Final Fantasy X
7.8
Final Fantasy X

Jeu de SquareSoft et Sony Interactive Entertainment (2001PlayStation 2)

La fin d'un monde pour en construire un autre, la fin d'un rêve pour en faire un nouveau.

Ah, les années 2000... Période charnière du jeu vidéo. J'ignore si c'est la nostalgie qui me fait dire que ces dix années, qui s'étendent de 2000 à 2010, recensent les plus grands chef-d’œuvre vidéoludique (certainement la nostalgie oui). L'année de la PS2, de la XboX et de la Gamecube voient en effet la sortie de licences phares, qui sont à tel point devenues cultes que les développeurs continuent encore aujourd'hui à exploiter le savoureux filon qu'offrent les multiples suites et reboot plus ou moins assumés (c'est toi que je regarde Ratchet...)
Ayant grandi dans cette période, j'ai été marqué, comme les gens de mon âge, de près ou de loin par cette myriade de bons jeux.
Cette période est tout aussi marquée par l'erruption du numérique et des images de synthèses... bref, le XXIème siècle est arrivé et l'on sent qu'à partir de là, la limite entre rêve et réalité ne cessera jamais de diminuer jusqu'à s'évanouir entièrement.
Cette période est enfin marquée par la domination totale du Japon sur les jeux vidéos avec les boîtes Capcom, Konami, Squaresoft, Sega, Nintendo qui affirment leur suprématie sur le marché. Si quelques boîtes occidentales arrivent tant bien que mal à se tailler une réputation en comparaison, forcé de constater qu'elles font pâles figures face aux veaux Mario, Zelda, Pokémon ou Castlevania.
Mais lorsque l'on est le meilleur dans un domaine, il est important de garder en tête qu'à tout moment la balance peut basculer, l'histoire nous l'a suffisamment démontré. On ne tarde pas à se faire détrôner, surtout si l'on commence à se penser irremplaçable. Et c'est ainsi qu'à l'horizon 2010, les occidentaux se sont mis à rafler l'hégémonie des RPG avec des licences qui sont devenues toutes aussi cultes : Skyrim, the Witcher, Fallout 3, je m'en souviens comme si c'était hier...


...Mais pourquoi je suis en train de raconter ma vie alors que cette critique a pour objet FFX ? Eh bien nous remarquons tous que la nostalgie est un pouvoir très puissant, qui nous fait vouer une adoration envers le passé qui, de toute façon, sera toujours mieux que ce que nous réserve l'avenir. Cette complaisance à s'enfermer dans une petite bulle de souvenirs est à la fois un bienfait, car nous permettant de savoir d'où on vient, quelles sont nos racines et ce qui nous a fait grandir, et un problème car en refusant de regarder vers le futur, on se conforte dans l'idée que rien ne pourra égaler ce qu'on a déjà vécu, et que toute nouvelle tentative à vouloir surpasser nos bijoux rétros est vouée à l'échec. Là où le bât blesse, c'est que tout le temps passé à tourner à la tête pour regarder derrière soi sont des années perdues à ne pas vivre dans le présent et à voir au loin.


Final fantasy X est, à bien des égards, une allégorie de ce constat. Cette idée de passé et de futur, d'ancienneté et de modernité, se trouve filée tout au long du récit, enrobée dans une splendide poésie que je tâcherai de démêler. Ce jeu se situe à la croisée des chemins, ayant lui aussi participé à la transition qui nous a emmenés du XXème au XXIème siècle.
Non content d'améliorer toutes les prouesses qui se faisaient en matière d'images de synthèses, il révolutionne la façon de concevoir le jeu vidéo et le RPG. Amélioration de la motion capture, plan entièrement numérique, contenant même le premier baiser numérique de l'histoire avec des acteurs photoréalistes.


Cette critique s'articulera autours de cinq points qui font selon moi toute la perfection de ce jeu: le scénario, la mise en scène, le gameplay, la durée de vie et la musique.
Je reviendrai également à la fin de cette critique sur l'épisode HD sorti en 2015 pour apporter mon humble avis.
Je tâcherai d'être le plus exhaustif possible pour parler de ce jeu qui, vous l'avez compris, est un des plus gros chef-d'oeuvre du jeu vidéo.


Et parce qu'il faut bien commencer quelque part, voici une petite page d'histoire.


Commençons.


Le Japon, pays a l'histoire au combien tourmentée. C'est en grande partie a cause des missionnaires Portugais et Espagnols partis évangéliser les nippons que le Japon s'est entièrement renfermé sur lui-même. C'est la fameuse ère Edo, période d'hostilité extrême envers le reste du monde. C'est loin d'être une hyperbole car à cette époque, sortir du Japon sans autorisation était puni de mort immédiate. Les chrétiens (kristans) étaient torturés et mis à mort sauvagement (pour ceux qui aiment le cinéma de Scorsese, allez voir le film Silence) et toute la culture venant de l'extérieure était bannie. C'est au passage le portrait qu'a également peint l'animé samurai champloo, en particulier cet épisode où un hollandais se rend au Japon pour contempler une geisha.
Puis la modernité frappe aux portes du pays. Le Shogun qui est alors au pouvoir tente de résister mais rien a faire.
En 1854, les canons américains forcent le Japon à mettre un terme à son isolement (le sakoku) et dès 1867, le jeune empereur Meiji entend tirer parti de cette modernité occidentale.
Commence ainsi l'ère Meiji qui va transfigurer le Japon.
Cette peur du changement s'empare du pays à tout allure, en quelques années seulement le costume cravate, les fourchettes et les couteaux, les plats occidentaux, le calendrier pénètrent de toute part sur les îles japonaises.
Alors en 1877, le baroud d'honneur est lancé. Un groupe d'ancien samouraïs menés par Saïgo Takamori défie le gouvernement afin de restaurer l'ordre ancien et de restituer son rôle à la classe des samouraïs (oui, ce groupe de samouraï auquel le film avec Tom Cruise fait allusion)... C'est un échec.


Rien n'y fait et bien vite la terrible vérité doit être acceptée par tout le peuple japonais : la modernité a triomphé des traditions, et le monde ancien doit s'adapter ou périr.


Mais si aujourd'hui le Japon est un pays qui s'est définitivement soumis au mode de vie occidental, cette période de transition n'a cessé de servir de source d'inspirations et de réflexions au peuple nippon : faut-il moderniser et délaisser sa morale ou bien continuer a honorer les traditions quitte à régresser ? Le problème d'une telle équation insoluble est que pencher vers l'un des choix nous éloigne définitivement de l'autre car il est impossible de concilier modernité et tradition, aller vers le progrès tout en préservant les anciennes valeurs.
De fait, beaucoup d'auteurs ont tiré de ce puits philosophique une kyrielle de questionnement destinés à faire réfléchir leur auditoire.
Un auteur en particulier, Hayao Miyazaki, en fera son thème de prédilection. Dans tous ses films, ses personnages sont tiraillés par ce choix terrible: faut-il laisser mourir le passé ? A-t-on le droit d'oublier nos racines ? Des questions qui raisonnent fort, non seulement pour le Japon mais aussi pour toutes les nations et pays du monde entier.


Si Miyazaki est devenu un monument du genre, ayant reçu de multiples récompenses et distinctions dans le monde, un autre auteur a lui aussi été très influencé par ces questions. Il est en revanche demeuré invisible, pour la bonne et simple raison qu'il n'est pas réalisateur mais scénariste chez Squaresoft, une boîte de jeu vidéo importante au début des années 2000 ; Kazushige Nojima.
Cet homme, au talent indiscutable, occupait autrefois la place de réalisateur, jusqu'à ce que Square prenne conscience de la qualité incontestable des histoires qu'il écrivait, Nojima étant beaucoup plus doué pour écrire un scénario que pour le mettre en scène.


C'est ainsi que Squaresoft s'engage à la nommer scénariste pour le prochain jeu qu'ils ont mis en chantier et qui sortira en 1997 en voyant le scénario de qualité qu'il a spécialement rédigé pour l'occasion. Vous savez déjà duquel il retourne.
Le succès démentiel de Final fantasy VII a été tel que je ne sais même pas pourquoi j'ai besoin d'évoquer son nom pour que vous compreniez qu'il s'agissait bien de ce jeu auquel je faisais allusion. Il a porté toute l'équipe qui lui a donné vie à des postes respectables, leurs talents et leur importance étant à présent reconnu par toute l'entreprise Square.
Dans ce récit cyberpunk, Nojima, en collaboration avec le futur producteur de la saga, Yoshinori Kitase, narre le terrible affrontement entre la Shinra, entreprise ultra-capitaliste, et le groupe terroriste Avalanche, sorte de greenpeace utilisant des méthodes peu orthodoxes pour protéger l'âme de la planète, la rivière de la vie. Cela permet à Nojima d'exprimer immédiatement ses thèmes: vie, mort, évolution, régression, modernité, ancienneté, rêve, esprit. Tous ces composés lui servent à nous présenter son message sous forme interrogative: L'homme a-t-il le droit d'exploiter son environnement quitte a tuer la planète ? Par extension, la planète a-t-elle le droit de se défendre et d'empêcher l'homme d'évoluer ?
A la manière de Mononoké (amusant puisque étant sortie la même année) Nojima exprime un message qui apparaît aux yeux de tous comme écologiste. Je dois l'avouer, ce genre de message, clairement orienter à la fin quand la gentille rivière de la vie repousse le méchant Séphiroth, me laisse de marbre, une des raisons qui ne me fait pas apprécier ce jeu...
Cependant, rappelons qu'à cette époque, la santé de la planète était vécue dans une relative indifférence (Pierre Rabhi était le seul a en parler), alors qu'aujourd'hui, elle est devenue le terreau d'une foison d'articles, tant est si bien que les médias doivent passer la moitié de leur temps à nous expliquer que les bouteilles en plastique contenant du glucose c'est dans la poubelle bleue indigo à pois violets qu'elle doit être jetée. Je pense très honnêtement que c'est le contexte dans lequel je vis aujourd'hui qui me déroute du jeu et donc du message écolo parce que, malgré tout ce que je peux dire, ça fait bientôt cinq ans que s'entassent sous ma commode les kilos de piles que je ne dois pas jeter à la poubelle.


Bref !


Fort de ce succès, toute l'équipe est contactée pour travailler sur tous les opus qui sortirons ensuite. Nojima fait assurément parti du groupe et c'est ainsi qu'il se lance sur la rédaction de nouveaux scénarios originaux, pour FFVIII et FFX (oui FFIX était produit en même temps que le VIII c'est la raison pour laquelle il n'a pas participé au projet... le bon vieux temps où un jeu FF sortait tous les ans...)
Il est facile de retrouver sa patte dans FFVIII et l'on sent déjà qu'il souhaite se tourner vers un registre plus mature.


Et enfin arrive Final Fantasy X, le premier opus à paraître sur la console PlayStation 2, le premier à être doublé, le premier à passer à la 3D intégrale, permettant des cinématiques aux angles de caméra dynamiques et des déplacements dans des décors énormes.


FFX reste pour moi son scénario le plus abouti et le plus complet. Nous retrouvons ainsi tous ses thèmes mais ceux-ci se manifestent de façon beaucoup plus subtile.
Permettez-moi de vous exposer le back-ground de cette nouvelle histoire afin que nous puissions voir ensemble les multiples sens de lecture dont on se fera un plaisir de décortiquer.
Mille ans avant les évènements de notre intrigue, un terrible affrontement éclate entre Zanarkand, ville d'invocateur et de magie, et Bevelle, ville à la pointe de la modernité. Bevelle envoie ses machines les plus puissantes pour anéantir Zanarkand, laquelle ne met pas longtemps à crouler sous la déferlante de feu qui s'abat sur elle. Les invocateurs sont envoyés au front et se font massacrer par les machines de guerre de leur ennemi, malgré leur puissante magie. Alors, acculé au bord du gouffre, Yu Yevon, souverain de Zanarkand et puissant invocateur lui-même, décide d’échafauder un plan avec sa fille Yunalesca, et le mari de cette dernière, Zaon. Yu-Yevon décide de sacrifier l'intégralité des vies de sa cité pour obtenir l'immortalité, envoyant tous ses invocateurs au combat qui ignorent le sort tragique qui les attend. Alors que la guerre semble définitivement perdue pour les invocateurs, Yu Yevon demande à Yunalesca de fuir Zanarkand avec Zaon. Coup de théâtre, les invocateurs n'étaient en réalité jamais mort, ces derniers s'étaient changés en Priants, amassés au sommet du Mont Gagazet. Yu-Yevon en appelle alors à leur puissance pour se forger la plus énorme et la plus résistante des chimères : Sin. Yu Yevon changé en Sin détruit totalement sa ville mais alors qu'une Zanarkand disparait, une autre nait. Une Zanarkand imaginaire et impalpable, mais éternelle, sous la carapace de Sin : le rêve des Priants. Tous ensemble, ils rêvent de la cité dans laquelle ils ont vécu, et cette fois-ci son histoire durerait pour toujours.


Nous l'avons compris, Nojima vient de nous mettre en garde: vous n'avez jamais vu une histoire semblable.


Là où la plupart des œuvres traitant le sujet se seraient réduit à représenter l'ancien monde par la nature, Nojima fait un choix différent. Ici point de rivière de la vie, point de forêt mourante ou encore de gentils sylvains bleus de trois mètres de haut décochant leurs gentilles flèches d'indigènes contre les méchants américains.


Non.


Les machines contre la magie, la modernité contre les préceptes, les armes à feu contre la religion, voilà les entités qui incarneront mes symboles nous dit-il.
Dans notre histoire, l'ancien monde se reflète en la personne de Yu-Yevon et, par extension, de Sin lui servant de bouclier. Ils représentent tout le poids du passé, la culpabilité des hommes qui ont laissé tomber les préceptes et les traditions pour se tourner vers les machines. Le mépris si propre de Yu-Yevon transpire de chaque millimètres de sa carapace. Il veut faire comprendre à tous les hommes qu'ils ont trahi leur foi en se détournant de la magie et de la spiritualité, et cherche à leur faire payer en insufflant la terreur, faisant ainsi la démonstration que la magie est plus puissante que ne pourront jamais l'être les machines. L’oisiveté des anciens qui se sont reposés sur leurs lauriers en laissant les machines travailler à leur place est une sorte de levier que Yu-Yevon va exploiter pour faire culpabiliser le peuple. Bref, ce que Y-Y essaie de nous faire tout simplement comprendre, c'est que c'était mieux avant, à l'époque de la magie et des traditions.
Nous l'avons compris sans qu'il ait besoin d'insister davantage sur la métaphore, Nojima est tout simplement en train de réunir l'univers de FFX et du Japon ancien.


Le nouveau monde quant à lui est incarné par les al-bheld et les machines, ceux qui refusent de se plier à la hiérarchie de Yevon, sa religion et ses commandements, et qui sont vus d'un très mauvais œil par le reste les fidèles. Ils ne sont pas à proprement parler un peuple mais vivent en ermite, loin de la civilisation, reclus dans le désert de Bikanel, fuyant la persécution dont ils sont victimes. La seule particularité qui les caractérise est la spirale noire embobinée sur l'iris de leurs yeux.


Nojima représente ainsi parfaitement et symboliquement un choc entre deux idées, deux mouvements forts: ceux qui souhaitent se détacher du passé et avancer vers l'avenir, et ceux qui souhaitent au contraire préserver les valeurs anciennes. A partir de là, nous pourrions parfaitement prendre parti pour l'un ou l'autre des camps mais dans ce cas l'histoire se résumerait à un autre manichéisme bien sale (ce qui m'avait justement déplu dans FFVII).


Nojima a ici vraiment voulu bien faire les choses.


C'est là où tout son génie se révèle à nous, car plus tard dans l'histoire nous apprenons que après la destruction de Zanarkand, il y a mille ans, Yunalesca a profité de la situation pour faire peser sur les incrédules une crainte plus terrible encore : celle que Sin ravage à son tour Bevelle et toutes les autres villes de Spira. Elle leur explique qu'en vénérant Sin (c'est-à-dire son père, Yu Yevon) et en cessant d'utiliser des machines, ils peuvent espérer éviter ce désastre. Et pour faire durer éternellement la carapace de son père, elle lance la tradition de l'Ultime Chimère, la seule chose capable de percer la carapace de Sin. Le principe est simple: les hommes doivent renoncer à tuer Sin. Celui-ci s'en ira tout seul, lorsque les hommes auront lavé leurs péchés. Consciente qu'il faut un minimum insuffler un brin d'espoir dans le cœur des fidèles, elle révèle qu'en utilisant le pouvoir des priants, les hommes pourront chasser Sin temporairement, en le faisant succomber par l'ultime chimère, une entité ne pouvant être acquise qu'après un long pèlerinage, et au prix d'un terrible tribu: le sacrifice d'un être cher. Mais là où le plan de Yunalesca est diabolique, et qu'elle se garde de révéler, c'est que Yu-Yevon se servira du corps de cette ultime chimère pour renaître de plus belle, en absorbant le corps de cette dernière et, de la sorte, se forger une nouvelle carapace. Yunalesca se sacrifie pour la première Félicité de l'histoire de Spira, en utilisant son mari Zaon pour Ultime Chimère. Sin revient au bout de quelques temps et à nouveau sème le chaos. C'est ainsi que naquit la religion Yevon.


Zanarkand avait réussi à gagner la guerre contre Bevelle : la magie avait triomphé sur les machines, et l'ère de la technologie venait de s'achever. Pendant le millénaire qui suivit, Sin détruisit toutes les villes machine de Spira, plongeant le monde dans l'obscurantisme.


Ainsi, Yu-Yevon peut enfermer les habitants de Spira dans une nostalgie éternelle, un rêve qui ne finira jamais. Un monde où l'on donne aux gens ce qu'ils veulent: vivre éternellement dans le passé. Sin et Yevon deviennent une forme de manipulation et conduisent les hommes à suivre un chemin qu'ils pensent vertueux alors qu'en réalité c'est ce chemin qui les conduit à tout recommencer.
Le plus terrible dans tout ça, c'est que le courroux qui ravage les hommes de Spira s'exploite lui-même. En donnant aux gens ce qu'ils veulent, rester dans le passé sans jamais évoluer, sans jamais grandir ni aller vers le futur, les invocateurs se tuent à préserver Sin sans même s'en rendre compte, puisque tout le but de leur pèlerinage est de devenir assez fort pour pouvoir invoquer l'ultime chimère qui servira de corps à Sin.


Toute cette religion est bâtie sur un mensonge.
Outre le fait que Bevelle utilise elle-même des machines interdites, parfaitement consciente que la mise-en-garde de Sin n'est que du flan, les invocateurs, et par extension tous les habitants de Spira, ne font qu'encourager l'archaïque et l'ancien. De sorte, à la manière d'un Etienne de la Boétie et sa théorie sur la servitude volontaire, Nojima nous démontre à quel point les hommes sont prêts à mourir pour un système qui les exploite tant que ça leur permet de rester à des temps antédiluviens. Parce qu'au fond d'eux ils ne veulent pas changer, ils ne veulent pas que le passé qu'incarne Sin disparaisse.


Vous me trouverez peut-être un peu trop prompt à faire des procès d'intention car, me rétorquerez-vous, les invocateurs ne sont pas au courant que l'ultime chimère servira de corps a Sin.
Certes, les invocateurs pensent réellement que leur pèlerinage conduira à la destruction de Sin... mais au début de leur aventure seulement. Car c'est oublier qu'ils sont tous mis au courant une fois arrivés a Zanarkand, Yunalesca leur expliquant toute la machination.
C'est donc un choix véritable qui s'offre a eux, tuer sin avec l'ultime chimère, en sachant pertinemment qu'il reviendra, ou tenter autre chose... et évidemment c'est la première option pour laquelle ils optent.


Et c'est là où le message de Nojima devient magnifique: vivre dans le passé devient exténuant. Les priants du mont Gagazet prisonniers du même rêve éternel depuis mille ans sont épuisés et lorsque Tidus les rencontre (en la personne de ce petit garçon encapuchonné) ils lui révèlent qu'ils aimeraient partir. Tidus apprend alors qu'ils sont à l'origine de l'enlèvement de son père qu'il croyait emporté par la mer. C'est également eux qui ont envoyé Tidus sur Spira dans l'espoir qu'il change les choses. Les priants demandent à Tidus de mettre fin au passé, d'emmener l'humanité vers le futur, d'arrêter de vouer une telle admiration à ce qui existait avant.


Alors nous devons tuer le passé ?


Oui...


...Et non.


Yuna fait un discours à la toute fin du jeu qui exprime à la fois ses encouragements pour l'avenir mais qui exprime également le message de final fantasy X : https://youtu.be/NiAAF5nVATA?t=296


Enfin nous regardons l'avenir, enfin nous ne regardons plus derrière nous, enfin nous reprenons le contrôle de notre destin. Oui. Oui il faut avancer. Oui il faut évoluer mais ne jamais oublier. Ne jamais oublier les morts, ne jamais oublier qui s'est battu, ne jamais oublier nos amis et nos amours. Nous devons faire de nouveaux rêves (et pas recommencer à rêver comme disent les sous-titres de la VF...)
Arrêter de voir le passé comme un monde plus beau où tout allait bien mais comme il est : un souvenir. Bâtir un nouveau monde, lever la tête et avancer.


Nous pouvons faire aussi ce parallèle avec l'au-delà, et Rikku le dit tout aussi justement: https://youtu.be/mLb9WwTPLA4?t=18
En gros, pour résumer les mots de la demoiselle, le monde des morts, qu'ils appellent farplane, est une sorte de passerelle assez étrange capable de matérialiser sous forme de spectre les souvenirs que nous gardons des êtres que nous aimions et qui sont décédés. Lorsque Tidus invite Rikku à le suivre, celle-ci lui répond tout simplement que ses souvenirs sont en elles, au fond de son corps, et que les personnes qu'elle verra à l'intérieur de cette étrange endroit ne seront jamais plus que des illusions. Elle ajoute que les souvenirs sont agréables mais c'est tout ce qu'ils sont, des souvenirs.
A noter que le personnage qui prononce ces mots n'a pas été choisi au hasard, on y reviendra quand on abordera les al-bhelds, gardons ça dans un coin de la tête.


Nojima prend ainsi le total contrepied de toutes les œuvres traitant du même sujet. Au lieu de brosser les mélancolique et les déçus du présent dans le sens du poil, en idolâtrant ce qui a préexisté, il propose un autre message: Grandissons.
Nous ne pourrons jamais retourner dans le passé, nous ne pourrons jamais faire revenir nos défunts alors plutôt que de se lamenter et observer des protocoles archaïques, essayons de jeter nos yeux vers le lendemain. Les traditions sont importantes certes mais en ne voyant qu'elles, nous nous privons de tout ce que nous offre le futur. Elles ne font pas, contrairement a ce que dit Yunalesca, partis de la vie.
Nous ne remettons jamais les œuvres anciennes en cause parce que trop sacrées, et par extension, nous ne remettons rien en cause. Ces gens vous répondront que les choses sont ainsi parce qu'elles doivent l'être et si tu essaies de toucher ou remettre en cause cette doxa, tu ne feras que te heurter à des murs sourds.


Et vous voulez que je vous mind fuck un peu pour la fin ? Revoyez la scène où Tidus fait ses adieux à Yuna et maintenant amusez-vous: remplacez Tidus par un souvenir de votre enfance, n'importe lequel, celui que vous voulez. Remplacez-le par ce souvenir et écoutez ce que ce souvenir dit à Yuna.
Un souvenir qui disparait, qui s'échappe, que Yuna essaie de retenir mais qui n'y arrive pas. Un souvenir qu'elle remercie (car oui en Vo elle dit aligatô qui veut dire merci et non daisuki qui veut dire je t'aime https://youtu.be/lwtBFx6MoMw?t=171 ) pour finalement disparaître et retourner dans le monde des rêves... ce rêve, ce souvenir, qui enlace une dernière fois l'enfant que nous sommes, nous traverse une dernière fois pour s'en aller.
https://youtu.be/NiAAF5nVATA?t=86


Je ne sais pas si on peut rester insensible devant ce déchaînement d'émotions et de beauté.


Je n'y crois pas.


Un concentré de sagesse, de finesse et d'incitation à la réflexion, emmitouflé dans une poésie douce et belle qui nous entraînent doucement au bout du rêve.


Mais nous sommes loin d'avoir fini alors continuons.


Continuons dans les symboliques du scénario avec la religion. J'ignore s'il s'agit d'une réelle critique, ou si c'est simplement que je vois des attaques déguisées un peu partout, mais le culte dans lequel une grande figure d'autorité au sommet une hiérarchie ecclésiastique promettant le pardon aux pauvres pécheurs, et en contredisant ses propres préceptes me fait, de près ou loin, pensé à l'église catholique. Micah est le pape, Yevon une sorte de Dieu et les temples des églises.
Je trouve ça un tantinet dommage car quitte à interpréter une histoire japonaise autant allé jusqu'au bout et prendre le bouddhisme ou le taoïsme comme modèle, m'enfin.


Alors que font-ils ces Yevonith ? Eh bien si Yu-Yevon est l'homme sous la carapace, Yevon est également le nom donné à la religion de Spira. Au final, ce qui me fait douter de la critique déguisée envers le christianisme, c'est que les Yevonith ne prient pas de Dieux mais plutôt les Priants (les âmes enfermées dans la pierre d'hommes et de femmes qui se sont sacrifiés pour offrir aux Invokeurs leur force. Ce sont les Priants qui permettent aux Invokeurs de faire appel aux Chimères).
Les préceptes sont simples: ne plus utiliser les machines. Parce que quel meilleur moyen d'entraver l'évolution des hommes que de leur faire croire que les machines apporteront leur destruction ? Sin s'en ira et la grande Félicité arrivera si vous vous comportez comme de gentils écolos bien sage. Machine ? Pas bien ! Nucléaire ? Pas bien ! Evolution ? Pas bien ! Sérieux, ça ne vous rappelle rien ?


Je vais en profiter pour faire rapide un détour sur les quatre grands peuples de Spira, bien qu'il n'y en ait vraiment qu'un qui appellera notre curiosité.
Les Guados sont, à la manière d'elfes ou de sylvains, des êtres proches de la nature, qui ont construit leur ville dans une immense souche d'arbre, et qui ont une affinité toute particulière avec les férolucioles.
Ils ont un grand sens du tribalisme, l'évènement le plus démonstratif étant celui où ils refusent de laisser tomber leur maître et leader, Seymour Guado, tout à fait conscient de la folie qui s'est emparée de lui.
Au passage, le seul accès au farplane (l'au-delà) se trouve dans leur ville.


Viennent ensuite les Ronsos, peuple vivant dans la montagne qui est, devinez quoi, sacrée, et qui bloquent l'accès à tout infidèle qui aurait pour projet de fouler de ses pieds impurs la terre de leurs ancêtres.


Et enfin les al-bhelds ! Ceux qui, comme dit ultérieurement, sont ceux qui souhaitent se détacher du passé pour aller de l'avant.


Là où l'on voit que les al-bheld sont prêt à laisser le passé derrière eux se retrouve dans cette scène: https://youtu.be/6fp_nT6-Pg0?t=262
Bon alors, outre le fait que cette scène est une putain de tuerie en terme de SFX et de CGI pour l'époque, elle montre surtout quelque chose de façon visuelle. Qu'est-ce que les al-bhelds détruisent ? Leur maison, et que représente la maison ? L'enfance, les souvenirs, etc...
_L'avantage avec les machines c'est qu'on peut les reconstruire, nous dit Cid
D'ailleurs gardez cette scène dans un coin de la tête, on y reviendra plus tard.


Et puis il y a le fameux sending mortuaire, une cérémonie nécessaire pour chasser les âmes des défunts... qui ne veulent pas mourir ! Et pourquoi ne veulent-elles pas mourir ? Pour rester dans la métaphore du jeu, je dirais qu'ils refusent de mourir pour ne pas affronter le futur et rester dans le passé mais bon ok j'extrapole un peu. La raison donnée par l'histoire est que les âmes des morts jalousent celles des vivants, ce que nous explique Lulu.
https://youtu.be/-0JXmYyILyU?t=30
"Ils refusent de faire face à leur destinée" nous dis Lulu, tiens donc.
Les morts trouvent, à juste titre, profondément injuste qu'eux aient été tués et pas les autres.
Cette cérémonie est l'occasion de nous offrir au passage une splendide scène de danse mais on y reviendra dans la partie mise en scène.
Si les invocateurs ne renvoient pas très vite ces âmes dans l'au-delà, leur volonté se manifeste sous forme de férolucioles jusqu'à se matérialiser en une créature s'attaquant aux vivants.


Et puis il y a la prière et l'hymne, tous deux respectivement issus du blitzball et de la grande guerre. En effet, au cas où ça nous aurait échappé, la prière était le signe que les supporters de Zanarkand exécutaient pour encourager les vedettes de blitz (on le voit au début du jeu) et le chant était quant à lui l'hymne que Zanarkand scandait pour affronter Bevelle.
Concernant le blitzball, je trouve très intelligent de la part de Nojima d'avoir donné à des éléments de pop-culture une si grande importance. Qui aujourd'hui ne voue pas un culte, limite fanatique, au Football ? Ou encore au Merd... Marvel cinématique universe, à la guerre des étoiles ou au seigneur des anneaux ? Que pourrait donner la génération mille ans plus tard vénérant star wars comme le messie ? Je pense que ça donnerait une chose similaire; le générique de John William serait ténorisé a capela, les phrases prononcées par Yoda seraient reprises intégralement en tant que commandement de vie prophétique, et Dark Vador serait le synonyme de Satan.
Maintenant j'aimerais que l'on se penche sur les paroles ce chant qui n'est rien d'autre qu'un empattage soutenant Yu-Yevon : Ieyui Nobomeno Renmiri Yojuyogo Hasatekanae Kutamae.
Si elles apparaissent comme une nouvelle langue, on peut néanmoins retrouver le texte original en japonais en procédant à un jeu de découpage et recollage (toujours imaginé par Nojima), donnant : Inore yo Ebon-ju / yumemi yo inori go / hatenaku / sakae tamae, ce qui se traduit par : Prie, Yu Yevon / rêve, priant / que notre prospérité soit éternelle.


Mais le talent de Nojima ne se résume pas qu'à nous donner de sublimes messages, auréolé par un contexte fort et une histoire poignante. Nojima sait également traiter ses personnages avec brio.
Commençons par le héros de notre histoire, celui qui déchaîne tant de haine et de passions: Tidus, ou Tida pour les vrais. Il est le "héros" de cette histoire (on y revient !) et les plus attentifs n'auront pas manqué de souligner la ressemblance du squelette narratif de son histoire avec celle d'un certain Sora dans KHI. Un garçon, vivant paisiblement sur un monde à part dont la vie se retrouve bouleversée après qu'une sphère géante de ténèbres l'ait absorbé, lui et son monde, et l'ait emmené dans un univers qu'il ne connait pas, où il va devoir apprendre à grandir, à sortir de ses rêves pour devenir un adulte.


Nous nous sommes bien égosillés, moi le premier, devant ce fameux Tidus laugh sans jamais essayé de comprendre pourquoi et si c'était voulu.
Histoire de mettre les détracteurs de final fantasy X de mon côté, je peux vous accorder qu'entendre Tidus se plaindre à longueur de temps peut s'avérer lassant (même si je persévère en disant que ces gens là n'ont aucune patience parce que franchement il ne se plaint pas tant que ça...) MAIS ! Permettez-moi d'émettre un bémol.
Pour bien comprendre le personnage de Tidus, il est important de le comparer avec le personnage de Yuna puisque c'est ainsi que Nojima réfléchit ses personnages, en les articulant les uns avec les autres.
Tidus et Yuna ont tous les deux le même âge puisque ayant été conçus quasi en même temps, Yuna sur Spira et Tidus dans le monde des rêves. Là où Yuna sourit tout le temps et ne se plaint jamais (preuve qu'il est tout à fait possible de faire une femme forte sans qu'elle soit synonyme de femme casse burn, insupportable au point d'avoir plus de testostérone que le héros...) Tidus lui s’apitoie et se lamente. Il veut rentrer chez lui, retourner dans sa petite maison, retourner dans sa ville natale. Leur "rivalité" est d'ailleurs visible jusque dans leurs vêtements.
Yûsuke Naora, le directeur artistique, et son créateur de personnage, alors le tout jeune Tetsuya Nomura, font arborer un look décontracte et cool à Tidus, un peu à l'occidentale alors qu'ils ont vêtu Yuna d'un kimono typique du japon de l'ère Edo.
Enfin, et c'est sur ce point qu'ils se ressemblent définitivement: ils ont tous les deux perdu leur mère très jeune et ils ont très peu connu leur père.
Mais là où Yuna voue un culte dévoué au sien, quasi-christique, Tidus le déteste, le maudissant de l'avoir abandonné. Nojima dresse de la sorte une comparaison et une opposition très intéressante. Yuna souhaite marcher sur les traces de son père pour honorer sa mémoire, chose que l'on apprend ici: https://youtu.be/EckR41F1TR8?t=288
Mais lorsqu'elle apprendra, une fois son pèlerinage accompli, que tout ça n'était qu'une manipulation depuis le début et qu'elle est obligée de sacrifier un de ses amis, un être bien réel de chair et de sang, pour continuer à faire vivre Sin (donc le passé), elle se ravisera et remettra son combat en question. https://youtu.be/0YSf43SH17k?t=163


Yuna devient ainsi l'élue, la première à dire non, la première à refuser ce monde. Parce que là où tous les grands invocateurs avant elle, y compris son propre père qu'elle admirait tant, avaient dit oui, et donc encourageaient ce système d'exploitation par Yu-Yevon, Yuna refuse. Par ce choix, symboliquement, Yuna se détache du chemin de son père et, par extension, de son propre nom ! (Yuna est le diminutif de Yunalesca, celle-là même qui entretient Sin ) Yuna décide de suivre sa propre voie.
"Je vivrai avec ma souffrance, je vivrai ma propre vie et je détruirai la peine à sa |mon père] place".
Yuna devient ainsi la véritable héroïne de l'histoire.


Nous pouvons remarquer que le parcours de Tidus est strictement inverse. Lui qui se donne tant de mal pour chasser son père de ses souvenirs, ce dernier hante littéralement ses rêves. Cependant, il découvre au fur et à mesure de l'aventure l'amour que son pater lui portait. Il redécouvre, par les témoignages que lui fait parvenir Auron, cet homme qu'il pensait connaître si bien et qui s'avère être l'opposé de ce qu'il avait imaginé. Une figure chaleureuse qui ne pensait qu'à retourner à Zanarkand pour raconter à son fils qu'il aime tout ce qu'il a vu.
Et finalement, il décide, contrairement a Yuna, de marcher sur les traces de son père, se sacrifiant comme lui pour mettre un point définitif au fléau de Yu-Yevon.


Pour ajouter du détail au détail, soulevons que Tidus et Yuna ont perdu leur père en même temps. La première fois qu'ils échangent sur leurs pères, c'est sur le pont du navire partant pour Kilika où Yuna révèle à Tidus qu'elle se souvient très bien du premier jour où elle a rencontré Jecht puisque c'est le jour où Braska (son père à elle) est parti détruire Sin. Cet échange est d'ailleurs suivi de l'une des plus belles scène du jeu mais on y reviendra plus tard (ah ! ah ! cette scène putain !)


Tidus comprendra par la suite, en épiant malgré lui une conversation entre Lulu et Wakka, qu'il est bien égoïste de cracher ainsi sur son père, Wakka et Lulu ne se souvenant même pas de leurs propres parents, Sin les ayant tués alors qu'ils étaient tout jeunes.
La conversation entre Yuna et Tidus au sujet de leurs pères respectif est d'ailleurs filée tout au long du jeu, jusqu'à l'une des scènes les plus émouvantes qu'il soit: celle dans l'au-delà, à Guadosalam.
https://youtu.be/EckR41F1TR8?t=413
D'abord surpris de voir sa mère, celle-ci n'ayant pas été envoyé dans l'au-delà par une cérémonie, Tidus comprendra qu'elle a accepté sa mort. On comprend que la mère de Tidus est morte quelques mois après que son père ait disparu. Surtout on comprend que Jecht voulait tirer Tidus hors de son enfance. Il le sermonne, il se moque de lui, bref de façon maladroite, mais à sa façon, il essaie de le bousculer afin de la faire grandir (ce que Tidus ne veut pas évidemment, il veut être un gamin jusqu'à la fin).


Et bien évidement il y a la romance développée entre Tidus et Yuna. J'avoue ne même pas avoir vu venir la scène quand elle est apparue la première fois (bon ok j'avais six ans mais bon).
Yuna déterminée a accomplir sa mission mais qui sait depuis le début qu'elle devra y laisser la vie, face à Tidus qui ne veut pas qu'elle meurt.
Là où l'ironie est totale, c'est que Tidus n'en savait rien depuis le début ! Etant totalement étranger aux us et coutumes de ce peuple, il ne savait pas que l'ultime chimère absorbait toute l'énergie de son invocateur jusqu'à le tuer. Il n'a même pas tilté sur le fait que Braska, le père de Yuna, ne soit plus vivant (ce qui n'est pas véritablement un défaut parce qu'aucun d'entre nous n'y avait sérieusement songé, soyons honnête).
C'est la première fois qu'il la voit après que la terrible vérité lui ait été révélée: les invocateurs meurent en appelant l'ultime chimère.
La particularité de cette scène est que Yuna a vu sa foi chamboulée, ayant réalisée tout le mensonge et la fausseté qui émanaient de Yevon (l'église).
https://youtu.be/SR8Nf-c1amE?t=42
Tidus essaie de la faire renoncer, doucement au début en lui disant qu'elle se force trop jusqu'à lui lâcher tranquillement "laisse tomber". La voyant indécise, il tente de lui vendre Zanarkand. Très honnêtement, il décrit tant et si bien ce levé de soleil sur la plage, pour l'avoir vécu également, que je suis convaincu que le directeur artistique est parti à Okinawa aux aurores uniquement pour décrire avec précision ce qu'il ressentait face aux couleurs de l'aube.
Et là coup de théâtre incroyable : Yuna pleure. Pour la première fois depuis le début de l'aventure, après tout ce qu'ils ont traversé, les rôles s'inversent définitivement ; ce n'est plus Tidus qui geind, c'est Yuna. Elle pleure évidemment parce qu'elle sait que son devoir est plus important que ses envies, devoir qui la conduira a se sacrifier.
Et là Tidus tente le tout pour le tout en lui révélant la pure attraction qu'il éprouve pour elle par ce baiser qui est devenu l'une des scènes les plus emblématique de toute la saga tant il est magnifique (on y reviendra !). Comme je l'ai dit précédemment, il s'agît du premier baiser échangé par des acteurs numériques photoréalistes.
Nojima nous livre ainsi deux adolescents qui supportent chacun de lourdes responsabilités mais tentés de se laisser porter par leur fougue juvénile. On comprend que Yuna fut surprotégée et qu'elle n'a sans doute jamais embrassé un garçon.
Et malgré cet aveu de Tidus, elle refuse d'abandonner. Elle veut rester digne, elle veut rester fière.


Et Tidus décide alors de choisir seul de mourir pour éviter de donner ce choix trop dur à faire à Yuna. De la pure tragédie grecque, Yuna était prête à mourir pour continuer et ne voulait sacrifier à aucun prix ses camarades et c'est le garçon dont elle est tombée amoureuse qui meurt à sa place.


Et maintenant que l'on sait tout ça, revenons sur le fameux Tidus laugh
https://www.youtube.com/watch?v=WJotVinhXJ4
Pourquoi cette scène existe ? Eh bien comme dit précédemment, Tidus et Yuna vont mutuellement apprendre l'un de l'autre pour se construire et ouvrir les yeux face à la réalité. Yuna est là première qui apprendra de l'autre avec le fameux sifflement.
https://www.youtube.com/watch?v=gq7IY8EMq0Q
Tidus lui dit que c'est de cette façon qu'on encourageait les joueurs de blitzball. Yuna n'y arrive pas mais il lui dit de ne pas s'en faire car il faut s'entraîner.
J'avoue avoir du mal à faire sens du sifflement, s'il représente quelque chose ou s'il s'agit d'un simple détail.
Et puis Tidus déprime. Il vient d'apprendre que son père avait été le sacrifié, celui ayant été utilisé pour l'invocation de l'ultime chimère et qui désormais vit en Sin.
En conséquence, Yuna vient le voir et siffle devant lui pour lui montrer qu'elle s'est entraînée et qu'elle y arrive désormais. Tidus est toujours triste alors elle lui demande de sourire. Elle s'est entraînée à sourire même quand elle était triste et maintenant elle veut que Tidus fasse de même. "Je me suis entraîné à siffler alors entraîne-toi à sourire".
Et tout comme Yuna qui n'arrivait à siffler la première fois, puisqu'elle apprenait d'un autre, Tidus n'arrive pas à sourire et à rire. Alors il se force, il s'entraîne. Car s'il rigole c'est pour ne pas pleurer. Il vient d'apprendre qu'il devra tuer son père, il est mis face à la réalité, il est dans un monde qu'il ne connait pas, sa ville a été détruite et il ne pourra jamais y retourner, tous ses amis n'ont jamais existé et sont morts. Et il rigole. On sent qu'il veut pleurer de toutes ses forces mais il rigole ce qui donne le rire le plus triste de l'histoire. Il laisse sortir toute sa colère, toute sa frustration et puis il y prend goût, jusqu'à ce que Yuna vienne le rejoindre.
Je pense que nous trouverons la scène beaucoup moins ridicule sachant cela.


Poursuivons dans les personnages avec mon petit préféré, Auron.


Auron, ah Auron. Tant de classe et de charisme réunis dans un seul personnage. Encore une fois il est intéressant de la comparer avec Tidus puisque, plus jeune, ils partageaient le même objectif: vaincre Sin et le plus rapidement possible. Lui aussi a accompagné un invocateur jusqu'à Zanarkand et cela, on le découvre à travers les multiples enregistrements que Jecht à pris pendant leur pèlerinage. Auron est las de s'arrêter régulièrement. Il trouve Jecht immature et veut se dépêcher d'arriver à destination.
Cela s'explique par la place qu'il occupe: c'est un moine donc, par déduction, une figure éminente de discipline et de dévotion à la religion de Yevon et pourtant...
Dévasté en apprenant l'effroyable vérité, il veut faire machine arrière. Tel Tidus essayant de convaincre Yuna, Auron supplie Braska de ne pas mourir. Et comme on pouvait s'en douter Braska ignore. Auron se rend devant Yunalesca après la mort de son ami, pour l'affronter. Yunalesca le vainc sans difficulté et le tuera. Avant de rendre son dernier souffle, il arrivera à rencontrer Kimahri dans le Gagazet et lui demandera d'emmener Yuna à Besaid.
La réplique symbolisant le mieux le personnage me paraît être celle-ci
https://youtu.be/MwawFVauUU4e


"Je pensais que je changerai le monde mais je n'ai rien changé du tout."
Le parcours d'Auron est donc un parcours d'échec duquel il tâchera de tirer des leçons. Ne cherchant qu'à tarir sa colère dans la vengeance, il va se servir de Yuna et de Tidus pour tuer Yunalesca.
https://youtu.be/0YSf43SH17k?t=277
Il conjurera à jamais Bevelle a qui il a tout donné et qui l'a trahi.
Encore plus intéressant, Auron n'arrête pas de rabattre à Tidus que ceci est "son histoire". J'avais du mal à faire sens du symbole mais je pense avoir compris: que représente Tidus ? C'est la jeunesse, la fougue, le nouveau monde. Auron lui répète inlassablement que tout ceci est son histoire car il ne doit pas se soucier de celles qui ont été écrites avant lui. Il doit faire sa propre histoire, donc bâtir son propre avenir.
Et puis nous découvrons... en fait Auron était mort depuis le début. C'était un errant qui n'avait jamais été renvoyé. https://youtu.be/_iUeKcJ9kHo?t=25
"C'est votre monde maintenant". L'ancienne génération passant le relais à la suivante, l'ancien monde cédant sa place au nouveau.
Comme pour se faire pardonner de s'être fait duper par Yevon, Auron a persisté, il a continué à vivre pour le vaincre et voir de ses yeux le nouveau monde naître.
Ce qui est très bien fait car le jeu insiste au final relativement peu dessus. Une réplique de Seymour, la réticence de Auron a entrer dans le farplane et enfin l'aveu de celui-ci a Zanarkand.


Auron se fait d'ailleurs un malin plaisir à rabaisser gentiment Tidus tout le long de l'aventure, ainsi que tous les autres personnages, son ancienneté et sa lucidité vis-à-vis du monde le rendant plus sage que tous.


Wakka est la façon la plus claire pour Nojima de nous exposer le citoyen type de Spira, écervelé par tant de lavage de cerveau.
Au passage, il est celui qui entretient le plus de relation avec les membres du groupe derrière Tidus. Sa relation avec lui est en outre très intime car Wakka voit en Tidus, de part son jeune âge et sa ressemblance, le frère qu'il n'a pas pu sauver, Chappu.
Wakka est dévoré par le passé, les remords et la nostalgie et c'est la raison pour laquelle il est un si bon esclave.
https://youtu.be/EckR41F1TR8?t=174
Incapable de faire le deuil de Chappu, là où Lulu y est parvenue, il ne cesse de faire des prière et des courbettes à toutes les figures religieuses qu'il croisera. Il se rend dans le farplane pour parler à son frère Chappu (alors que le farplane ne rappelle pas les morts, il ne fait que projeter les souvenirs passés), il veille sur Tidus comme un grand frère, tout cela magnifiquement représenté visuellement par l'épée fraternité (bah oui, c'est pour ça qu'elle est sur la jaquette du jeu) qui lui transmet. Ce que Tidus ne sait pas, c'est que cette épée avait été fait don à Chappu par Wakka, mais Chappu la laissé, préférant utiliser une machine al-bheld, pour le plus grand plaisir de Wakka.
Nojima va alors s'amuser à confronter Wakka, personnage dévoré par son passé et pro-Yevon, avec Rikku fille qui a fait le deuil de tout ça et une al-bheld. L'occasion de nous offrir des dialogues savoureux.
C'est d'autant plus beau que Nojima fait exprès de nous faire rencontrer Rikku et Wakka successivement. Les deux aident Tidus, les deux le nourrissent, lui expliquent qui est Sin, ce qui s'est passé, ils se montrent compréhensif et honnête avec lui. Nojima montre ainsi que Wakka et Rikku se ressemblent énormément puisque animés de la même bonté altruiste. S'ils divergent sur leurs idées, ils sont tous les deux bons et bienveillants.


Puis vient Lulu, un personnage qu'on pense à tort survolé mais qui s'avère être une figure très attachante une fois que l'on connait son histoire.
https://youtu.be/EckR41F1TR8?t=218
Ici, Lulu se demande si elle ne devrait pas commencer à aller de l'avant. Tidus lui dit que Chappu était certainement un très brave type mais qu'il y en a d'autre et qu'elle devrait le laisser derrière elle.
"Adieu Chappu, tu as toujours dis que j'étais une grincheuse mais ce furent les plus beaux jours de ma vie".
Lulu était amoureuse de Chappu, un amour partagé puisque ce dernier aurait pu la demander en mariage. Mais Chappu est parti pour s'enrôler chez les Bannisseurs (sorte d'armée locale protégeant la planète de Sin). Il est mort des griffes de Sin ce qui chamboule complètement Wakka et Lulu. Mais comme cela a déjà été dit, Lulu fait son deuil là où Wakka n'y arrive pas.
https://youtu.be/S2d5hpgKkG4?t=3095
Wakka espère toujours que Tidus soit Chappu et qu'il ait été emmené dans une autre dimension... mais non
"Sin a emmené Chappu nul part, il l'a écrasé sur les flans de Djose et il ne reviendra jamais".


Eh bien-sûr la pire divergence de ce système reste Seymour. Né d'une mère humaine et d'un père chef Guado, Jyscal, Seymour est un sang mêlé, ce qui explique son aspect quelque peu étrange. Le fait qu'il ne soit pas complètement humain le pousse à combattre l'inégalité et à faire accepter la tolérance, ce qui le rend très populaire auprès de la population. Agé de 28 ans, il a pris la succession de son père mais est également l'un des chefs religieux de Yevon.
https://youtu.be/erhLZtE4dQw?t=839
Ceux que Nieztsch appelait les nihilistes passif, ceux qui n'ont pas le courage de vivre parce que n'ayant pas la volonté d'aller de l'avant. Seymour veut débarrasser le monde de la vie elle-même car selon lui, la mort est la délivrance de cette vie de souffrance. Il se dit a quoi bon avancer puisque nous finirons par mourir un jour.
La chimère de Seymour est d'ailleurs... à l'image de sa mère, normal puisque Anima est la mère de Seymour.


Et enfin nous venons d'arrivé au terme des personnages. Je vous laisse maintenant rejouer à FFX en gardant tout ce qui a été évoqué en tête et, de sorte, j'espère sincèrement avoir pu vous aider à apprécier tous les dialogues que vous redécouvrirez, j'espère, sous un jour nouveau. Certains passages qu'on ne comprenait pas apparaissent alors comme lumineux, certaines subtilités qu'on n'avait même pas noté surgissent.
Ce qui reste tout de même exemplaire, c'est la fluidité du récit. Six protagonistes, cinq méchants, un épais back-ground et on arrive quand même à suivre le fil. Tous les éléments sont amenés tranquillement, les uns après les autres et toujours avec une grande subtilité. On essaie pas désespérément de tout fourrer dans l'histoire mais de rendre tout ça agréable.


Mais final fantasy X ne serait rien s'il n'avait que son scénario pour lui.


Car oui, il est temps enfin de délaisser l'histoire à proprement parlé et de se concentrer sur l'univers et les environnements de ce jeu, sur les costumes et les paysages, bref: la mise en scène.


Un bon jeu est l'aboutissement du travaille conjoint et de la confiance que se portent mutuellement les réalisateurs, les producteurs et les scénaristes.


L'excellent travail que Yoshinori Kitase a fait dans FFVII et FFVIII en tant que réalisateur et co-scénariste a poussé Squaresoft à le désigner producteur de cet opus. Et j'aime ! Yoshinori Kitase ! Tellement ! Le rôle d'un producteur est le plus important dans une œuvre car c'est lui qui est responsable, supervise et valide le projet. L'équipe a donc besoin d'un producteur suffisamment ouvert d'esprit pour valider des choix osés et ingénieux mais suffisamment lucide pour pouvoir arrêter les jeunes têtes enflammées dont il a la responsabilité quand celles-ci partent dans des projets un tant soit peu farfelus (une des raisons pour laquelle il est très risqué qu'une œuvre soit produite, écrite et réalisée par la même personne parce que si elle va dans le mur, personne n'est là pour lui dire qu'elle va se planter). Les producteurs sont souvent vieux, ce qui leur permet de garder une certaine distanciation.


Yoshinori Kitase est une personnification de ce genre de producteur. il laisse libre cours à l'imagination de l'équipe artistique et ne s'occupe que des grandes planifications... et après il a produit lightning return mais bon...


La réalisation se partagent entre deux jeunes arrivants et un homme plus expérimenté
- Motomu Toriyama pour la réalisation des événements;
- Takayoshi Nakazato pour la réalisation des cartes;
- Et Toshirô Tsuchida pour la réalisation des combats (on reviendra sur lui quand il faudra aborder le gameplay).


Croyez-le ou non, Motomu Toriyama et Takayoshi Nakazato n'avaient jamais bossé en tant que réalisateur sur un projet. Certes, ils avaient respectivement cinq ans et six d'expérience dans la boîte mais toujours en tant qu'assistant, planificateur ou scénariste... merci Square. Parce que oui justement ce n'est pas en se réfugiant derrière des valeurs sûres ou des Yes Men qu'on arrive à créer de grandes œuvres mais en donnant sa chance au petit jeune plein d'imagination que la vieillesse n'a pas encore rendu sénile.


Motomu Toriyama, l'event director, et son directeur artistique, Yûsuke Naora, vont alors tenter de réimaginer la sage. Ils souhaitent lui donner une nouvelle impulsion et se détacher des environnements des trois précédents opus pour retourner vers quelque chose de plus fantaisiste sans pour autant faire du médiéval comme les épisodes I à V. Ils vont alors avoir la très bonne idée d'aller puiser dans la culture asiatique pour fonder le pilier artistique du jeu.
De larges tapisseries aux tons rouges et roses, des amulettes et des talismans bouddhistes, une langue écrite similaire aux kanjis, des tenus traditionnelles et de cérémonies.


Yûsuke Naora a une confiance aveugle envers ses artistes, à leurs goûts et leurs inclinaisons. Il ne donne que les grandes lignes directrices et son équipe se charge du reste. Il laisse l'art s'épanouir plutôt que de la cadenasser étroitement. C'est ce qui donne cette saveur unique et cette personnalité si définie à ce jeu. La multitudes des décors nous offre de quoi chatouiller notre imagination.


Il nous disait que l'on juge souvent un travail au frisson que nous donne la première séquence du jeu et en effet, quels frissons.


L'intro du jeu est lourd de sens en terme de réalisation pure. Le couché de soleil représente la fin de l'aventure, un soleil qui n'est pas caché sous les nuages (les nuages ont leur importance, on y reviendra quand on abordera la musique du jeu)
Car ce n'est pas la ville de Zanarkand que Tidus regarde du haut de son talus, c'est le soleil qui se couche, la fin qui arrive, la séparation de ses souvenirs. D'ailleurs, après le couché de soleil vient la nuit, le moment où les gens s'endorment pour rêver.
Les ruines de sa cité se trouvent entre lui et son avenir et il va devoir les passer pour aller de l'avant.
Et quels sont les premiers mots qu'il prononce ? Nous fait partager quoi ? Ses souvenirs ! Tiens donc.


Ah oui et j'avais dit que je reparlerai de la scène sur le pont du bateau.
https://youtu.be/GoE74Us2oSw?t=2124
C'est simple, les attaques de Sin sont spectaculaires. Il absorbe l'intégralité de l'attention une fois à l'écran.
Est-ce que c'est la taille gigantesque du monstre qui pourrait à tout moment écraser le bateau comme un cafard ? Est-ce que c'est cette superbe caméra qui dans un plan totalement numérique et en un plan suit les deux harpons lancés par le navire ? Ou encore est-ce l'incroyable fluidité de l'eau qui, bien qu'elle a vieillie, restait une prouesse d'infographie pour l'époque ? Peut-être les transitions ? Ou non, ce sont ces deux sinspawn qui sont entraînés par une rafale de vent et qui foncent telles des torpilles sur le bateau ! Non ! Je sais ! C'est cette putain de scène où le corps de Sin plonge sous l'océan avant de voir la tour Eiffel qui lui sert de queue s'abattre sur les flots et faire tanguer le bateau ! Ah !
https://youtu.be/GoE74Us2oSw?t=2568


Les scènes de Final Fantasy X sont ouf ! Comment un jeu sortis en 2001 peut-il être plus impressionnant que la plupart des films qui sortent aujourd'hui ?!


Et puis j'ai dis qu'on reparlerai également de la scène du vaisseau al-bheld vous vous souvenez ? Celle où ils quittent leur maison.
Maintenant laissez-moi vous montrer deux extraits:
1): https://www.youtube.com/watch?v=I3f2qCa6Ik4
2): https://youtu.be/6fp_nT6-Pg0?t=271
Avons-nous compris le génie de cette équipe ?
Eh bien oui ! Dans un jeu de 200 heures de durée de vie, avec 10 heures de cinématiques, ils arrivent à donner un sens visuel aux images.
Que représentent les harpons de la première scène ? Le harpon vient s'accrocher à la carapace de Sin le reliant ainsi au bateau mais, surtout, montrant que les hommes ne veulent pas s'en détacher, là où les missiles de la deuxième scène ont pour but d'éloigner la maison et de la détruire définitivement.
Dans la première scène, les hommes ne veulent pas laissez Sin partir, qui cherche pourtant à les fuir, et se traînent derrière lui, incapables d'avancer s'il n'est pas là.
Dans la seconde, les al-bhelds cherchent à s'éloigner de leur passé et c'est pour cette raison qu'ils fuient leur base, donc l'opposé de l'équipage de la première scène. On peut même dire que le passé essaie de les rattraper quand le souffle de l'explosion se met a les suivre, mais ils arrivent a s'en extirper et a voler vers l'horizon.
Alors ? Bon, vous êtes pas convaincu. Que dîtes-vous de ça
https://youtu.be/M-d3qbz5ijc?t=8
Vous avez vu ? La façon dont ce mec se viande sur le sol ? Et ce morceau de journal qui est porté par le vent, vous l'avez vu aussi ? C'est ce genre de détail qui te fait croire en une scène, ce qu'on prend tous pour une broutille et qui a pourtant été soigneusement réfléchis et pensé par l'équipe du jeu, cette minutie qui donne une vraie crédibilité à l'univers. Le bruit de l'acier froid, grinçant de l'immense épée d'Auron qui...


Bon ok j'ai compris


https://youtu.be/7MJOqCFZMPo ce vaisseau volant au-dessus des nuages (encore des nuages) qui masquent tous les mensonges que Yu-Yevon a tissés, volant vers le soleil de la vérité et du progrès, enfin à leur porté mais rapidement rappelés à la réalité par le vent qui essaie de les emporter... bon vous comprenez pas ce que je suis en train de dire mais à la fin de la critique vous aurez compris.


Alors laissez-moi vous présenter la scène qui m'a le plus marqué et que je trouve la plus profonde en terme de sens: la performance de Yuna.
https://www.youtube.com/watch?v=-PWC6vUext0
Ce couché de soleil éclatant, masqué en parti par cet amas de nuages menaçants (je vous jure on y revient) et tentant de le dissimuler. Cet entre-monde, cette frontière séparant la vie et la mort, le jour et la nuit, le soleil et la lune, l'eau et le feu. Cette scène est là métaphore de tout le jeu FFX, un monde baignant dans la croisée des mondes entre le passé derrière eux (la nuit) et l'avenir devant (le soleil).


A cela, il faut ajouter qu'il s'agit du premier final fantasy doublé
Tous les final fantasy ont toujours eu à relever des défis techniques, l'apparition de la 3D, les premiers doublages, les séquences entièrement animés en images de synthèse.
C'est tout de même effarant que les gars pensent a faire un remaster du jeu mais n'intègrent pas la version japonaise dedans...
Ils ont a mon sens parfaitement réussi le pari de la syncro labiale.


Nous allons maintenant passer aux combats et à la durée de vie que je traiterai ensemble.
Toshirô Tsuchida, le réalisateur des combats, avait auparavant travaillé sur la trilogie Front mission en tant que réalisateur, et Takashi Katano, dont c'est le premier jeu en tant que programmeur principal sur un RPG (décidément, pour une première fois ils ont vraiment tous assuré) vont nous offrir un tout nouveau système de combat.
Cela explique la transition des combat ATM au combat tour par tour, un système de jeu que je trouve pour ma part tout à fait correct. Les combats sont diablement agréables à regarder, tout comme les splendides apparitions des chimères qui sont juste époustouflantes.
Et puis il y a le sphérier, une trouvaille si ingénieuse que tous les jeux FF ont repris l"idée par la suite (FFXII avec le système des permis, FFXIII avec le Cristallum, FFXV avec l'arbre de compétence). Ils ont même inspiré de futurs cartons occidentaux (Dead Space avec le système de point de compétence pour améliorer les armes et la santé, ou l'arbre de compétence de Path of Exil).
Donc les mecs ont en un seul jeu révolutionner la façon de concevoir les images de synthèse mais également la façon de faire évoluer les personnages.


J'évoquerai la durée de vie au travers des quêtes secondaires. Si je blâme de plus en plus les RPG actuels, ce n'est pas tant pour la redondance absolue de leurs quêtes que par leurs simplicités et leurs inutilités.
C'est soit dit en passant ce qui constitue l'essentiel de mes reproches envers FFXV. A aucun moment, les quêtes ne sont réellement intégrées a l'univers global, c'est une succession de FedEx sur lesquels tu tombes par hasard en explorant le jeu. Ce qui m'énerve vraiment c'est que tu as beau retourner sur tes pas une fois le jeu terminé, il n'y a aucun lieux de nouvellement accessible auxquels tu ne pouvais déjà pas accéder avant.
FFX propose peu de quêtes mais chacune est réfléchie, longue et surtout répond aux autres. La quête pour trouver ultima, l'arme légendaire de Tidus, t'oblige a faire la course de chocobo, la course de chocobo t'emmène en face des sœurs Magus, les soeurs Magus t'obligent à capturer douze monstres pour le colisé, ainsi qu'à acquérir Anima,
Ce genre de construction se retrouve tout au long du jeu ce qui est à la fois intuitif et cohérent.


La trame principale, couplée aux dix heures de cinématique et a toutes les quêtes totalise un ensemble de 200 heures au moins qui nous amène au boss des boss, Némésis, l'être suprême.


Et enfin comment parler de FFX sans évoquer ses musiques. C'est bien simple, Nobuo Uematsu est, à ma connaissance, l'un des seul compositeurs de jeux vidéos dont le travail soit reconnu dans le monde entier.
Nous pouvons saluer qu'il ait composé le thème principal de final fantasy qui regroupera tous les opus sous la même étoile.


Pour éviter de le faire suffoquer sous la masse de travail que demande le jeu, l'équipe a eu la bonne idée d'aller chercher deux autres compositeurs pour l'épauler, une très bonne chose quand il s'agit d'offrir des musiques de meilleur qualité en répartissant les tâches pour palier à une éventuelle panne d'inspiration (hein ? KHIII !), Junya Nakano et Masashi Hamauzu
Ainsi, Uematsu peut s'occuper des principaux themes, tranquillement, qu'il peut travailler et retravailler, et laisser les thèmes d'ambiance et secondaires à ses "assistants". Et il va faire ce qui sont pour moi les meilleurs bandes-originales de toute la saga. Je peux vous l'avouer, je ne me lasse d'aucune musique qu'il a personnellement composé.


Et nous pouvons remarquer que les titres ont également un sens.
Someday, the dream will end (un jour, le rêve s'arrêtera) qui se profile discrètement dès que Tidus évoque son père, Sin, ou bien quand il arrive à Zanarkand, qui en est d’ailleurs le theme; Other world (l'autre monde) qui n'est pas le theme de ject à proprement parlé mais bien le theme du monde des rêves. C'est incroyable de voir à quel point Uematsu maîtrise aussi bien la musique symphonique que le hard-rock; ou enfin la magnifique chanson de cet opus, une chanson rendu célèbre par la scène qu'elle accompagne, Suteki Da Ne.


Et comme il est laborieux de parler de mise en scène sans image, comment peut-on parler de musique sans le son ? Je voulais tout de même rendre hommage à ce compositeur qui a tant fait pour ce jeu.
Alors pour le plaisir de vos papilles, je vais analyser les paroles de Suteki Da Ne


Ah et j'estime que pour comprendre un texte, surtout une chanson dans laquelle chaque mot est choisi et a une importance, il faut impérativement savoir parler couramment la langue dans laquelle elle est écrite. Alors ne comprenant que des bribes de japonais, je tâcherai d'être le plus productif possible.


https://www.youtube.com/watch?v=xlwSPMwAqbM

antrozous1
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le 10 août 2019

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Goldynateur
9

J'écris cette critique avec une larme aux yeux.

C'est avec 11 ans de retard que j'ai enfin mis la main sur ce jeu. Ayant commencé mon aventure Final Fantasy avec Dissidia puis Crisis Core, je me disais qu'il était temps de faire un jeu de la...

le 8 mars 2013

32 j'aime

10

Final Fantasy X
Camiille
10

Sous-estimé et mal compris par le plus grand nombre : dommage.

J'ai défendu corps et âme ce jeu face aux fanatiques assassins qui prennent (connement) Yuna pour leur modèle absolu. Je l'ai défendu comme j'ai pu contre les neuneus qui n'y voient qu'une histoire...

le 4 févr. 2012

24 j'aime

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Final Fantasy X
antrozous1
10

La fin d'un monde pour en construire un autre, la fin d'un rêve pour en faire un nouveau.

Ah, les années 2000... Période charnière du jeu vidéo. J'ignore si c'est la nostalgie qui me fait dire que ces dix années, qui s'étendent de 2000 à 2010, recensent les plus grands chef-d’œuvre...

le 10 août 2019

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2

Kingdom Hearts III
antrozous1
3

KHIII, le jeu a tout du royaume mais rien du coeur

Bonjour à tous. Voilà six mois de cela j'ai publié une critique sur KHIII qui a, à juste titre, été delete par le site. Je reconnais, après avoir pris du recul, que les mots que j'y employais étaient...

le 6 août 2019

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