Avant que le sympathique Tony Liu ne signe une poignée d'œuvres martiales Ô combien jouissives pour la Shaw Brothers, l'homme avait pu acquérir une bonne expérience en réalisant plusieurs films pour divers studios indépendants. Le style ultra speed qui sera sa marque de fabrique pendant ses années chez Sir Run Run Shaw n'était cependant pas encore défini. Liu n'était alors qu'un réalisateur impersonnel parmi tant d'autres, capable d'emballer un film correctement mais sans le petit plus qui ferait la différence par rapport à la concurrence. Tiger Over Wall, son dernier film avant son retour à la Shaw, est assez représentatif de cette période intermédiaire de sa carrière de metteur en scène.

Mais ce qui frappe le plus dans Tiger Over Wall, avant toute considération de mise en scène ou de rythme, c'est l'étrangeté du scénario. Il est vrai qu'en 1980, le film de Kung Fu « old school » était à un moment charnière de son évolution, à la fois au sommet de son art et sur le point de disparaître. Dans ce contexte, la volonté d'apporter un peu d'originalité aux formules rabâchées est louable. Mais, tout de même, quelle drôle d'idée que de baser tout un film sur la disparition d'un chien et ses conséquences ! Liu, lui-même scénariste du film, aurait pu trouver quelque chose d'un peu plus sérieux pour mettre en valeur la corruption de la police locale (le véritable intérêt scénaristique de cette mise en place limite ridicule). Il faudra malheureusement faire avec cet enjeu douteux et accepter ce point de départ ainsi que les à cotés qui y sont liées (les gweilos pas très fins).
Cet état de fait n'est pas arrangé par la manière dont Liu gère son intrigue. Au lieu de foncer une fois cette situation mise en place (flics pourris, citoyens honnêtes qui s'y opposent), l'ancien cascadeur ne fait avancer son récit que de manière laborieuse, accordant de larges portions de temps aux interminables tergiversations au sein de l'école de Kung Fu. Déjà que les enjeux de départ étaient saugrenus, les développements trop sérieux qui leur sont consacrés sont plus nuisibles au film dans son ensemble qu'autre chose. Dommage que Liu n'ait pas encore découvert le recours à la touche avance rapide comme ce sera le cas par la suite de sa carrière. A défaut, il incombera à l'humble spectateur de l'utiliser à sa place pour passer ces trop longues plages de dialogues à l'intérêt douteux.

Cette très mauvaise gestion de l'intrigue a de regrettables répercussions sur l'action. Les séquences martiales s'avèrent trop peu nombreuses pour que l'amateur de Kung Fu y trouve totalement son compte. On pourra tout de même se consoler grâce à l'excellente qualité de celles qui nous sont proposées. Dang Tak Cheung a composé des chorégraphies exigeantes et intenses avec des enchaînements longs typique du « old school ». Les brillants artistes martiaux que sont Philip Ko et Hwang Jang Lee en profitent pour montrer l'étendue de leur capacité, tout spécialement au cours d'un long final (bien près de 10 minutes de combat non stop) où techniques au bâton, coups de pieds et impacts douloureux se succèdent avec une belle énergie.

Dommage que Liu n'ait pas traité l'intégralité de son film sur le modèle de ses scènes d'actions énergiques, l'ensemble du métrage y aurait profondément gagné en intérêt. A défaut, il faut composer avec les habituelles forces et faiblesses des films de Kung Fu d'exploitation.
Palplathune
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le 24 févr. 2011

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