A 74 ans, Steven Spielberg est un fringuant jeune homme du cinéma. Parce que sa maîtrise scénique est intacte, mais aussi parce que ses récents faits d’armes témoignent d’une adolescence retrouvée. Si Ready Player One faisait figure d’anthologie de la pop culture qu’il a lui-même contribué à faire grandir, West Side Story est la quintessence du cinéma d’auteur dans lequel a versé l’autre pendant de sa filmographie.


Si le cinéaste a choisi de ne rien retoucher au matériau musical (exit la remasterisation, les morceaux sont intacts !) et de rester fidèle à l’humeur esthétique de la version d’origine, il déploie 60 ans plus tard une puissance créative sans nulle autre pareille à la faveur d’une réal exemplaire et virevoltante : le cadrage est ingénieux, les couleurs sont légion, les costumes sont sublimes, la photographie soignée.


Et surtout, la combinaison de jeux de lumière rétro et du grain conféré par un tournage en pellicule préservent la qualité d’époque voulue par Spielberg pour faire résonner les sixties avec notre époque. La prouesse ultime du cinéaste ? Proposer à son spectateur des plans d’une ingéniosité et d’une beauté folles, sans jamais s’attarder dessus plus de 2 secondes (coucou Dune !). Signe d’une sagesse et d’une humilité admirables.


Seule ombre au tableau : le placement douteux de I Feel Pretty juste après un moment très sombre du film. Mais à ce niveau-là, c’est vraiment de la pinaille face aux somptueux tableaux qui se succèdent sous nos yeux : Jet Song, The Dance at the gym, Gee, Officer Krupke et le très culte America pour ne citer qu’eux. Tous captés par une caméra ultra-mobile, jamais avare d’infiltrations et de travellings aériens, le tout dans un décor new-yorkais d’époque idéalement recomposé.


Of course, West Side Story deuxième du nom ne serait rien sans ceux qui la composent : Ansel Elgort, Rachel Zegler, Mike Faist,… Un beau contingent de jeunes talents (parfois anonymes, comme souvent chez l’ami Spielberg) largement à leur place dans le registre musical. Clin d’œil ultime : avoir proposé le rôle de Valentina à Rita Moreno, l’interprète de tante Anita dans la version originale. Cette dernière est incarnée ici par l’éblouissante Ariana DeBose. Notez bien ce nom, car nous n’avons pas fini d’en entendre parler !


En choisissant de sublimer son matériau sans le détériorer, Spielberg produit tout à la fois un objet politique qu’un bijou de cinéma. Voilà ce qui confère au remake de Spielberg sa toute puissance, et range le gus une bonne fois pour toutes dans la catégorie des légendes du 7e art.

Maître-Kangourou
8

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le 12 janv. 2022

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