Abel Ferrara pousse la notion de scandale jusqu’au bout en livrant un film sans concessions inspiré de l’affaire Dominique Strauss-Kahn au Sofitel de New York. Un parti pris qui n’épargne aucun de ses protagonistes mais se perd dans sa volonté de choquer avant tout.

On dit qu’il a été boudé par le comité de sélection au 67ème Festival de Cannes, mais à vrai dire, eût-il été réalisé par un autre nom que Ferrara, aurait-il été considéré autrement que comme un téléfilm somme toute assez médiocre ? La critique ne s’y trompe pas et les premiers retours sont plus que mitigés suite à sa projection discrète au Festival.

Devereaux, tout comme son alter ego, est directeur du FMI et futur candidat aux présidentielles françaises de 2012. Mais c’est surtout un véritable sociopathe, qui n’a cure des personnes qui l’entourent, et l’avoue sans complexes. « Je n’ai pas d’émotions », confie-t-il à son thérapeute. Depardieu met tout son talent au service d’un personnage absolument répugnant et dénué d’empathie – ou l’acteur est-il devenu lui-même si antipathique qu’il n’a pas eu à se dépasser tant que cela ? Gras et vieillissant, il se fend de claques retentissantes sur les postérieurs de ses jeunes partenaires dans des scènes dignes du téléfilm érotique le plus lambda. Devereaux est un homme à femmes, nous dit-on, et toutes se pâment à ses pieds, mais c’est surtout un homme de pouvoir autour duquel gravitent prostituées, journalistes ou filles d’hommes politiques, toutes traitées à la même enseigne, et toutes terriblement attirées (ou douées à simuler). Passons.

Si le but était de rendre son anti-héros antipathique au plus haut point, alors Ferrara a réussi son pari. Sa chute ne nous procure aucun sentiment, nous nous contenterons de l’observer du même regard froid que celui qu’il pose sur son entourage. Cet homme, sex-addict de son propre aveu, multiplie les tentatives de viol, pratique le mensonge à grande échelle et refuse de se remettre en question quel que soit le contexte. Depardieu fait du Depardieu et on aurait souhaité qu’il passe outre son timbre de voix habituel pour aller encore plus loin au service de son rôle, autrement efficace au vu de la réaction de dégoût qu’il nous inspire.

Mais outre une interprétation plus ou moins convaincante de Gérard Depardieu, force est de constater que Welcome To New York ne procure rien de particulier si ce n’est de se délecter de la version la plus racoleuse et scandaleuse possible d’une affaire qui a secoué le monde entier. Une photographie soignée au profit d’images pour la plupart inintéressantes, une mise en scène paresseuse et des acteurs transparents contribuent à la fadeur de ce dernier Abel Ferrara, que l’on qualifiera surtout de navet opportuniste.
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes La mocheté du héros m'a déconcentrée pendant tout le film et Vus pas au cinéma en 2014

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le 19 mai 2014

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