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Après l’annonce en mai 2020 du deal signé entre Alex de la Iglesia, l’un des maîtres de l’horreur, avec la Major Sony, on avait hâte de voir sur quoi l’accord allait déboucher.

Veneciafrenia est le premier opus de la « fear collection » qui en découle. Sur le papier, l’idée était excitante et le film prometteur. En témoignait la présentation du long métrage en première mondiale en ouverture du PIFFF, le Paris International Fantastic Film Festival, l’un des rendez-vous incontournables du genre avec Gérardmer.

Àlex de la Iglesia n’a pas toujours réalisé que des chefs d’œuvres, mais le cinéaste espagnol compte tout de même quelques pépites à son actif, notamment l’ingénieux Le Jour de la Bête, ou encore – sur un ton plus proche de la comédie – Le Crime farpait. Du haut de sa vingtaine de longs métrages réalisés, on pouvait s’attendre à une incursion déjantée du côté du Giallo.

Pourtant, Veneciafrenia apparaît dès les premières minutes comme un petit navet, téléfilm sans âme et rempli de défauts.

Venise, lieu unique de l’intrigue, a pourtant un cachet cinématographique très important : ses ruelles, ses ponts et ses gondoles de nuit sont un terrain de jeu magnifique pour qui veut s’aventurer du côté de l’horreur. En témoigne le récent Mystère à Venise de Kenneth Branagh. Depuis toujours, la ville a d’ailleurs suscité l'intérêt des réalisateurs pour des films au climat anxiogène, tels Mort à Venise de Luchino Visconti ou encore Ne vous retournez pas, de Nicolas Roeg.

Pourtant, ici, Venise est tellement engoncé dans son carcan de clichés qu’on ne croit pas une seconde aux malheurs de notre bande de jeunes. Venus fêter un EVJF, nous suivons cinq touristes espagnols, 3 filles et 2 gars, qui débarquent de l’un de ces immenses paquebots qui défigurent le paysage de la baie vénitienne pour se mettre des mines et faire la fête. En plein Carnaval. Malheureusement pour eux, la révolte gronde chez les habitants de la lagune contre le débarquement par ses gigantesques cargo-villes de touristes toujours plus nombreux, qui viennent menacer l'équilibre précaire du lieu.

L’un des principaux problèmes à mon sens (outre le jeu d’acteur vraiment risible) est la caractérisation des personnages. Les cinq jeunes d’abord : des têtes à baffes qu’on déteste d’entrée de jeu. Des bœufs que l’on aurait plutôt vu sur Ibiza (les jeunes en font d’ailleurs plusieurs fois référence) ou sur Mykonos en plein mois d’août, plutôt que dans la belle Venise. Le film joue maladroitement sur ce décalage, mais l’idiotie de ces crétins nous empêche, en tant que spectateur, d’entrer en empathie avec eux. S’en suit un désintérêt total de leur sort.

Mais la pauvreté d’écriture des personnages touché également les seconds rôles. D’un côté un flic ridicule, qui déclenche une vaste enquête après 3 minutes de discussion avec des jeunes paumés et qui n’hésite pas à entrer chez les gens et fouiller les palais vénitiens sans se formaliser du moindre mandat ; et de l’autre des méchants Vénitiens, protecteurs de la ville, qui profitent du Carnaval pour sabrer au hasard des touristes sans s’inquiéter le moins du monde des répercussions.

Au final, je crois que mon passage préféré de ce Veneciafrenia est son générique de début franchement réussi, tout en animation et en références aux films de Dario Argento et du Giallo en général. L’autre qualité principale du film est les costumes. On sent que l’équipe costumes et maquillages a dû se faire plaisir. Les tenues de carnaval sont extrêmement réussies (encore heureux…).

Là où on attendait un slasher aux petits oignons dans un cadre cinématographique superbe, on se retrouve avec un petit film d’épouvante de série B, une tâche dans la carrière de son réalisateur… Rien d'étonnant, après une sortie en salles en Espagne il y a maintenant plus de 2 ans, à ce que le film ne nous arrive en France que directement sur plateforme.

Faux départ donc pour Veneciafrenia. Il nous reste à espérer que la suite de la fear collection relève le niveau…

D-Styx
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le 29 mars 2024

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D. Styx

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