Sorti en 1983 , Un Jeu Brutal est le premier long métrage de cinéma de Jean-Claude Brisseau réalisateur autodidacte et ancien professeur de français qui signe ici une entrée assez fracassante dans le monde du septième art. Même si le film n'est pas exempt du moindre défaut , Un Jeu Brutal est un film fort et assez fascinant dont le trouble poison interroge bien longtemps après son générique de fin.
Un Jeu Brutal nous raconte l'histoire de Christian Tessier (Bruno Cremer) un scientifique paranoïaque qui quitte ses fonctions pour s'occuper de sa fille handicapée qu'il avait abandonné à une institution. Il lui impose une discipline brutale et des principes d’éducations strictes et violents tout en continuant occasionnellement d'assassiner des enfants.
Il y-a presque deux récits dans Un Jeu Brutal celui de ce père perturbé et assassin à ses heures perdues et celui de cette jeune fille handicapée, misanthrope et sauvage se retrouvant contrainte à une éducation pour le moins musclée. Les deux histoires se rejoignent d'un point de vue narratif puisque forcément la relation père fille oblige à croiser leurs histoires respectives mais d'un point de vue thématique ou morale j'ai du mal à trouver le point d'accroche des deux récits à tel point qui si les deux axes fonctionnent très bien de manière indépendante je suis plus sceptique sur la corrélation entre les deux. L'aspect qui à mon avis souffre du moins de réserve est l'histoire de cette jeune fille qui en veut à la terre entière du fait de son handicap et qui va doucement s'éveiller à la vie, l'amour, la poésie, la nature et l'empathie au contact d'une préceptrice interprétée par Lisa Heredia une des comédienne fétiche de Jean-Claude Brisseau avec une dizaine de collaboration au compteur. On pourra tiquer sur les valeurs pédagogiques et morales que le film sous entend d'une éducation stricte à coup de privation de nourriture, de discipline, de tartes dans la gueule et de menaces de coups de fouets mais en dehors de cet aspect là, le film offre un très jolie portrait d'une adolescente et de son éclosion sur le monde. Superbement interprétée par Emmanuelle Debever à la fois forte et fragile, le personnage d'Isabelle est particulièrement touchant dans sa lente mutation et les découvertes de son corps à travers une superbe scène durant laquelle elle s'observe nue dans un miroir qui ressemble à un tableau posé sur le sol, de la vie par le biais d'une communication et d'une communion avec la nature ou de la notion d’empathie par le biais notamment de la poésie avec Place du Carrousel de Jacques Prevert. Magnifiquement mis en image par Jean-Claude Brisseau avec une forme de douceur naturaliste et affective qui enveloppe parfois le personnage, le film prend carrément parfois des allures de récit initiatique. 
Quant à l'aspect plus policier avec ces histoires d'homicides d'enfants par le père de famille parfaitement campé par Bruno Cremer il est à le fois redoutable par la mise en scène percutante de Brisseau mais pas pleinement convaincante au cœur du récit. Sans trop en faire, avec un  montage froid et clinique, un choix de cadres et de mise en scène rigoureux Jean-Claude Brisseau suggère plus qu'il ne montre plusieurs meurtres d'enfants qui parviennent à franchement glacer le spectateur par leur violence sèche et mécanique. Je suis en revanche beaucoup moins convaincu par la pseudo justification que le personnage donnera pour expliquer son comportement, à tel point que je me serais clairement contenter d'une aura plus mystérieuse, voir opaque sur ses pulsions. Toujours autour de cette partie de l'intrigue on trouve une séquence qui pour moi sonne horriblement faux avec deux gamins qui ne jouent pas très bien et auxquels en plus on a donné des dialogues avec des mots et des phrases d'adultes amplifiant le flagrant manque de naturel de l'ensemble. Quant au rapprochement entre les comportements du père et de la fille je ne sais trop quoi en penser, il est visiblement question d'accepter comme d'aller contre la nature du mal ??
Un Jeu Brutal est un film assez fascinant pour sa violence froide et touchant pour le très jolie portrait de son personnage féminin complexe et émouvant. Si tout n'est pas parfait le film de Jean-Claude Brisseau reste en tête là ou tant d'autres films s'évaporent une fois le mot fin arrivé sur l'écran.