On est plutôt habitués ces derniers temps à de la sciences-fiction très élogieuse des effets spéciaux et de la consommation massive de fonds aussi bleutés que verdoyants. Il est évident que le petit film, extrêmement réaliste et expérimental est un véritable OVNI dans ce paysage cinématographique. Terriblement hypnotisant et souvent incompris, dans un élan d'espoir et de narcissisme, j'espère que ce goubli-boulga de mots vous convaincront de vous attarder sur ce film qui s'avère, vraiment, plein de qualités.


Si tu n'as pas vu ce film, fuis pauvre fou ! Ou apprête-toi à manger du spoil en masse.


Under The Skin est un film extrêmement riche, aussi bien par ses images envoûtantes mais aussi par ses thématiques qui nous concernent. On suit l'histoire de Scarlett l'Alien, qui fait une petite ballade sur Terre, elle est confrontée à ses désirs et pulsions, dénuée au premier abord de sentiments, vous serez pendant le premier tiers du film, spectateur de la bonne chair que nous fait notre très glamour, Scarlett. Séduisant les hommes par ses charmantes courbes et par sa voix séduisantes elles les gobera, les aspirera dans son lac noir, dans les tréfonds de son appartement.
Néanmoins le film ne s'arrête pas là, on découvre peu à peu que l'attitude de Scarlett évolue, on découvre d'autres facettes de son personnage, mais son environnement et les personnages qu'elles rencontrent seront aussi très variés, ce qui dessineras peu à peu, nous, les humains. Disséminant de nombreux indices à travers le personnage mystérieux de l’extraterrestre, mais aussi avec toutes les rencontres qu'elle fera, le film est un véritable écho à ce que nous sommes réellement.


En premier lieu, comme beaucoup l'on bien constaté, le film nous livre une vision des pulsions et désirs, aussi bien par le personnage de Scarlett, qui pour un besoin inexpliqué, doit consommer de la chair humaine, mais aussi à travers ses victimes qui menées par leur cerveaux phalliques, se laissent entraîner dans les abysses de l'Alien. Cette métaphore des désirs est d'ailleurs renforcée par de nombreux mécanismes dans le film, notamment le lac noir vers lequel Scarlett mène ses victime. On le retrouve à plusieurs reprises tout au long du film, à la frontière entre une réalité et une vision onirique, cette forme imagée nous permet de saisir pleinement le côté très intérieur à ses pulsions, qui finalement, nous mènent dans un endroit où nous n'avons plus de contrôle. Mais aussi par l'utilisation de la couleur rouge, qui s’immisce dans certaines scènes, notamment en boîte de nuit.


En outre, le film nous illustre également, le portrait d'un humain solitaire. L'Homme a beau vivre avec sept milliards de congénères, il reste seul. Pour cela, Glazer va souvent filmer en lieu publique, on suit Scarlett parmi la foule d'êtres humains, et on se rend compte que finalement les attitudes sont très, trop individuelles. Les gens marchent dans la rue, ils ne se parlent pas, agglutinés sur leurs portables, ou dans les magasins, on constate à travers l’œil de l'étrangère, l'absurdité d'une telle société qui reste enclavée sur elle même. On croyait que notre alien était seule parmi une espèce dominante, mais finalement, elle n'est que le miroir de nous tous. Se baladant dans son van à la recherche d'un objectif inexistant, elle roule, elle roule encore.


Tout l'intérêt du film va alors pouvoir se développer, une réelle évolution du personnage de Scarlett va prendre forme au fil de « l'intrigue ». D'abord froide et sans pitié dans ses actes, je pense à la scène de la plage particulièrement marquante, où elle tue un père devant son fils sans aucune pitié, mais aussi par la multitude d'hommes qu'elle a piégés auparavant ; elle va ensuite avoir des sentiments, finalement les bons côté de l'Homme se manifestent. Se tournant est marqué avec la scène de l'homme défiguré, où finalement elle l'épargne, et se retrouve après face à un miroir. Des larmes coulent sur ses joues. Elle découvre alors qu'elle a des sentiments. En utilisant toujours le regard de l'extraterrestre depuis le début, on est marqué par cette approche, on s'identifie à cette personne qui découvre le monde, et qui se découvre sois-même.


Le périple continue, elle quitte alors la ville et se rapproche d'un univers plus naturel, proche d'une forêt. Est-ce une approche de l'état primitif de notre nature ? Je pense que oui. En choisissant un décors mystique et isolé, nous plongeons dans les profondeur de la nature humaine. Cette image est d'ailleurs renforcée par la rencontre d'un homme plutôt bon et désintéressé qui mène Scarlett dans un lieu très profond sous terre. A partir de ce moment elle ne parle plus, elle est de nouveau face à un monde d'avantage inconnu et austère, cette homme éprouve finalement des sentiments pour elle. On pourrait croire qu'elle aussi lorsque face au miroir elle se voit, rappelant la scène antérieure, elle se découvre réellement. Terrorisée par cette découverte, et l'existance de sentiments, et par les désirs naissant de cet homme, elle fuit et s'isole dans une cabane en pleine forêt.


Au plus profond de la nature humaine réside l'animal. Il fallait s'en douter, lorsque Scarlett, est dans un sommeil profond un homme tente d'abuser d'elle ; se réveillant en sursaut, elle parvient à fuir, mais l'animal en rûte n'est pas loin, sa chasse ne fait que commencer, il la poursuit entre les troncs, et finit par l'attraper. Tentant de la violer, il finit par arracher la peau de Scarlett, dévoilant pour la première fois au grand jour ce qu'elle est. L'homme prit de terreur s'en va. Très pessimiste à l'égard du comportement humain, Glazer ne s'arrête pas là, note agresseur revient et asperge d'essence notre victime. Décidément, la peur de l'étrange a envahit l'homme, notre Alien finira immolée, pour gésir plus loin dans un manteau de neige, plein de pureté.


Une fin coup de poing pour une humanité que l'on commençait peu à peu à connaître et à apprécier au travers des yeux de notre Alien, on pensait qu'il y avait encore un peu de bonté dans ce monde, grâce à cette homme qui avait aidé Scarlett. Mais finalement le côté bestial nous a sauté dessus, et à détruit toute notre confiance que nous avons accordé à l'humanité.


Glazer fait une réelle réflexion sur nous, les humains, en proposant une approche plutôt originale, d'un extraterrestre découvrant ses derniers. On est plongé au sein même de l'histoire, à la fois familière et inconnue. En adoptant une réalisation minimaliste et très réaliste, le résultat est très efficace. Certains accuse le film d'être trop long, je pense qu'au contraire, le film ne nous livre qu'un aperçu de notre essence et qu'il faut aller bien plus loin. Notre propre complexité nous échappe encore.


Le regard masqué d'une alien perdu parmi les humains : Miss Collage de Lochson

ectorlavoisier
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le 10 juil. 2014

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ectorlavoisier

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