Un Mois en Thaïlande aurait pu s’appeler « Bucarest 31 décembre ». 24h de la vie d’un homme qui hésite sur sa propre définition du couple idéal et sur qui pourrait le compléter pour remplir la fonction. Un premier film pour le moins désenchanté, qui met à mal le cliché de l’âme soeur.

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L’action se déroule à Bucarest mais cela pourrait se passer dans n’importe quelle ville occidentale. Radu est en couple depuis 9 mois avec Adina et ensemble, ils se préparent à fêter le nouvel an. Le jeune homme aurait toutes les raisons d’être heureux, pourtant, peu enclin à exprimer ses sentiments, il semble absent et même encore obnubilé par une histoire d’amour plus ancienne. Et qui doit se passer, arrive : Radu rompt brutalement avec Adina.
Un Mois en Thaïlande est un film sur l’indécision amoureuse et sur l’idéalisme qui se confronte à la réalité. Radu aime et il est aimé en retour, mais ce n’est pas pour lui suffisant. Il lui en faut plus : plus d’entente, plus de passion ; il veut plus de tout et de rien, il ne le sait pas vraiment lui-même. On le suit une nuit entière dans ses hésitations, ses tergiversations et la réécriture de sa propre histoire : le retour possible puis avéré de Nadia – cette ex qui, avec le recul, a épousé le contour de la femme de sa vie – a activé chez lui le rêve d’une nouvelle chance et d’une nouvelle vie plus « amoureuse ». Il la cherche dans tous les cafés et soirées du nouvel an et au-delà même de vouloir se rabibocher avec elle, il veut surtout lui expliquer qu’il a changé d’avis. Aujourd’hui, Nadia est à ses yeux son âme soeur, mais rien ne dit qu’Adina ne le redevienne dans neuf mois. Radu y mettra autant de certitude et volonté à le croire.
Un mois en Thaïlande est un film modeste quant à son envergure ; il n’empêche et Paul Negoescu tire le meilleur de son sujet que ce soit par sa mise en scène ou par la structure même de son film. Ne rentrant vraiment jamais dans le champ, le cinéaste roumain observe son personnage principal de loin, de profil, de dos, avec un certain détachement comme il le ferait pour une étude zoologique. Au risque de porter un regard froid sur son personnage. Très habilement, Negoescu exprime surtout dans son film le caractère interchangeable de la femme convoitée par Radu : celle-ci sert avant tout à remplir une fonction fantasmée, un idéal et elle doit le faire au mieux, sous peine d’être larguée. Tout concourt à cette idée : Adina n’est que l’anagramme de Nadia ; le voyage de rêve projeté avec l’une est finalement proposé à l’autre et surtout le film se ferme et s’ouvre de la même manière. Radu en train de faire l’amour dans un lit avec une lumière matinale et un cadrage identiques : seule sa partenaire a, entre temps, changé. Dur.
denizor
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le 28 juin 2013

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