War
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War

Film de Siddharth Anand (2019)

Des choses gentilles à dire sur ce film :

Quand le meilleur des meilleurs agents indiens pète une pile et se met à décaniller des huiles, quoi de mieux que de lancer à ses trousses son meilleur élève, celui qui le connaît le mieux et qui a au moins une aussi belle gueule que lui pour le coincer. War c’est l’affrontement au sommet entre le major Kabir Dhaliwal (Hrithik Roshan), jadis rempart de l’Inde contre la vermine islamiste, et le capitaine Khalid Rahman (Tiger Shroff), fils de traître autant motivé par la réhabilitation de son nom de famille que par la quête de réponses... Eh oui que t’est-il arrivé major Dhaliwal, toi qui était le meilleur d’entre nous ?

Rassurez-vous, pour la création de War, Siddharth Anand ne s’est pas tant penché sur les œuvres complètes de William Shakespeare ou de Pierre Corneille que sur l’intégralité des filmographies de Roland Emmerich, Michael Bay, John Woo, tout Mission impossible et tout Jason Bourne... ainsi qu’un paquet de spots de campagnes et autres séries dédiées à la gloire du premier ministre Narendra Modī (lequel a d’ailleurs son ersatz qui remet une médaille à la mère du capitaine Rahman). Il s’est même enfilé tout ça sans prendre de pauses, ni pour dormir, ni pour aller pisser, et s’est mis, encore tout tremblant, à tout régurgiter, à peine le générique du dernier film de sa programmation terminé, penché sur son clavier tel un Luc Besson du début des années 2000. Exagéré ? Au vu du résultat final, c’est pas si sûr.

War, c’est un de ces bons divertissements couillus, bas du front et patriotiques qui fleurissent ces dernières années en Chine, en Russie et en Inde. Si, avant tout, le spectacle y est roi, Siddharth Anand faisant sauter Tiger Shroff partout l’arme à la main et l’amenant à glisser sur le dos sur des distances anormalement longues et des surfaces extrêmement rugueuses pour flinguer avec style, on n’en oublie pas pour autant les bonnes vieilles valeurs et la beauté simple du drapeau national caressé par le vent. Trafiquants de drogue, sachez que, comme John Hatcher en son temps, le capitaine Khalid Rahman veille au grain et dispense une justice expéditive dès lors que la jeunesse est menacée par le fléau de la toxicomanie. Amis musulmans, sachez que les mafieux ne sont qu’un encas, vous êtes les prochains.

Le premier intérêt de War se trouve donc dans cet héritage du cinéma US over the top des années 1980-1990 (même si de beaux titres sortent encore régulièrement de ce côté de la planète), c’est rythmé, ça pète de partout, les tonneaux et les tables en bois sont pare-balles, c’est con, c’est con, mais c’est jamais chiant, c’est jamais lassant, c’est jamais blasé. Techniquement le scénariste/réalisateur Siddharth Anand s’est muni de tout l’arsenal à disposition : narration au flashback pour étoffer ses personnages petit à petit, méchant beaucoup trop retors pour la crédibilité du scénario, coups de théâtre bien bien gratinés, recours au plan séquence pour certaines bastonades, travelings circulaires typiquement bayesques, bande son typiquement Zimmer-like (sauf dans quelques séquences émotion ou ça peut virer à la musique de film d’entreprise)... Siddharth Anand maîtrise ses outils et surtout ne fait jamais de refus d’obstacle quand il s’agit de trop en faire.

Pour ce qui est du nationalisme, Siddharth Anand appuie fort. Inutile de faire un dessin : « Le pays passe en premier, en second et en dernier ». Même subtilité en ce qui concerne le conflit interne qui anime le major Dhaliwal : les lettres en néon de l’enseigne Hôtel Lotus située en arrière-plan à la fin de sa première grosse scène grésillent pour faire apparaître le mot Hell (à savoir enfer pour les non anglophones).

Pour ce qui est de la caractérisation des personnages justement, Siddharth Anand appuie tout aussi fort. Le grand méchant du film, que les occidentaux, ces pauvres fous, ne voient que comme un homme d’affaire (en même temps...), Rizwan Ilyasi (joué par Sanjeev Vatsa puis par Mashhoor Amrohi), n’est pas seulement un dangereux islamiste, c’est aussi un homme extrêmement intelligent et, à ce titre, il fait des analogies entre ses plans et le jeu d’échecs. Et, sous réserve qu’il n’y ait pas de libertés prises avec la traduction et l’utilisation par commodité du mot échecs pour désigner un autre jeu, c’est n’importe quoi.

Quant aux héros, qui ont l’Inde dans le cathéter, si leur relation transpire la grandeur, de ces grandeurs quasi-mythologiques, la testostérone et l’amitié virile, à l’écran, Siddharth Anand appuie tant et si bien que l’admiration du disciple pour son maître vire au désir réfréné et que l’ensemble du film flirte gentiment avec l’érotisme homosexuel. Non pas que l’homosexualité ait en soi quelque chose de drôle, mais le gouffre évident entre les intentions et le résultat final, avec ses sous-entendus lourds de sens et totalement involontaires, oui. Il suffit de voir ce magnifique champs contre-champs Khalid Rahman/Kabir Dhaliwal, la mine de poisson frit du premier répondant à l’avancée au ralenti du second, que les pales de l’hélico dont il a débarqué ébouriffent avec élégance.

Autre grosse valeur ajoutée, d’ailleurs, Tiger Shroff ! Si le charismatique Hrithik Roshan est plutôt chouette en Charles Martel indien, Tiger Shroff c’est autre chose. Quand il n’affiche pas un regard pénétré de la plus pure école Sophie Marceau, il arbore l’expression de Zoolander avec le plus grand des sérieux... Et ce même quand il a à taper le code secret 80085 (c’est à dire boobs ou nichons en anglais) pour entrer dans la base gouvernementale à laquelle il est affecté.

Voilà War est tout à la fois stylé, décomplexé, maladroit, puant et surprenant... et il fait un bien fou.


Jouez au bingo des clichés avec ce film, qui totalise 79 ingrédients

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Personnage > Agissement

Chute dans le vide en criant « Aaaaaah ! » - Répète une phrase 2 fois - À voix haute | Lit ou fait la lecture - Bagarre | Atteint, blesse ou tue un·e allié·e lorsque l’adversaire esquive - Bagarre | Enlève sa veste - Bagarre | Sauve un frère d’arme - Bagarre | Valdingue à travers une vitre, une palissade, une porte... - Course-poursuite | Défonce volontairement un portail avec son véhicule - Drame | Ferme les paupières d’un·e mort·e - Enlève ses lunettes | avant de parler - Évacue sa frustration sur le ring/en mettant la misère à un sac de frappe - Méchant·e grand format qui reste stoïque après avoir reçu un coup de poing - N’importe quoi | Projeté exagérément loin sous l’effet d’un coup de feu... voire d’un simple choc - Passe à travers une vitre | pour surprendre ou faire une entrée en scène stylée - Rendez-vous | Synchronisons nos montres - Saute d’un véhicule encore en marche - Se regarde dans un miroir | Maquillage, nœud de cravate, etc. - Stylé | Balance une petite phrase avant de tuer une personne (ou après) - Super pouvoir | Ce qui lui a été dit lui revient en tête mot pour mot

Personnage > Caractéristique

Blues | Sa femme, sa fille sa mère ou sa sœur est morte - Super pouvoir | A un œil de lynx - Traître·sse (coup de théâtre)

Personnage > Citation

Ordonne | « Couvre-moi » - Questionne | « C’est ça que tu cherches ? » / « Tu as perdu quelque chose ? » - S’exclame | « Tu es/vous êtes viré·e ! »

Personnage > Héros ou héroïne

Au chevet d’un·e proche - Se fait mitrailler sa baraque, sa chambre d’hôtel - Tape sur l’épaule d’un personnage avant de lui donner un coup de poing fracassant - Retourne les paroles du ou de la méchant·e/d’un ou d’une rivale contre lui/elle - Super pouvoir | Simple blessure au front, au bras... - Tension | Donne une leçon de courage face à son bourreau

Personnage secondaire

Bouclier humain - Se sacrifie pour sauver une figure d’autorité

Réalisation

Course poursuite | Gros plan du pied sur la pédale d’accélération ou de freins - Fin | C’est reparti pour un tour - Grammaire | Passage musical - Grammaire | Ralenti lors d’une chute ou d’un saut dans le vide - Grammaire | Ralentis injustifiés et insupportables - Habillage | Incrustation de texte sur l’écran : lieu, date, heure, etc. - Mise en scène | Se braquent l’un l’autre, canons et visages séparés de quelques centimètres - Plan | Inserts d’images de caméscope/smartphone/d’écrans de télé/vidéosurveillance - Stylé | Tire en sautant - Technique | Pluie artificielle artificielle - Technique | Travelling circulaire inutile - Vision subjective | Viseur de fusil à lunette - Vue subjective | d’une personne droguée, sonnée ou victime de malaise

Réalisation > Accessoire et compagnie

Arme | Clic au lieu du Bang - Enquête | Mur recouvert d’indices et de coupures de journaux - Stylé | Valise pleine de billets - Tension | Compte à rebours

Réalisation > Audio

Course-poursuite | Effet Doppler - Effet | Lasers qui font « piou-piou », touches d’ordinateurs qui font « pi-pou-pou » etc. - Woosh | mouvement / acrobaties

Réalisation > Surprise !

Faux suspense !

Scénario > Contexte spatio-temporel

Cérémonie de remise de médaille ou de prix - Cliché touristique

Scénario > Dialogue

Foule en délire - Philosophie ou psychologie de comptoir - Phrase-choc - Répliques à la con

Scénario > Élément

Drapeau national flottant au vent - Impérialisme, néo-colonialisme ou propagande | Les Indien·nes, c’est vraiment les plus fort·es - Renseignements glanés en deux clics sur internet

Scénario > Ficelle scénaristique

Empoisonné·e - hey hey heeeeey ! - Entre le héros/héroïne et le méchant/méchante, c’est une affaire personnelle

Scénario > Situation

Bagarre | Duel de fortes personnalités - Reprend connaissance | sur un lit d’hôpital - Tension | Torture

Thème > GI Joe

Agissement | Salut militaire - Répond | « Affirmatif !/Négatif ! »

Thème > N’importe quoi

Accessoire | Coiffure impeccable, en toutes circonstances - Carton-pâte | Tape aléatoirement sur un clavier d’ordinateur - Impossible, mais pourtant réussi | Tir (armes de jet, à feu) - Non-suspension d’incrédulité | Disparaît comme par enchantement - Scientifiquement non prouvé | Physique des matériaux soumise à rude épreuve

Thème > Sexisme hostile à l’égard des femmes

Objectification sexuelle | Reluque une femme - Objectification sexuelle | Tenues légères

Thème > Testostérone

Bagarre | Un seul bras pour les assommer toustes - Truc de mecs | Amitié virile

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Barème de notation :

  • 1. À gerber
  • 2. Déplaisir extrême et très limite sur les idées véhiculées
  • 3. On s'est fait grave chier
  • 4. On s'est fait chier mais quelques petits trucs sympas par-ci par-là
  • 5. Bof, bof ; pas la honte mais je ne le reverrais jamais ; y'a des bons trucs mais ça ne suffit pas
  • 6. J'ai aimé des trucs mais ça reste inégal ; je pourrais le revoir en me forçant un peu
  • 7. J'ai passé un bon moment ; je peux le revoir sans problème
  • 8. J'ai beaucoup aimé ; je peux le revoir sans problème
  • 9. Gros gros plaisir de ciné
  • 10. Je ne m'en lasserais jamais
IncredulosVultus
8

Créée

le 6 janv. 2024

Critique lue 20 fois

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