C'est un gag, c'est pas possible.

La méthode Weinstein tendue comme une ficelle de string qui t'explose dans le tréfonds anal quoi. Adapté d'une pièce à succès, un réalisateur pas trop expérimenté bien dressé au fouet et un petit air fauché/bricolé, tu la voulais ta Weistein-erie de l'année, et bien figure toi qu'elle est en avance et qu'elle a décidé de (te) frapper avant même le printemps.

Déjà, forcément, ça commence mal, à moins d'avoir découvert le cinéma l'année dernière, les réunions funéraires de familles dysfonctionnelles, on en a un peu bouffé à la pelle à tarte depuis toujours, quand on ne les a pas vécues. Là on nous pimente le steak d'une matrone droguée pour tenter de cacher furtivement que le film ne parle que d'une vague histoire de détermination et de succession symbolique. Donc voilà, si t'as quatorze ans et que tu commences tout juste à t'interroger sur ton émancipation future tu vas kiffer, sinon, tu vas passer deux heures douloureuses avec un oscar fantasmagorique dans l'anus. Deux très longues heures même, émaillées de dialogues et de rebondissements dignes d'un Harlequin sans sexe et donc sans intérêt, avec même un espèce de concentré de thématiques Nabokov-iennes. Cerise sur le gâteau, ça suce jusqu'au bout Ada ou l'Ardeur, c'est pas piqué des hannetons.

Et comme si le scénario ne sombrait pas assez dans le surréalisme comme ça, il y a le casting. Avant d'en parler, Interlude:
http://www.youtube.com/watch?v=zi6wNGwd84g

Déjà, cri du coeur, il faut arrêter de tout passer à la grande Meryl Streep. C'est justement parce qu'elle est grande et qu'on lui doit le respect qu'il faut lui dire quand elle est naze comme une actrice de DTV. Sérieux les loulous, elle est tellement en roue libre qu'on dirait parfois qu'elle joue une femme qui joue la comédie. Faut se calmer les ovaires, au bout d'un moment, sa prestation ruine le peu d’ambiguïté que le scénario déjà pas fameux laissait au personnage; et quand on commence à se dire que Julia Roberts joue plus juste, c'est qu'il y a un sérieux problème. Je verse nécessairement une larme en écrivant ces lignes: après son inénarrable Dame de Fer, elle fait un superbe strike, et c'est pas pour être pessimiste mais voilà, vous savez ce qu'on dit, jamais deux sans trois. J'appréhende le prochain, si ça continue de monter en puissance comme ça, on est pas arrivés.

Sinon je ne sais pas si on vous a aussi rebattu les oreilles avec Margo Martindale, mais moi oui, et j'ai effectivement été soufflé par son interprétation de John Travolta dans le rôle de Divine dans le rôle de Madame Trunblad. Vraiment, elle avait plus de dignité dans Sublimes Créatures, j'en reviens toujours pas. Son personnage, comme tous les autres, est au delà de la caricature, c'est une sorte de caricature alpha, c'est même à la caricature ce que la patanegra est au jambon: sa déclinaison ultime. Et puis comme on n'y va pas avec le dos de la cuillère à Osage County, on lui a foutu une sorte de parodie de Chuck Norris pour mari et un fils avec deux neurones qui se battent en duel pour savoir lequel sera crédité au générique. Et Juliette Lewis qui fait la pouffe, Ewan McGregor en sous-régime qui semble se demander à chaque plan ce qu'il vient foutre ici: l'absence évidente de direction d'acteur coûte chère à un long-métrage déjà terriblement bancal sur le papier.

Et surtout, bordel, quand on adapte une pièce de théâtre, on fait honneur à son médium. Le texte est ultra-archaïque, on a l'impression de passer du coq à l'âne afin que chaque personnage ait sa tribune et sa petite remarque cinglante avant que le rideau ne se baisse. La plupart des paraboles scénaristiques n'apportent rien, quand on nous balance pas directement à la gueule l'absence totale d'intérêt de certains arcs narratifs, comme le mariage de Bill et Barbara (et vraiment, Bill et Barbara? Boule et Bill tant que vous y êtes) dont on n'a rien à cirer et dont "l'intrigue" (notez les guillemets) se solde par un épique cul de sac littéraire; tout comme l'histoire d'Ivy et de Charles Junior, qui n'est juste pas conclue. Parce que voilà, on sait jamais, ça aurait pu donner un truc subversif.

Et il y a toute cette hystérie opportuniste, ce cynisme poseur qui ne servait déjà pas des films bien plus solides comme Un Conte de Noël de Desplechin, cette façon de remplir les scènes avec des cris, des larmes, des trucs sans authenticité ni même, a contrario, une véritable ambition cinématographique, la mise en scène étant d'une platitude absolument surréaliste. Et tout ce beau monde de battre tellement des bras dans le vide pendant deux heures qu'on parvient à peine à réaliser la simplicité du message qui nous est martelé, inoffensif au possible, et qui vient une ultime fois frapper l'enclume de la médiocrité absolue en dépit de quelques scènes plus réussies, mais qui le sont presque toujours à leurs dépends, par excès de grotesque.

C'te bouse quoi.
ClémentRL
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le 7 mars 2014

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