Les histoires d'amour finissent mal... En général

Steven et Ridley mangent décidément à la même table : celle de l'éclectisme et de l'envie constante de cinéma.


Après Ridley, par deux fois, c'est au tour de Steven renouer avec les salles obscures de 2021. En s'attaquant à un Everest, tant du côté de Broadway que de Hollywood.


Mais après être sorti de la salle, on ne s'étonne même plus : avec Steven, aucune montagne n'est trop haute pour qu'il s'y attaque, avec son éternel enthousiasme de jeune homme et son énergie qui les déplace.


Rien ne manque dans son interprétation de West Side Story : on chante en respectant scrupuleusement les paroles, les passages les plus obligés, on danse avec la même énergie, dans la même Amérique surannée. Autant dire que les fans seront donc conquis d'avance par la beauté de l'histoire d'amour ramassée en une journée et deux nuits, sa flamboyance et la pureté de ses sentiments.


Mais de cette histoire immuable, Steven met en avant aussi tout l'aspect social, comme semble le faire comprendre ce premier plan séquence virtuose qui ouvre le film sur les décombres d'un quartier en train d'échapper aux deux gangs rivaux. Soit une mise en scène du thème de la gentrification qui enfonce, avec une main dans le dos, toutes les démonstrations imbéciles d'une centaine de remakes woke de Candyman que tout le monde aura déjà oubliés.


Tandis que la communauté hispanique est plus mise en avant, et que les questions de racisme, de pauvreté et d'affrontements sur fond d'immigration sont abordées de manière un plus directe, avec un sentiment d'irruption dans le réel qui vient quelque peu tempérer l'insouciance de ces jeunes. Toute comme certaines images sublimes entre ombres et lumière, venant anticiper le drame en gestation.


Mais de telles préoccupations n'éclipsent jamais l'énergie et l'enthousiasme qui émanent de chaque chorégraphie et l'envie de chanter en pleine salle avec les acteurs, tant ce qu'ils convoquent s'avère fort et communicatif, et l'enchantement de chaque plan contagieux. Comme si Steven injectait au classique encore plus de dynamisme et de vivacité avec ses mouvements de caméras amples et majestueux investissant les extérieurs.


De sorte que l'intensité gagne les cœurs, préparant sans que l'on y prenne garde la bascule vers le tragique, habité d'une mécanique encore plus implacable et irréversible. Et même si l'on connaît la fin de l'histoire, Steven réussit malgré tout à nous émouvoir, comme si nous tombions pour la première fois dans le piège.


Là n'est pas la moindre de ses réussites, à l'égal du succès à imposer, soixante ans plus tard, un casting qui n'a pas à rougir de ses aînés, côté portoricain en tête, où la fragilité de Rachel Zegler, convaincante, le dispute au caractère d'Ariana DeBose.


Sous la caméra de Steven, West Side Story revit littéralement, en exaltant la portée de son riche héritage, tout en jouissant de quelques arômes nouveaux et riches, lui conférant un changement de tonalité subtil.


Décidément, Steven ne cessera jamais de nous étonner par la puissance de son cinéma. Et notre histoire d'amour ne pourra jamais mal se terminer.


Behind_Tout s'achève ce soir_the_Mask.

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le 8 déc. 2021

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