Une folie artistique de génie dans la réinterprétation d'Alice

Succès littéraire et populaire, Alice au Pays des Merveilles écrit par Lewis Caroll au cours des années 1860, continue de fasciner les enfants comme les adultes. A tel point que l’univers rêveur de l’écrivain a été maintes fois adapté sur plein de médias depuis, comme le classique animé de Disney. Et évidemment ce qui nous intéresse ici, en jeu vidéo.


Néanmoins, le jeu Alice imaginé en 2000 par American McGee (game designer ayant travaillé anciennement pour Id Software, sur Doom et Quake) avec Rogue Entertainment et EA n’est pas tiré de la vision de Caroll. Mais McGee a sa vision à lui : celle d’un Pays des Merveilles ravagé, ayant sombré dans la folie de même que son héroïne, passant d’une fille rêveuse à une adolescente déterminée, badass et violente. 19 ans plus tard, est-ce que la vision vidéoludique et horrifique d’Alice par American McGee vaut toujours le détour en terme de direction artistique, univers et gameplay ?


Alice Lidell n’a pas été chanceuse dans sa vie. Après la mort de sa famille, brûlée vive lors de l’incendie de sa maison, Alice est la seule survivante mais elle en a grandement souffert, devenant folle et internée dans l’Asile de Rutledge. A partir de là, elle s’évade régulièrement dans son monde à elle, le Pays des Merveilles pour y suivre un mystérieux Lapin doté d’une montre à gousset, qui l’a contacté.


Hélas, le Pays étant dépendant de la santé mentale d’Alice, n’est pas dans son plus beau jour et est complètement ravagé par la folie, le désespoir et la mort. Avec l’aide du Chat du Cheshire, Alice devra tout faire pour retrouver la raison afin de se sauver, mais également restaurer le Pays des Merveilles, le tout en tentant de vaincre la Reine de Cœur.


Si le scenario reste assez classique et n’est pas aussi travaillé que lors de la cinématique d’intro en synthèse (magnifique à l’époque), l’histoire se laisse suivre durant les péripéties d’Alice, reprenant en globalité les récits du roman de Caroll, mais modifiés à la sauce McGee pour un résultat plus dérangeant. Pour un jeu de 2000, il n’était pas fréquent de voir un tel univers riche et original développé au sein d’un jeu vidéo, mais force est de constater que cela marche toujours aussi bien malgré l’âge conséquent du jeu.


Côté gameplay, si vous avez déjà joué à du Tomb Raider ou du Soul Reaver, nous allons y retrouver des mécaniques similaires de ces jeux d’époque. Alice se présente comme un jeu d’action – plates formes 3D classique à traverser les niveaux d’un point A à un point B. Le tout saupoudré de phases de plates formes et de combat, avec diverses armes qu’Alice obtiendra au fil de sa progression. Cela va de la célèbre Vorpal Blade (couteau symbolique d’Alice) au jeu de cartes ou encore les dés démoniaques.


Autant le dire de suite, le gameplay d’American McGee Alice, s’il n’est pas immonde ou aussi rigide qu’un jeu 3D de la génération 32 bits, on sent que les 19 ans n’ont pas fait du bien au jeu. Surtout qu’il vaut mieux y jouer sur la version PC (support pour lequel il a été pensé) au clavier souris, afin de pouvoir diriger Alice et viser précisément les zones de plates formes ou ennemis à la souris. La version console sur Xbox 360 et PS3, incluses dans la suite Alice Retour au Pays de la Folie, n’est vraiment pas ergonomique au pad.


Les phases de plates formes seront parfois frustrantes, Alice ayant tendance à glisser ou sauter lourdement, avec une perspective confuse des plates formes ou encore les bugs de collision.
De plus, les combats contre les divers ennemis du jeu n’arrangeront pas les choses, notamment ces fichus démons volants. Vous trouverez parfois quelques combats de boss assez stylés visuellement mais faciles à affronter.
Malgré la vieillesse du gameplay, si on s’accroche, le jeu donne envie de continuer rien que pour voir la variété des décors et situations créées par American McGee, qui sont toujours vraiment originaux, 19 ans plus tard.


Côté graphismes et direction artistique, on touche clairement au plus gros point fort du jeu et qui me donnait vraiment envie de continuer jusqu’à la fin de l’aventure. Tournant avec le moteur de Quake III Arena (l’Id Tech 3), on sent que le jeu a pris un coup question purement technique, notamment en termes d’animations ou modèles 3D de personnages.
Fort heureusement, les textures et décors vieillissent bien en globalité (surtout poussés au max et en bidouillant le 1080P sur PC dans le fichier de config du jeu) et ont une forte identité.


Pour 2000, rares étaient les directions artistiques léchées, originales et qui ne ressemblaient pas à ce que l’on voyait ailleurs. Rien que la Forteresse des Portes, l’Ecole, le Labyrinthe Majestueux ou encore la magnifique Cité monochrome avec les pièces d’échecs (mon décor préféré) valent clairement le détour.


La bande sonore s’intègre très bien dans cette vision cauchemardesque de la Alice de McGee : les musiques sont discrètes mais malsaines, les bruitages travaillés, et le doublage français de bonne qualité, notamment la voix FR du Chat du Cheshire que j’ai trouvée en accord avec son personnage.


Pour la durée de vie, comptez une bonne dizaine d’heures en mode normal. Ce qui je l’avoue, était parfois assez long car certains niveaux traînaient trop en longueur pour des conneries, surtout vers la fin du jeu. On sentait clairement que McGee n’en pouvait plus sur le développement.
Et cela se ressent sur le dernier monde du jeu (le Pays de la Reine de Cœur), car le jeu devient subitement trop bourrin, avec une tonne d’ennemis à l’écran et des zones encore plus relous à traverser sur les derniers niveaux, quitte à recycler certains décors et textures d'anciens levels en plus !


Il est à noter que AMA est un jeu assez difficile à trouver maintenant en version physique sur PC hélas à bon prix. Donc s’il vous intéresse, tentez d’y jouer sur la version Xbox 360 ou PS3 en achetant en promotion Alice Retour au Pays de la Folie sur le démat, vu que le 1er jeu est inclus en bonus sur ces consoles.


En globalité, American McGee’s Alice est un jeu PC qui est foutrement original et audacieux de la part de son créateur. Respect d'avoir créé une vision complètement adulte et malsaine du roman de Lewis Caroll.
La direction artistique est toujours de grande qualité malgré ses 19 ans, l’ambiance est excellente, Alice est badass et charismatique.


Hélas, le gameplay datant d’une autre époque, risque de faire péter un câble à bon nombre de joueurs impatients qui pourraient abandonner avant la fin du jeu, et ce serait compréhensible.Dommage que McGee n’ait pas mieux équilibré le gameplay et certaines zones, même à l’époque.


Car en l’état, c’est un fantastique voyage dans un Pays des Merveilles corrompu par la folie d’Alice, pour un jeu à l’ambiance unique et que l’on ne risque pas de revoir de sitôt (à part sa suite que je dois faire, le Madness Returns) , surtout sur cette génération.


Un jeu que j’ai vraiment beaucoup apprécié, en dépit de mes rages multiples sur le gameplay très vieux lors de certains niveaux et phases de plates formes.

NonoDudu31
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le 10 mai 2019

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NonoDudu31

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