Umshini Wam
6.7
Umshini Wam

Court-métrage de Harmony Korine (2011)

Zuma, I'm old enough to crack a brick in your teeth while you sleep

J'aime beaucoup Die Antwoord. D'abord pour son univers graphique extrêmement riche et cohérent, faits de totems, de peintures de guerre et de décalages conceptuels jouant sur le malaise (innocent/salace ; propre/sale ; mouvement/fixité ; sincérité/dérision ; tabou/affranchissement moral). Puis j'avoue peu à peu un faible pour leur musique - qui n'entre pas a priori dans ma tasse de thé.


Il y a donc les clips de Die Antwoord avec son inenarrable prophète plastique du nom du Anri Du Toit alias Yo-Landi Vi$$er.
ET
Il y a Harmony Korine, auteur indépendant du cynisme contemporain, de la non-écriture et de la démagogie "underground". Sorte de Nouvelle Vague sans nouveauté et sans vague. Et pourtant il a fait parler de lui, pour son esthétisme sans concession. Comme Die Antwoorde.


A l'occasion de la sortie de "Spring Breakers" et de sa très "jolie" promotion aux couleurs criardes et aux bikinis pétassiers,
je fus plongé dans l'immobilisme,
écartelé entre mon amour pour Die Antwoord et... ce Korine qui m'a mis autrefois en colère pour son inanité.


Sur ce court-métrage, j'avais d'emblée des réserves. Je savais qu'il ne serait pas plus écrit. Mais le charme de Die Antwoord opérant, je pus dépasser mon bug.


Sur un plan plus objectif, cela ne raconte pas plus de chose que korine n'ait déjà écrit
mais au niveau réalisation, une sympathie pour les protagonistes, c'est assez nouveau chez lui. C'est drôle et fluide. Compréhensible ! De l'empathie !


Deux handicapés en ont assez de se faire marcher dessus. Dans leur aliénation, leurs activités sont limités et ils se retrouvent marginalisés au point d'être des sous-prolétaires roulants.


Mais j'ai l'impression que ça s'arrête là, dit ma petite voix.


Oui, ça s'arrête là, il y a toutefois une évolution dans la mesure où ils cherchent à se rattacher quand même à quelque chose, une croyance, quelque chose de dur, de fiable, un phare, un repère dans cette anomie invariable.


Je crois comprendre que "dieu est un chic type" sur la fin.
Il y a donc une vie qui réagit au fatalisme, à un "tout" qui engendre la violence et, ainsi engendre le fantasme mélangé d'être des gangsta à la violence légitime.


Jouent-ils de vrais handicapés ? C'est un grand mystère pour moi.


Ou bien...


Jouent-ils vraiment des handicapés ?


Connaissant l'identité du groupe et celle du réalisateur, le handicap peut très bien n'être qu'une forme, un divertissement stimulé par l'ennui.


Et puis il y a aussi l'idée de dégrader le sublime en magnifiant l'aspect monstrueux. Je suis allé au Musée Dupuytren à Paris (je le cite parce qu'il le vaut) et je pensais à Die Antwoord. C'est un cabinet de curiosité complet où sont entreposés les corps pour leur maladie, leur déformation. Ce sont les déformations qui les font passer à la postérité ! Le sublime serait-il ambivalent ?


Les autres Korine, eux, je ne sais pas ce qu'ils racontent. Je serai incapable d'en dire quoi que ce soit. Avec Die Antwoord, le film semble plus posé et Korine plus posé. Mais tout aussi puant de racolage actif.


Ce court-métrage m'a permis en outre de découvrir un hymne sud africain, particulièrement violent.
Imaginez une chanson populaire qui dise tout le temps
"Apportez moi ma mitraillette !"


So fun. Surtout quand l'homme qui a couvert le massacre des policiers sur 45 mineurs de Marikana le chante. Enjoy it : https://www.youtube.com/watch?v=lof6XJ8b1SU

Andy-Capet
6
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le 3 mars 2013

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Andy Capet

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