En pleine nuit, dans un froid implacable, une femme court dans la neige, pieds nus. Quelques minutes après, épuisée, elle va se taper un roupillon près d'un arbre, puis meurt. Personne ne lui a dit qu'un footing à -20°, c'est une mauvaise idée ?


Le lendemain, une jeune agent du FBI (Elizabeth Olsen) est chargée de l'enquête, savoir si vraiment la victime était débile à ce point, ou si elle avait un souci (spoiler : elle faisait pas un footing en fait !). Aidée par un chasseur du coin, un mec divorcé accroc aux traces de neige (Jeremy Renner), et du chef de la police locale un brin blasé (Graham Greene), elle va tenter de résoudre cette affaire sordide, qui va la confronter à un monde hostile, sauvage, où les habitants n'ont quasiment plus rien à perdre - et encore moins à gagner -, et qui n'est régit ni par la justice, ni par la chance, mais juste par un désespoir éternel et violent. Car ici, soit on survit, soit on abandonne.


Scénariste des excellents Sicario et Comancheria, Taylor Sheridan se lance dans la réalisation, histoire de clôturer lui-même sa trilogie sur les conséquences encore actuelles de la conquête de l'Ouest, sur les nouvelles frontières américaines. Et si rien d'exceptionnel ne vient enjoliver sa façon de filmer (Denis Villeneuve et David Mackenzie pour les deux films cités plus haut ont clairement une maestria d'un autre niveau), Sheridan parvient malgré tout à faire entrer le spectateur dans cet univers sec et glacial sans le moindre souci.


Son scénario est encore une fois habilement construit, et cela même s'il fait preuve d'un classicisme indiscutable. Car c'est plus dans son exécution qu'on y trouve un savoir-faire total. Des personnages écrits au cordeau, une discrète mais palpable montée de tension, un flash-back posé à un moment absolument parfait, une résolution digne d'un western, un décor considéré comme un personnage à part entière : tout est admirablement maîtrisé.


Dénonçant l'abandon du peuple amérindien dans ces terres sauvages, et plus particulièrement sur le fait que les disparition de ces femmes ne sont même pas répertoriées au sein des agences gouvernementales, Wind River lance un message qui fait froid dans le dos. Développant un point de vue de cette vie sauvage interne (Jeremy Renner et sa souffrance perpétuelle, Gil Birmingham et son deuil déchirant, Graham Greene et son quotidien de laissé pour compte) aussi bien qu'externe avec l'innocence et la fragilité d'Elizabeth Olsen, le film n'est pas avare en émotions fortes, et montre sans détour la dure réalité que vivent tous ces habitants.


Et dans toutes cette avalanche de cruauté, de tristesse, saluons les prestations d'absolument tous les acteurs. Le casting, solide et impeccable, est dominé par un Renner irréprochable, tout en sobriété, une Olsen touchante, perdue mais droite, et un Birmingham poignant, mélancolique, comme une extension logique de son excellent personnage de Comancheria.


Wind River n'en n'oublie pas non plus son côté polar, sa chasse à l'homme énigmatique, où l'enquête passionne tout du long et propose quelques pics de moments intenses bien senties (le dernier est furieux), pour une résolution aussi simpliste que terrifiante. Car quand il ne reste que le silence et la neige, difficile d'y entrevoir un espoir reluisant...


POUR LES FLEMMARDS : Casting solide, émotions sincères, narration puissante, Wind River est très classique mais parfaitement maîtrisé. Il instaure un univers sec et glacial, où l'espoir s'est muté en souffrance éternelle.


-- Critique également disponible sur Le Ciné des Flemmards --

Créée

le 17 sept. 2017

Critique lue 312 fois

Critique lue 312 fois

D'autres avis sur Wind River

Wind River
guyness
8

Sortir de sa réserve

Le film s'approchant de son terme, la petite angoisse. Pourvu que que son dénouement ne trahisse pas ce que ce faux polar était jusque là, avec un suspens inutile ou un final en face-à-face convenu...

le 3 sept. 2017

100 j'aime

8

Wind River
Sergent_Pepper
5

Le talion noir

C’est peu de dire que Taylor Sheridan était attendu pour son premier passage derrière la caméra. Devenu scénariste star suite aux cartons de Sicario et Comancheria, il était évident qu’il finirait...

le 30 août 2017

73 j'aime

11

Wind River
Vincent-Ruozzi
8

Taches rouges sur fond blanc

Certains paysages américains sont devenus des décors incontournables du cinéma. On pourrait citer les étendues désertiques du Texas et du Nouveau-Mexique ou les bayous infranchissables de la...

le 9 déc. 2017

54 j'aime

6

Du même critique

Santa Clarita Diet
Djack-le-Flemmard
6

Les Desperate invitent Hannibal Dexter chez Walking Dead !

A taaaable ! Netflix vous a préparé un petit festin, avec un programme chargé en barbak humaine et autres mets excessifs ! Un peu comme si les Desperate Housewives invitaient Hannibal Lecter et...

le 21 févr. 2017

7 j'aime

X-Men : Apocalypse
Djack-le-Flemmard
6

Quand un na'vi attardé recrute les Power Rangers

3600 ans avant notre ère, un vioque fatigué s’apprête à réaliser un rituel anti-ride pour se faire une seconde jeunesse, aidé par quatre potes à lui. Il y parvient non sans mal, car ils sont attaqués...

le 21 mai 2016

7 j'aime

3

Dragon Ball Super
Djack-le-Flemmard
6

Critique par paquet de 10 épisodes

Dragon Ball Super est la suite directe du manga Dragon Ball, et donc de l’anime Dragon Ball Z, à l’image du tristement célèbre Dragon Ball GT. A ceci près que les différences sont nombreuses, et la...

le 7 mars 2016

7 j'aime

1