Wonder Woman n'est pas un film féministe.

J'ai été voir ce film avec l'idée que ce serait quelque chose de représentatif du féminisme, avec un bon discours, suffisamment développé...Je suis ressorti de la salle avec la sensation d'avoir été escroqué.


Diana est naïve. Ça se comprend, elle a été coupée du monde et doit tout apprendre, mais le film ne lui donne pas un développement suffisamment expliqué et approfondi. La plupart des dénonciations qu'elle profère, comme dans le Parlement britannique où elle s'insurge contre les politiques et les hauts-gradés, n'ont aucune valeur (à l'exception de la critique "un général doit se battre avec ses soldats"). Pourquoi ? Car sa vision du monde est faussée. Elle n'a pas conscience de la réalité du monde et continue de croire dur comme fer aux histoires de son enfance, et ce jusqu'à 80% du film. L'intention est louable et juste, mais elle découle de mensonges. Ce n'est pas de la force mais de la naïveté, une foi reposant sur l'ignorance.


Pour que ce film soit féministe, il aurait fallu que Diana soit consciente des mauvais côtés de l'humanité mais continue de se battre pour elle en justifiant son choix. Or, cette décision n'est réellement prise qu'à la toute fin du film, à partir du moment où elle jette le tank. Le reste ? De la naïveté, à peine de l'apprentissage, un courage qui n'a pour base que légendes, mythes, mensonges. Il n'y a rien d'honorable. 90% du film ne sert que pour de l'exposition, le développement de la psychologie de Diana est quasi-inexistant alors qu'il y avait du potentiel.


Le problème n'est pas tant la naïveté de Diana, mais l'absence de bon développement, de remise en question, de psychologie et d'aspect critique. Excusez mon pessimisme, mais je pense sincèrement que tout a été fait pour éviter aux scénaristes d'avoir à réfléchir sur ces questions. Une chose en particulier m'y fait croire : la présence de trop de personnages secondaires inutiles et à peine attachant, tels que l'indien, le type au fez et le tireur d'élite dépressif. Comme si le film n'était pas assez comique en montrant Diana s'adapter au monde, il faut en plus rajouter des charlots n'apportant que très peu à l'intrigue et qui auraient pu être remplacés par des anonymes. Par exemple, durant l'attaque du village belge, des résistants auraient pu se trouver sur les lieux, ou bien les villageois se seraient soulevés et auraient eux aussi combattu.


Au passage : le tireur dépressif ne parvient pas à résoudre son trauma et ne tire jamais aucune cartouche de tout le film, EXCELLENT DEVELOPPEMENT DE PERSONNAGE !!! Je sais que Diana est l'héroïne, que les femmes n'ont pas constamment besoin des hommes, mais ce n'est pas une raison pour instaurer des backgrounds aux personnages sans les voir franchir leurs traumas, qu'importe qu'ils soient hommes, femmes, agenre ou autres. Quand on introduit un pan de scénario, on le résout. Ici, il aurait fallu que le tireur avoue franchement son incapacité à tirer, l'accepte, et place de façon plus explicite ses espoirs en Diana. Là, le message passe mal.


Tout a été fait pour privilégier la quantité à la qualité, pour ne pas avoir à approfondir les personnages. On dit également merci aux scénaristes pour le Docteur Poison, à contre-courant même de l'indépendance des femmes par rapport aux hommes.


Vous vous souvenez de la scène où l'espion dont j'ai oublié le nom lui propose de trahir le général pour servir une cause plus juste et d'être enfin connue du monde entier ? Elle refuse, préférant "rester fidèle au général" et rester dans son ombre, sans donner aucune explication.


Parlant psychologie, ce film comporte bien trop de contradictions. L'exemple le plus gros est le suivant : on a un grand méchant, identifié, à éliminer, qui manipule des hommes. Selon Diana, s'il y a la guerre, c'est uniquement à cause de ce grand méchant, les hommes n'y sont pour rien, ce n'est pas leur faute, ils sont manipulés. Pourquoi Diana n'éprouve-t-elle aucun remord à les tuer ? A les trancher avec son épée ? N'aurait-il pas été plus logique de les assommer ? Ou au moins d'avoir une scène où Diana se questionne sur le fait de devoir les blesser ? Bah non. Rien.


La scène du no man's land reste cependant excellente. On sait que Diana n'est pas immortelle, qu'une balle en plein coeur peut la tuer, il y a un enjeu fort, Diana est consciente qu'elle peut être blessée, ce qui accentue l'impact de son courage sur le spectateur. De plus, l'aspect "Diana mène les soldats en avant" est très poignant, une sorte de "liberté guidant le peuple" de Delacroix. Une scène à retenir et qui peut fièrement être brandie par les féministes.


Mais au final, vous avez une héroïne forte mais naïve, creuse et infoutue de réfléchir. Il aurait été bien plus intéressant de produire un film avec une Diana ayant suffisamment voyagé, suffisamment appris du monde, et se posant la question de savoir si l'humanité mérite ou non d'être sauvée. Il n'y a que trop peu de féminisme dans ce film. La référence aux sufragettes en est l'une des rares. Et non, voir Diana combattre malgré les moqueries des hommes n'est dans ce contexte pas féministe. Diana a grandie dans une île peuplée par des femmes, sans oppression patriarcale. Combattre pour servir la paix est aussi naturel pour elle que de respirer, et encore une fois, c'est son ignorance du monde qui lui permet d'agir aussi librement. Il n'y a rien d'honorable.


Bref, si vous voulez de l'action, allez voir ce film. Si vous voulez du féminisme et de la réflexion, passez votre chemin.

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le 29 juin 2017

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