Peut-être ma plus grosse déception de l’année, A Plague Tale : Requiem (2022) fut une aventure nerveusement éprouvante tant le titre d’Asobo Studio accumule les tares au fil de la progression. Loin de m’imaginer avoir un avis aussi mitigé au départ, je partais sur un a priori extrêmement positif après la conclusion de A Plague Tale : Innocence (2019) que j’avais vraiment apprécié et noté 8/10 sur Sens Critique. Comme son aîné, on appréciera évidemment la direction artistique et l’exécution technique de Requiem, on ne va pas passer par quatre chemins, le jeu en met plein les rétines et je n’ai pu m’empêcher au cours de ma progression de prendre des dizaines de captures d’écran tant les panoramas du sud de la France sont magnifiques. S’il y a bien une qualité que l’on peut légitimement attribuer à ce jeu, c’est bien celui de faire voyager le joueur, de transporter ce dernier dans un univers médiéval diablement réaliste et parfois inquiétant : les nuées de rats grouillantes. Ces dernières sont toujours aussi impressionnantes visuellement et fatales à vos personnages si vous avez la maladresse de vous faire rattraper. Si la mise en scène des rats fait mouche, on déplorera toute de même le réemploi à plusieurs reprises (au moins 4 fois de tête si ce n’est plus) des courses poursuites scriptées. Cette répétitivité lassante est au cœur du problème de A Plague Tale : Requiem.

Mais passé l’émerveillement technique, la jubilation visuelle et graphique, on retombe de plusieurs étages sur des considérations moins optimistes, hélas. Premièrement, la BO d’Olivier Derivière n’a pas du tout retenue mon attention. Hormis le gimmick sonore annonçant l’assaut des rats (le son strident et inquiétant, caractéristique de la licence), tous les autres thèmes m’ont paru anecdotiques. Mais surtout, le pire du pire dans ce Requiem, c’est le rythme. Ça tire en longueur, ça s’étire, jusqu’à l’ennui. Les scènes de discussion interminables entre Amicia et Hugo m’ont lessivé. Cette durée étirée met en pleine lumière tous les défauts du jeu. Dommage, parce qu’un format plus resserré, disons 10 heures, aurait amplement suffi, côté gameplay comme côté récit. Combien de fois le jeu allonge artificiellement la sauce avec de longues marches et des dialogues ? Manette en main, c’est pauvre : on tient le stick vers l’avant (souvent sans pouvoir courir) et on subit des échanges tantôt intimes, tantôt dramatiques, qui n’apportent pas grand-chose parce qu’à la fin on en a marre de les entendre geindre. Personnellement, malgré tous les efforts des développeurs, je n’ai pas réussi à m’attacher aux personnages.

Vous l’avez compris, le titre est trop long pour ce qu’il raconte au regard de la pauvreté du gameplay. J’ai eu le sentiment qu’Asobo a voulu étaler le peu de confiture qu’ils avaient sur une tartine de la taille d’un terrain de football. On répète inlassablement ces phases d’infiltration insupportable en mode « Die & Retry ». Sachez qu’il est plus facile parfois de courir devant les ennemis pour atteindre le point de passage plutôt que de ce faire chier à infiltrer proprement… Voyez à quel point le titre est bancal ! Dois-je évoquer les phases d’actions ? Celles-ci sont à certains égards pires que l’infiltration avec des actions contextuelles totalement mal branlées et scriptées dans des combats au corps à corps que j’estime mal pensés et très mal exécutés. C’est approximatif, peu gratifiant et pas crédible pour un sou. D’où une gamine comme Amicia déboîte des cohortes de soldats entraînés grâce à une simple fronde ? Je sais bien que chercher la crédibilité et le réalisme à tout prix n’a pas de sens, après tout, je parle ici d’un jeu vidéo fictionnel, mais quand même les gars… La gamine se transforme en Rambo et tue tout ce qui bouge. On n’est pas sensé jouer deux enfants en fuite pour leur survie à la recherche d’un remède pour le petit Hugo ? Franchement !

Sans divulgâcher, et même si j’ai trouvé l’épilogue longuet, j’admets que les développeurs et scénaristes ont eu un certain courage à proposer une fin comme celle de Requiem. Honnêtement, je ne m’y attendais pas, je voyais une fin différente notamment parce que le personnage d’Amicia est campé de telle sorte qu’on s’attend à une fin particulière avec elle. Le scénario prend le contrepied des perspectives du joueur. Au final, c’est un excellent point et franchement, la fin m’a réconcilié avec le jeu.

En bref, A Plague Tale : Requiem m’a plus fatigué qu’ému. Oui, c’est superbe, certaines séquences claquent et les rats impressionnent toujours, mais un rythme pâteux et un gameplay répétitif/ bancal plombent l’ensemble. Je salue encore une fois l’audace de la fin, mais elle ne rattrape pas une aventure étirée bien au-delà de ce qu’elle a à raconter. À recommander aux curieux pour l’odyssée visuelle (de préférence en promo), ou à ceux qui aiment les balades narratives très lentes et peuvent fermer les yeux sur les ficelles de mise en scène. Pour le reste, je garde le souvenir d’Innocence… et je classe Requiem en déception correcte.

silaxe
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le 30 août 2025

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