Vital
6.8
Vital

Film de Shinya Tsukamoto (2004)

J'avoue avoir un peu de peine avec le style expérimental. Sur le fond, j'apprécie évidemment l'idée qu'un réalisateur use d'une certaine prise de risque en tentant quelque chose de nouveau ; quelque chose qui sortirait des sentiers battus, mais techniquement, je bute sur le résultat. L'expérimental, c'est chouette lorsqu'on essaie vraiment d'arriver à ses fins. Mais d'une part, c'est extrêmement difficile de s'y risquer, et d'autres parts, il faut éviter le fameux piège "je fais différents parce que je veux faire différent". Vouloir donner une forme différente à son oeuvre est un choix tout à fait honorable. Mais encore faut-il le justifier. Énormément de films expérimentaux le sont simplement pour se donner un genre, un peu comme le gothique qu'on a tous eu un jour en classe qui ne connaissait pourtant pas un traître mot de la bible.

Vital combine hélas les deux problèmes. La scène d'ouverture, symbole du "je fais différent parce que je veux être différent", m'a explosé la tête sans aucune justification. S'en suit alors la prise de risque un peu maladroite d'un héros, sorte de double chinois de Keanu Reeves, qui déambule dans le film sans trop savoir où aller.

C'est dommage parce que je trouve le film plein de bonnes idées ! Les songes éveillés du personnage nous offrent les soubresauts qu'il faut, certaines symboliques que l'on peut se plaire à analyser fonctionnent (je prend pour exemple les portes de l'ascenseur qui peinent à s'aligner ; symbole d'un héros qui peine à remettre en lien son passé et son présent ? où est-ce encore autre chose ?) le problème c'est que Vital déborde aussi d'idées qui ne marchent pas (les strangulations ont quelque chose de profondément ridicule). De plus, je trouve la réalisation audacieuse mais souvent désastreuse. Je prend pour exemple ici la caméra qui tente désespérément de suivre les mouvements de la danseuse sur la plage. Le problème, c'est qu'on a constamment l'impression que la caméra ne s'attend pas du tout aux mouvements de la demoiselle. Résultat, l'image a systématiquement quelques fractions de secondes de retards qui nous font rater toute la scène.

Tout ceci fait que Vital s'essouffle vite (jeu de mot involontaire) et peine à maintenir le public dans son univers pourtant plein de bonnes intentions. Personnellement, j'ai dormi une dizaine de minutes vers la fin, et non je ne regrette rien.

Bref c'est dommage car si vital avait fait preuve d'un peu plus de sobriété dans sa mise en scène, il aurait sans doute paradoxalement gagné en intérêt et on aurait pu mieux se plonger dans sa profondeur. Ici, le film souffre du même soucis que j'avais reproché à Kubrick, à savoir que le film ne se soucie pas de son public ; et donc forcément, le public de se souciera pas de ce film.
LeCactus
4
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le 29 déc. 2013

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