Trompe l'œil
5.7
Trompe l'œil

Film de Claude d'Anna (1974)

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Anne est enceinte. Elle est également fragile d'esprit. Elle a notamment fait une fugue, dont elle ne se souvient pas. Son mari, Matthew, dit qu'on l'a retrouvée sur un bac, un tableau dans les bras. le tableau représente une chouette picorant une femme allongée, mi-nue, au bord d'un lac.


De nombreux éléments torturent Anne et menacent son fragile équilibre psychologique. Ce voisin d'en face mystérieux, qui l'épie aux fenêtres. Ces lettres anonymes qu'elle reçoit. Sa mère, qui critique tout ce qu'elle fait. Les angoisses liées à la maternité. Matthew, qui semble de moins en moins apte à la rassurer et aimerait la voir retourner en maison de repos.


Un film d'art et d'essai, principalement situé dans un décor d'intérieur bourgeois aux lourdes tentures, encombré de tableaux et de miroirs ovales. Le début du film semble donner pour clé le fameux portraît des époux Arnolfini de Van Eyck. Mais il semble aussi y avoir l'influence d'une esthétique de la peinture symboliste, voire des préraphaélites. Les teintes sont marquées (on n'est quand même pas dans Suspiria, qui sort quelques années plus tard.


Les cadrages sont réussis, la silhouette fragile d'Anne (qui rappelle Agnès Sorel) étant souvent écrasée par les décors filmés en grand angle. Une ambiance onirique (façon ile des morts) se dégage de certaines séquences (dans le chateau, dans le fameux appartement d'en face). Il y a quelques séquences à la fin qui utilisent mal des méthodes de stop-motion et de surimpression : le spectateur se sentira soit tiré de la narration, soit acceptera un côté délibérément maladroit. J'étais un peu déçu de la séquence avec la chouette, que j'ai trouvée un peu facile. Bergman faisait déjà ça mieux dans L'heure du loup.


La narration, qui passe par un quotidien étriqué fait de petits éléments qui dysfonctionnent, fait un peu penser à du nouveau-roman à la Robbe-Grillet.


Il n'empêche, c'est un film qui décrit assez bien la paranoIa d'un esprit dérangé. Il y a des explication lacaniennes, ou du moins psychanalytiques qui semblent se dégager et ont dû faire chauffer le cerveau d'étudiant en psychologie.


Dans une séquence qui semble un rêve, Anne retrouve le voisin d'en face après avoir découvert que le tableau cachait une oeuvre de grande valeur. Elle pousse le voisin, qui se faisait menaçant, dans le vide. Mais tout cela semble un rêve qu'elle fait alors que son mari et sa mère parlent d'une fausse couche. L'un dans l'autre, l'attitude dissociée que semble prendre Anne et son incapacité à se souvenir de son père font penser aux conséquences d'un inceste.


C'est un film très honnête sur la folie. pas un chef d'oeuvre impérissable, mais la proposition est cohérente et solide.


Vu sur la chaîne Arte Kino.

zardoz6704
6
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le 6 sept. 2025

Modifiée

le 6 sept. 2025

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