Xenoblade Chronicles 2
7.2
Xenoblade Chronicles 2

Jeu de Monolith Software et Nintendo (2017Nintendo Switch)


Temps de jeu : 90 heures
Mon premier Xenoblade




Aux Champs-Elysium



Sans aucun lien avec le premier épisode ou le spin-off X, Xenoblade Chronicles 2 pose les bases de son histoire dans le monde d’Alrest, entièrement composé d’une mer de nuages. Peuplé de races différentes, tous vivent sur le dos de créatures gigantesques, les Titans. Les légendes racontent que tout serait l’oeuvre d’un certain Architecte, unique entité s’étant réfugiée au sommet de l’Arbre-Monde. Le joueur y incarne Rex, un plongeur récupérateur de trésors et autres matières premières. De fil en aiguille, le jeune garçon se retrouvera confronté à la mort lors d’une obscure mission. Fort heureusement pour lui, une dénommée Pyra lui viendra en aide, leur rencontre résultant sur une promesse forte : ensemble, ils se rendront à l’Elysium, paradis perdu d’où les Hommes ont été bannis. Sur leur chemin, le binôme rencontrera moult embûches et ennemis, mais aussi des alliés de poids. Si le scénario peine à convaincre sur ses trois premiers chapitres, il s’envole littéralement à partir du quatrième avant de finir en apothéose au dixième, ultime épisode du jeu.



Maîtres et Valets



Comme dans les précédents jeux de Tetsuya Takahashi, le scénario explore énormément les sentiments, la barrière floue entre le bien et le mal, mais aussi et surtout le rapport de domination. Dans Xenoblade Chronicles 2, cette confrontation prend forme entre les Pilotes et leurs Lames. Les premiers, mortels, se servent des secondes pour se battre, accomplir des exploits ou tout simplement aider la veuve et l’orphelin. À ce moment précis, on serait tenté de différencier qui de l’un ou de l’autre est le faible ou le fort. Toutefois, l’évolution du scénario et des personnages nous prouvent à de multiples reprises le contraires. Immortelles, elles peuvent se soustraire aux affres du temps et ne dépendant jamais réellement de leur Pilote ; eux, à contrario, ne peuvent accomplir leur rêve qu’avec leur aide. Mieux encore, il est également possible pour les deux partis de n’être qu’amis ou même mariés. N’oublions pas non plus le rapport de l’Homme à la nature – les races dépendant de la santé du Titan sur lequel elles habitent – ou du rôle de chacun dans une guerre, qu’il s’agisse d’entreprises profitant du malheur des autres pour s’enrichir ou des acteurs eux-mêmes.



Et à la fin, il lui raconta



À chaque scénario imposant, son lot de cinématiques. Très nombreuses, il ne sera pas rare de les enchaîner tous les trois pas lorsque l’on suit la quête principale. Bien mises-en-scènes, bourrées d’idées visuelles agréables, elles sont toutefois entachées par des animations rigides (une rigidité moins prononcé que le statique Xenoblade X), lesquelles décrédibilisent certaines séquences poignantes ou épiques. Le doublage japonais, excellent, parvient toutefois à garder l’attention du joueur, notamment lors de combats démesurés ou de révélations explosives. S’il n’est pas exempt d’incohérence ou d’un trop plein de deus ex machina, le scénario reste réfléchi, chaque séquence ou scène ayant son importance. Il serait aisé de croire que tout l’arc avec Bana – un riche Nopon d’affaires – ne soit que du remplissage, mais une fois toutes les pièces du puzzle en place on comprend alors l’importance de chaque personnage, de chaque action et de chaque retournement nouvel embranchements. C’est d’ailleurs le principal reproche que l’on pourrait faire au script du jeu, lequel préfère tout expliquer dans sa conclusion, à l’instar du passif des antagonistes.



« Nop ! » aux Nopons



Tous très réussis, ils se montrent bien plus intéressants que le groupe de héros. Aux motivations diverses, tous en arrivent à la même finalité : incapable d’apprendre de leurs erreurs, les peuples d’Alrest doivent être purifiés par une éradication totale. Face au danger, Rex et sa bande paraissent ridicules, tant le premier quart du jeu nous abreuve de situations où s’entremêlent plans volontairement sexy, moe et comique infantile. La progression aura beau améliorer la majeure partie d’entre eux, notamment Rex et Pyra, quelques récalcitrants sont à signaler ; Tora, une boule de poils mignonne mais sacrément perverse, suit à la lettre le caractère horripilant de ses confrères Nopons. On ne compte plus le nombre de fois où, épuisé à l’idée même d’apercevoir le personnage balancer ses lignes de dialogues, il ne passe son temps qu’à geindre, parler de bouffe ou de charme. Pire encore, sa Lame artificielle – Poppi – ne parvient même pas à rattraper le coup en terme de gameplay, obligeant le joueur à se farcir un mini-jeu rétro pour augmenter des capacités. Long, répétitif et peu amusant, ce dernier se révèle être la tâche la plus ingrate du titre.



L’Art de la Lame



À contrario, le système de combat est absolument génial, pour peu qu’on survive à son tutoriel géant. Assez compréhensible sur le papier, il est toutefois alourdi par des explications qui auraient gagné en clarté. Plus malheureux encore, une fois passés, les tutoriels disparaissent à tout jamais. Impossible de revisionner telle ou telle mécanique. La solution ? acheter des infos à un PNJ présent dans chaque ville. Non seulement l’idée même est stupide, mais en plus elle coûte chère. À quoi il ressemble ce système de combat, alors ? dans la forme, c’est du semi-automatique. Comprenez par là que les attaques de bases se font d’elles-même, à condition de ne pas se déplacer sur le terrain. Chaque coup recharge les trois compétences de votre Lame, qui une fois déclenchée apposeront sur l’ennemi l’élément qui la caractérise. S’ouvre alors un arbre d’éléments, dont chaque branche permet un combo différents. Pour infliger l’élément de la première branche, il faudra user d’une capacité plus puissante que celle de base (donc de niveau deux). Lorsqu’une capacité de niveau trois est activée, le monstre résiste à l’élément final utilisé ; une résistance caractérisée par un orbe gravitant autour de lui.



Élémentaire, mon cher Rex



Cette mécanique de Lame est la base même du gameplay. Le joueur devra contrôler un des trois héros, lequel possédera au maximum trois Lames. Il pourra également donner des ordres de combo aux deux autres protagonistes, eux aussi équipés de trois Lames. Chaque Lame apporte des bonus de caractéristiques à son porteur, en plus de posséder une classe qui lui est propre (tank, attaquant ou soigneur) ; les mélanges comme la spécialisation sont possibles, offrant une variété de builds jouables. Il est vivement conseillé de posséder plusieurs éléments différents pour déposer le plus d’orbes possible. Une fois la barre de Pilote pleine (une charge peut-être consommée pour relever un allié tombé au combat), il sera possible d’activer des enchaînements de Pilotes ; en utilisant le bon élément sur un des orbes, il sera possible de le briser facilement ce qui, la destruction une fois réalisée, donnera un tour supplémentaire d’enchaînement de Pilote. Les dégâts infligés sont alors multipliés jusqu’à plus de dix fois leur valeur de base, de quoi faire tomber comme des mouches les boss les plus puissants.



Vague à Lame



N’ayez crainte, face à ce torrent d’explications, Xenoblade Chronicles 2 prend son temps pour les inculquer. Il faudra ainsi patienter entre vingt et trente heures pour se défaire de cette sensation de tutoriel géant et profiter de la profondeur du système de combat, lequel se révèle extrêmement gratifiant une fois maîtrisé. Peut-être même le meilleur système de combat semi-automatique dans un JRPG, c’est dire. Dans le même ordre d’idée, le level-design se révèle brillant tant il est bourré de secrets et de lieux emblématiques. Il est possible de se repérer dans chaque zone sans ouvrir sa carte tant la construction des Titans est marquante. À vrai dire, il ne faudrait pas vraiment compter sur la mini-map, vieillotte de dix ans tant elle manque de clarté. C’est d’ailleurs toute l’ergonomie du titre qui a de quoi frustrer, tant il faut passer par une pluie de menus pour arriver enfin à accéder à l’option de son choix. La téléportation – une mécanique récurrente – en souffre tout autant que le sociogramme des personnages. Pour chaque bonus débloqué, il faudra absolument le visiter pour que ce dernier devienne effectif. Ne pas y jeter un oeil, c’est bloquer la progression des autres paliers de bonus. Ahurissant.



Le Choc des Titans



Au rayon des déceptions, il faut souligner les quêtes secondaires cantonnées une fois de plus à du Fedex sans âme et sans plaisir, le chara-design trop hétérogène pour afficher une unité crédible, le mode portable vous arrachant les yeux suivant la zone visitée, le clipping des décors et des ennemis (entraînant souvent une mort stupide ou des recherches de PNJ interminables), le loot s’éparpillant ici et là (et même dans le vide) ou encore la localisation française pas toujours très logique (pour ne pas respecter les noms propres japonais ?). Pire encore, les cris insupportables des personnages en combat. Quand il n’y a qu’un seul Pilote et sa Lame, ça passe ; quand il y a six binômes, on en ressort avec une vilaine migraine. Heureusement, le jeu possède une âme et un charme unique, notamment grâce à son impression de gigantisme, tant dans les décors que dans la direction artistique bluffante, la bande-son absolument dingue ou même dans ses ambitions pour une console comme la Nintendo Switch. Pour boucler le jeu en ligne droite, comptez entre soixante et soixante-dix heures ; pour faire la complète, comptez le double voire même le triple.



Conclusion



Techniquement trop gourmand pour la plate-forme, bourré de petits défauts qui frustrent plus qu’ils ne ternissent réellement l’expérience et lent dans tout ce qu’il entreprend, Xenoblade Chronicles 2 parvient toutefois à s’imposer comme un des plus grand JRPG de ces dernières années. Il faut dire que le soft possède un des meilleurs systèmes de combat semi-automatique à ce jour, un monde cohérent, un scénario bien plus profond qu’il ne laisse l’imaginer, des personnages forts, une direction artistique à tomber, une bande-son merveilleuse et un gigantisme à faire pâlir. Comment ne pas être soufflé par l’ultime chapitre, véritable claque qui mérite à elle seule le voyage tout entier. Bien sûr, avec ses relents de nekketsu et de moe, son aspect très chronophage, ses mécaniques complexes et la démesure qui caractérise tout ce qu’il entreprend, le titre de Monolith Software tombera des mains de certains. Assurément un jeu de niche, imparfait mais magnifique, il marquera de manière indélébile ceux et celles qui sauront faire abstraction de ses nombreuses tares. 7 sur 10, coup de cœur.

Kalimari
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le 31 déc. 2017

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