Gites à la ferme : et si vous veniez marcher dans la bouse de vache ?...

C'est tellement beau, tellement poétique que je suis d'accord avec le cambraisien d'origine, Christian Carrion : "Labourages et pâturages sont ses deux mamelles de ce film" . Et ce n'est pas une bêtise... de Cambrai (pour les néophytes : bonbon mentholé qui a rendu célèbre cette localité du Nord)
C'est son premier film et son premier scénario (partagé) mais dommage : depuis 2001, que cinq films au compteur...Pourtant quel talent !
Le public ne s'y était pas trompé : pour un coup d'essai ce fut un coup de maître ! Le nouveau siècle valait à Carrion 2 338 978 entrées l'année où Harry Potter triomphait au Box Office, avec une 20° place et un taux de rentabilité de 332 %...
Ce petit miracle avec très peu de moyens... une ferme que son propriétaire est en train de vendre la retraite venue, et sa femme disparue... Et un tout petit casting...
Mais avec un grand, un très grand Serrault ! Bougon et émouvant comme il savait le simuler.
Mais pouvant se montrer très tendre aussi... Les grands clowns savent être de merveilleux tragédiens...
Mais si j'excepte Mathilde Seigner que je n'ai jamais appréciée, même les seconds rôles m'ont marqué : Jean-Paul Roussillon (1931-2009) qu'on croirait presque vraiment éleveur ! Plus vrai que nature et quel palmarès cinématographique !
Aussi Frédéric Pierrot toujours, souvent malheureusement confiné aux seconds rôles, et pourtant jouant toujours très vrai comme ici dans le rôle d'un amoureux éconduit (il l' a échappé belle !)
Même le producteur s'est piqué au jeu en faisant l'acteur... à moins que ce soit pour limiter les dépenses ou suppléer une défection ?
Tout cela est extrêmement sobre, naturel et on voit les saisons passer, la rudesse des hivers éloignés de tous et de toutes, les aléas du métier d'éleveur comme cette épidémie tueuse de bétail...
Nombre d'images sont superbeset parfois surprennent : ainsi cette éclosion dans l'horizon, comme née de la terre, d'un adepte du parachute ascensionnel....
La plupart du temps, la musique est une féérie sauf la vieille scie du temps des 78 tours qui vient nous agacer... Et on sourit parfois à certaines répliques comme : "La margarine, nous on appelle ça du beurre de taureau !"
Tout cela est très beau comme un grand bol d'air pur dans cette nature où "la main de l'homme met de moins en moins les pieds"
Beau mais si dur à vivre pour le travail !

la une (RTBF) le 1104..2022