Attention, je raconte ma vie : Comme pour beaucoup ici, Phantasmagoria fut d'abord pour moi un (délicieux) traumatisme d'enfance. Planqués dans la salle d'ordi, mon amie et moi nous explorions le manoir les yeux exorbités, dans ce plaisir indicible d'affronter à la fois nos peurs à deux, et l'interdit bravé que représentait ce jeu dont nous n'avions pas à toucher la boite. Tout deux marqués par différents moments, elle par une platée de tripes dans un entonnoir, moi par une tête qui fait un 360, voilà plus de 15 ans que nous nous rappelons ces grands moments de frousse à chacune de nos retrouvailles.
Ce mois dernier nous nous sommes proposés de relancer Phantasmagoria et d'aller jusqu'au bout, coûte que coûte, en savourant l'intégralité des scènes gores, cela va sans dire... C'est donc chose faite, et je clos ici mes mémoires sur un hommage à cette amie sans qui GTA, Dragon Ball, X-files, Ecco, Tomb Raider, Phantasmagoria, Incoming et Braindead n'aurait pas été vécu comme il se doit, en pleine enfance impressionnable. Amour. Et ça marque le sens critique, ça c'est sûr.


Phantasmagoria, c'est avant tout ce bon vieux procédé du Full Motion Video, qui nous fait prendre part à un film interactif, avec personnages joués par des acteurs incrustés dans le décor en image de synthèse. Que ce soit via les Gabriel Knight, X-files le jeu, les Wing Commander ou autre Tex Murphy, on a tous eut à faire avec le FMV, et pour le meilleur de la production, il faut dire que ça amenait quelque chose d'inédit dans les émotions véhiculées et la narration, évidemment calquée sur le cinéma (de série B bien Z sur les bords).
L'histoire est une simple affaire de maison hantée improbable, mais la beauté des décors associée à un fond sonore modeste (fan de triangle ?) mais efficace, instaure une ambiance particulièrement envoûtante.
Le FMV amène aussi le rire. Les acteurs de Phantasmagoria voient d'ailleurs leur nullité sublimé à chaque instant par un doublage français insoutenable, ce qui désamorce clairement un certain nombre de situations parfois assez dures (toutes les scènes de meurtre et torture, hilarantes autant que peu ragoûtantes... le final, lui, est massacré par un incompréhensible mélange de doubleuses pour Adrienne, qui commence avec sa voix habituelle, puis, pour deux phrases, semble doublée par une autre, avant de finir par lire un texte en latin avec un accent bien anglais, résidu de version originale. Assez fabuleux). Enfin, leurs tenues improbables parfont l'expérience (Henriette et son bonnet rouge, Adrienne et son inséparable pull-over orange, jean monté au-dessus du nombril...).


Pour le reste, il ne s'agit ni plus ni moins que d'un jeu d'aventure type point & clic, comme Sierra en a fait des dizaines parmi les meilleurs. Quelques énigmes retorses, mais rien d'insurmontable, avec système d'aide (laconique) intégré et progression balisée jusqu'à un final chronométré et désespérant, avec sa mort (longue...) qui survient à la moindre erreur de parcours.


Que ce soit pour son ambiance unique et inoubliable (pour peu qu'on y ai passé quelques heures à galérer, ou qu'on l'ai piqué à 8 ans...), sa réalisation en FMV, parfum d'un autre temps qu'on aimerait bien voir revenir avec les moyens actuels (le dernier Tex Murphy sorti cette année fait de la résistance, j'ai hâte d'y jeter un œil), son bon goût de série Z interactive et ses scènes gores toujours aussi efficaces, sans oublier sa gratuité due à son statut d'abandonware, Phantasmagoria est un incontournable du jeu d'aventure qu'il serait dommage de ne pas avoir essayé au moins une fois, au risque d'aimer ça !

Tom_A
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le 21 juil. 2014

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Tom_A

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