Un western fou

Antonia Bird avait toutes les qualités pour s’imposer comme une grande cinéaste. Malheureusement, la maladie l’a emportée avant qu’elle ne puisse déployer pleinement son talent. En quatre films seulement, elle a laissé une œuvre sans fausse note. Vorace demeure sans doute celui qui lui assure aujourd’hui une véritable postérité. Peu remarqué lors de sa sortie, ce long métrage est devenu au fil des années un film culte.

Ce récit singulier, à la croisée du western et du cinéma d’horreur, mêle avec audace les genres et les atmosphères. Le protagoniste — ou plutôt l’anti-héros — est incarné par Guy Pearce, dans le rôle d’un soldat nordiste dont la lâcheté, par un ironique concours de circonstances, lui vaut les honneurs militaires. Envoyé dans un fort isolé, enseveli sous la neige, il y découvre une garnison de soldats pour le moins atypiques. Là, il croise également un mystérieux vagabond, interprété par un Robert Carlyle hypnotique, qui réveille en lui des démons bien enfouis.

Le scénario, signé Ted Griffin, est d’une rare intelligence. Sans cesse surprenant, il se révèle surtout d’une redoutable finesse : tout dans Vorace fonctionne comme une métaphore, une relecture féroce et malicieuse des mythes fondateurs des États-Unis. Mais le film est avant tout un spectacle fiévreux, traversé d’une tension presque ininterrompue.

Les acteurs y sont tous remarquables, la photographie somptueuse, la musique à la fois étrange et envoûtante.

Vorace est un western horrifique totalement débridé — et c’est précisément ce qui le rend inoubliable.