Bien moins connu que les films phares de son réalisateur John Boorman (Excalibur, Delivrance) Zardoz est une délicieuse claque. Une expérience cinématographique unique, perpétuellement surprenante, une plongée dans un univers à nul autre pareil. Un chef-d’œuvre du cinéma d'anticipation, toujours aussi fascinant pour le spectateur d'aujourd'hui.


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Le pitch (tel qu'exposé sur la jaquette du DVD) peut légitiment faire penser à un scénario plutôt convenu, centré sur la quête d'un héros sauveur d'un peuple tyrannisé par un "dieu" omnipotent : Zardoz.


Première surprise : la scène s'ouvre par l'apparition de Zardoz lui-même, sous la forme d'un **banal humain jovial s'adressant directement au spectateur non sans cynisme. Passée cette introduction, Zardoz se fait rapidement occire par Zed (interprété par Sean Connery) au bout de quelques minutes.
Le film désarçonne ainsi dés sa scène d'exposition, nous laissant dans l'expectative quant à la suite de sa trame. L'étonnement sera des maître-mots de celle-ci : Zardoz est une plongée dans un univers d'anticipation bien singulier, bien loin du post-apo crade Mad-Maxien ou des mégalopoles tentaculaires à la Blade Runner.


Zed se faufile ainsi rapidement au cœur d'une petite oasis aux airs idylliques, que l'on découvre en même temps que lui. Les anachronismes se succèdent, à l'image de ces vieilles maisonnées recouvertes d'un bleu éclatant, de cette nature sauvage qui côtoie d’intrigants édifices cristallins et autres bulles translucides.
Quels êtres peuplent cet îlot impénétrable ? Quels évènements ont pu faire du monde ce qu'il est devenu, au vingt-troisième siècle ? Quel est le passé de Zed ? Une multitude de questions dont l’œuvre de Boorman nous délivrera lentement ses réponses, de manière délicieusement étonnante.


L'aspect improbable de l'esthétique de Zardoz est l'objet de nombreuses moqueries qui expliquent sans doute sa sacrilège classification par endroits dans la catégorie nanar (Sean Connery en slip rouge ! Grosse tête en pierre qui vole, masques grotesques et autres espèces de foulards colorés sur le crane, pain vert...). Elle constitue, a bien y regarder, un de ses atouts, une fois qu'on accepte de pleinement plonger dans cet univers.
Tous ces éléments forment un ensemble cohérent, très empreint de psychédélisme et de la pensée hippie des 70's (le rôle du sexe est d'ailleurs un thème important du film).


Si cet univers est effectivement complètement fou, c'est parce que Zardoz fait de la folie et de la décadence aveugle le cœur de son intrigue.


Car l'humanité est folle dans Zardoz. Devenue immortelle, l'utopie apparente qu'elle a créé est réalité un cuisant échec. On y découvre donc, en même temps que Zed, des êtres efféminés aux pouvoirs étranges dont l'harmonie de la société est en réalité un colosse aux pieds d'argiles, certains d'entre-eux recherchant une mort qui est devenue interdite. La sexualité y est bannie, et tous semblent progressivement touchés par une "maladie" incurable : la lassitude de l'éternité qui transforme les hommes en pantins apathiques.


La très fragile cohésion de la société de cet ilot isolé et aveugle de sa propre décadence sera logiquement troublé par l'arrivée du sauvage, viril et sexué Zed. Difficile d'en dire plus, sous peine de gâcher l'indispensable étonnement.


Passionnant de bout en bout, Zardoz se clôt sur un déferlement de folie pure, réponse imagée à la tentation de l'immortalité. L'intrigue, tel un chaos organisé, se tient pourtant.


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Œuvre d'anticipation géniale, à l'univers et à l'esthétisme d'une originalité rare, délicieusement déroutante, servie par des acteurs talentueux (Sean Connery est parfait dans son incarnation de la virilité, Charlotte Rampling éblouissante, John Alderton étonnant), une bande son soignée et une très belle photographie, Zardoz à quoi de fasciner, et on lui pardonne sans soucis ses excès de kitsch.


Une pépite.

Ramlladu
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le 17 mars 2011

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