Vu en avant première au cinéma Lumière Terreau dans le cadre de la sélection de films présentés au festival de Cannes 2025. Sortie salle en France août 2025.
Parmi la sélection cannoise choisie par l'institut Lumière et son Président Thierry Frémaux "Valeur sentimentale " de Joachim Trier était clairement celui que j'attendais le moins. En effet, je reste peu sensible à la proposition de ce cinéaste et je ne pourrais même pas faire un inventaire à la Prévert de ce qui m'y déplait réellement, c'est d'une subjectivité absolue, un quelque chose qui ne s'explique pas, mais qui parfois empêche une connexion avec un univers. J'avais même pas du tout apprécié "Julie (en 12 chapitres) ", dont vous pouvez retrouver ma critique si vous le souhaitez, un film dont l'héroïne m'avait prodigieusement irrité et un film qui dans sa façon de tout lui pardonner m'avait laissé l'amer sentiment d'être devenu un vieux con. Autant dire que je me préparais à vivre cette séance, non pas avec les fourches, mais sans doute avec un apriori à qui le film devra opposer de solides arguments pour me convaincre. Le défi est partiellement réussit.
Partiellement, car si j'ai effectivement préféré ce film à ce que j'ai pu jusque là découvrir du réalisateur, il ne m'a pas pour autant transporté plus que cela et je trouve même la litanie de commentaires élogieux - un point commun d'ailleurs avec le précédemment cité "Julie …" - quelque peu surfaite. Oui la mise en scène est propre, mais elle n'est pas non plus spécialement inoubliable, elle convoque très souvent un classicisme qui sans forcément me déplaire, m'oblige à modérer mon enthousiasme, surtout dans une sélection cannoise qui regorge de propositions, parfois ratée, mais bien plus audacieuses.
J'ai pu être touché émotionnellement par ces portraits croisés au sein de cette famille, qui à bien des égards ont pu m'évoquer des choses personnelles, dont certaines de l'ordre des regrets ou du ressentiment, mais jamais je n'ai été bouleversé à la hauteur des émotions décrites par la quasi totalité des spectateurs l'ayant vu. Serait-ce un effet secondaire d'une découverte à Cannes dont j'ignore les symptômes ? Peut-être, mais alors cela devrait d'autant plus inciter le public / critique à réserver son enthousiasme et à peut-être prendre le recul nécessaire pour constater que bien que empli de qualités, il est aussi handicapé par d'énormes soucis notamment dans le traitement de son sujet central. Un traitement qui jamais ne me convainc, que je trouve survolé par endroit et paradoxalement trop appuyé à d'autres, je n'arrive ni à y croire, ni a adhérer, ni à rentrer en osmose empathique avec l'un ou l'autre des personnages et je reste finalement très distant. J'ai même l'impression que Trier ne sait pas vraiment quoi faire de son sujet et qu'il compense cela par un désir presque sadique à surligner plus que nécessaire un affect émotionnel très artificiel.
Je salue les prestations des comédiens, notamment Renate Reinsve, qui déjà dans "Julie..." était l'un des rares points positifs et qui m'a littéralement ébloui et subjugué dans "La Convocation " mais il faut dire qu'elle m'y rappelle, tant physiquement que dans l'expression de sa féminité, mon plus bel amour, alors je peux admettre un manque d'objectivité mais je suis persuadé qu'elle une très grande actrice.
Ma note reflète donc mon impression générale, à savoir un léger mieux dans ma réception, mais on est encore loin du cinéma qui me touche et c'est un film que je ne chercherai pas à revoir. Je reste cependant curieux des retours par un public épargné par la fièvre cannoise, ainsi que de ceux qui iront le revoir après leur découverte durant la frénésie du festival et ne serait pas étonné plus que cela, que certains reviennent sur leurs éloges.