A première vue, Vengeance à l'aube est une série B typique. Réalisée par George Sherman, honnête artisan prolifique, avec un casting un peu à la marge, Rory Calhoun en acteur principal, qui s'avère ici très bien dans un rôle plus complexe que ceux qu'il avait l'habitude de jouer.
Et pourtant, pas mal de qualités émergent de cette série B, et les amateurs savent qu'il n'y a pas de jugement de valeur dans ce fait.
Citons : - La première ville dans laquelle se passe l'action est inhabituellement naturaliste. Le soin apporté au décor est assez rare. (Je dois avouer que sans les bonus DVD de Brion et Tavernier, je serais passé à côté de celle-là.)
- L'ensemble se présente comme une variation sur le thème de O.K. Corral, on se dit qu'on est sur un sentier balisé, peut-être un peu ennuyeux aussi. Sauf que les enjeux sont très vite expédiés, et que le film part sur autre chose, et que par ailleurs il ne manque pas d'idées, comme on le voit très vite avec cette fête que donne le pseudo Doc Holliday joué par Calhoun pour ses propres funérailles.
- Le personnage représentant Wyatt Earp apparaît très peu, et pourtant on le sent déjà complexe. On a l'impression d'un personnage dur, peu recommandable, et pourtant humain. Un tel soin à un personnage qui s'avèrera très secondaire est la marque d'un film réussi.
- Le passage dans la diligence rebat les enjeux, et ici les dialogues deviennent très bons, avec également une surprenante sortie du personnage du tueur, qui donne soudain de la profondeur à tout cela. Personnage curieux il faut bien le dire, que ce gunslinger alcoolique, à la fois menaçant et bouffon, comme si Thomas Mitchell et Arthur Kennedy avaient fusionné dans le même personnage.
- L'arrivée dans la seconde ville est l'occasion de découvrir un nouveau personnage, le shérif joué par Edgar Buchanan, loin des stéréotypes qu'on attendait.
- Le personnage féminin joué par Piper Laurie n'est pas mal non plus : méprisée par son père intégriste qui la traite de Jézabel, elle le prend au mot et s'improvise fille de saloon. Sa nouvelle condition dégradante, elle l'affronte avec courage et force de caractère.
Plein de qualités donc, pour ce petit western de série B, qui mérite d'être découvert ou redécouvert.