direct (doublage grotesque d'Anne Wiazemski dans une séquence) donne aussi l'impression qu'on assiste à la projection assis à côté du bruiteur. A part le sur-mixage sur les pas des personnages et le tartinage de Mozart, le travail du son ne travaille rien d'érotique.
Evidemment, la littérature marxiste permettra toujours de combattre et même ridiculiser toutes ces remarques techniques, qu'on pourra qualifier de "bourgeoises" pour les disqualifier. Mais enfin même au bon peuple on ne fera pas prendre des vessies pour des lanternes.