Voyage vers Agartha
6.7
Voyage vers Agartha

Long-métrage d'animation de Makoto Shinkai (2011)

Comparé à tort ou à raison à Miyazaki, Makoto Shinkai, qui avait de nombreuses fois montré son talent, revient à la charge, et il est certain qu'avec cette nouvelle production la comparaison est inévitable. On retrouve son soucis du détail, comme à l'accoutumée, mais il laisse cependant totalement tomber les multiples lectures, ce qui est un bon point, car son film est long, et inutile donc de risquer de perdre son public en cours de route. Une histoire assez simple, donc, formatée pour être comprise par un public large, ce qui laisse peut-être entrevoir une certaine pression de la part de ses producteurs, CoMix Wave. Cependant, s'il abandonne la plupart des thèmes qu'il avait usé par le passé (et qu'il enterrait à la fin de 5cm per second), à savoir la jeunesse, la séparation, la solitude, il s'attaque cette fois ci à un autre, la mort. Encore une inquiétude que l'auteur nous fait ressentir, bien qu'il la noie un peu, s'attachant d'abord à l'aspect aventure de l'ensemble, car s'en est une, mêlant quête de la vérité et exploration d'un monde surnaturel où la beauté côtoie constamment l'horreur, notamment avec ses créatures chimériques rappelant Princesse Mononoke. Une comparaison qui n'est d'ailleurs pas hasardeuse, car si le synopsis et les personnages paraissent enfantins, il provoque la même surprise que celui-ci; nous ne sommes clairement pas dans un film destiné aux enfants, et l'on y retrouve le même gore, tout comme des monstres qui auront de quoi donner de multiples cauchemars à nos chères têtes blondes.

Bref, Children Who Chase Lost Voices from Deep Below est une œuvre de toute beauté, moins austère dans son approche, avec une narration plus mûre (bien qu'il y ait quelques baisses de régime), mais il reste clair que si l'on est contenté par l'ensemble, on a davantage l'impression de regarder un Ghibli qu'un Shinkai. Ceci va d'ailleurs même jusque dans le character design, avec un jeune héros ressemblant à Ashitaka, que ça soit physiquement ou dans son caractère tête brûlée.
Outre cette comparaison qui pourra laisser dubitatif les fans de l'auteur, il a néanmoins corrigé certaines petites choses, comme dit plus haut, mais aussi au niveau de l'esthétique, oubliant définitivement les étoiles multicolores qu'il ne plaçait pas toujours de façon pertinente, et qui avaient la fâcheuse tendance de gâcher certains plans. Il garde toujours des étoiles, car visiblement il les aime, mais les intègre directement dans le dessin plutôt que les rajouter numériquement; il semble donc qu'il ait écouté les reproches de son public. Un parcours visuel sans fautes, une histoire touchante, un style simple, mais riche en rebondissements, Shinkai tient ici sa meilleure production, tout du moins grand public.
Précision presque inutile, Tenmon est comme à l'accoutumée de la partie pour la composition du score, qui est, vous vous en douterez, sublime.
Pour conclure, les fans de Shinkai seront une nouvelle fois enchantés par un déluge d'environnements toujours détaillés au paroxysme, et profiteront, grâce au budget du film, d'une animation bien plus décomposée qu'auparavant, et s'ils n'ont pas la chance de pouvoir le voir en salles, ça serait presque un crime, car un distributeur se doit de le diffuser sur toile afin de pouvoir en apprécier toute la substance. Le récit étant plus « familial » (entendez là adultes et ados), il décevra ceux qui se droguaient avec ses multiples niveaux de lectures, mais devant tant de splendeur, il sera difficile de rester stoïque.
Mention spéciale pour la scène d'ouverture, qui curieusement semble servir de transition avec 5cm per second et enfoncer l'impression que l'on avait que l'auteur avait franchi une étape; elle est simple, un cerisier dont les pétales de fleurs tombent, avant de disparaître.
SlashersHouse
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le 21 janv. 2012

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