Yōjirō Takita a une carrière pour le moins atypique. Après avoir fait du pinku pendant les années 70-80, avec des titres évocateurs comme Viol sans relâche ou Le Pervers du bus de banlieue, il se diversifie à la fin des années 80 et réalise des comédies grand public. Il surprend à nouveau son monde en 2002 en réalisant ce jidai-geki, Mibu Gishiden, dont le titre anglais est When the Last Sword is Drawn, là où une traduction littérale donnerait plutôt : "Histoire des loyaux vassaux de Mibu", qui j'en conviens n'éclaire pas beaucoup le spectateur non spécialiste de cette période trouble de l'histoire japonaise. Mibu c'est un fief féodal rural, au nord de la capitale, Edo, connu pour avoir été loyal aux shoguns Tokugawa jusqu'à la fin de ce régime (1868) et avoir fourni un certain nombre de samouraïs aventuriers qui constitueront le corps du Shinsen-gumi, une milice pro-shogunale active entre 1864 et 1868 dans la période agitée qui a précédé la restauration de l'empereur Meiji.

Mibu Gishiden est l'adaptation d'un roman (2000) de Jirō Asada, un auteur contemporain qu'il conviendrait de rapprocher des grands narrateurs historiques que sont Eiji Yoshikawa ou Yasushi Inoue. Notre héros ici s'appelle Yoshimura (Kiichi Nakai), et appartient justement à la classe des samouraïs ruraux pauvres. Il décide de quitter son domaine de Morioka (nord du Japon) pour rejoindre les rangs du Shinsen-gumi à Kyôto, dans l'espoir d'une solde plus conséquente que celle que lui versait son clan jusque-là.

Le récit narratif va et vient entre deux époques, les années 1860 et une période ultérieure, avec un narrateur âgé qui s'avèrera être un des compagnons de Yoshimura. Et c'est là que le bât blesse. Ce schéma narratif n'est pas d'un grand intérêt et casse le rythme du film, là où justement les événements du bakumatsu constituent une période suffisamment riche et complexe pour ne pas l'alourdir inutilement avec une intrigue parallèle. Le rythme, et c'est le principal problème du film, est d'une lourdeur incroyable, la faute aux incessants flashbacks et à certaines séquences particulièrement longues. Les quarante dernières minutes sont un supplice, à l'image de l'agonie de ce brave Yoshimura qui doit bien durer vingt minutes à l'écran ! Sans que les vingt minutes suivantes n'apportent quoi que ce soit si ce n'est révéler ce que l'on avait très bien compris depuis le début du film. Bref, là où les studios produisaient dans les années 70 des films rythmés et plus que corrects dans un format d'une heure trente max, ici on décroche et on a hâte que ça se termine.

Du côté positif, le film fait partie des rares longs-métrages à dépeindre de l'intérieur ce qu'a été le Shinsen-gumi, avec ses intrigues et ses factions -- la scission de la faction Ito est plutôt bien décrite. Les combats qui parsèment le film sont assez réalistes, avec des samouraïs hésitants et parfois maladroits, quand ils ne sont pas tétanisés par la peur. On y voit surtout la chute de cette organisation devenue hors-la-loi (et anachronique) lorsque l'empereur a été rétabli sur le trône.

Mais dans l'ensemble j'ai beaucoup de mal à comprendre comment ce film -- primé par ailleurs -- peut régulièrement être mentionné dans les listes des meilleurs films de samouraïs... On est très loin d'un top film, même assez loin d'un bon film tout court.

Yushima
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le 11 juin 2023

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