Sous ses airs de comédie grinçante, Willy 1er s’empare de la thématique du deuil et s’interroge sur le sens de l’existence après la perte d’un être cher. L’errance extérieure et intérieure du personnage principal le conduit à recueillir des philosophèmes dans des lieux et des bouches a priori impropres à les transmettre : la conversation magnifique qu’ont Willy et Brice sur le terrain de football, assis sur l’herbe et adossés tous les deux à la voiture, donne accès à une profondeur insoupçonnée qu’incarne à l’écran un choix esthétique fort bien venu. La superposition d’images fait cohabiter les vivants et les disparus, confère à l’existence humaine des allures de zone intermédiaire à laquelle seuls les initiés ont accès – initiés par la douleur du deuil et l’incapacité à se relever de ce dernier.
La détresse profonde des deux personnages s’accentue au contact des autres, tous ambigus, tantôt sympathiques tantôt détestables. Il faut vivre avec ses ombres, accepter sa bizarrerie constitutive, ne pas chercher à cacher sa souffrance. Il faut partager sa souffrance pour qu’elle recouvre son universalité et ainsi devenir une matière à philosopher. Comme Willy, nous passons par un flot d’émotions diverses et contradictoires, révoltés et gênés par un spectacle tragique et burlesque à la fois. Sa volonté de fondre les registres et les tons n’empêche pas le film de dissoner parfois, voire de dysfonctionner lors d’une séquence de violence au domicile de Catherine aussitôt évacuée par une musique électronique pop. Facile. Gratuit.
Il n’empêche que nous tenons à saluer l’originalité et l’audace d’une œuvre pas comme les autres, à l’instar de son protagoniste éponyme, qui multiplie les retournements comme autant de déclinaisons d’un deuil en perpétuel recommencement.