Clair Obscur est d'abord un héritier, celui du JRPG de jadis qui, bien qu'encore vivace ces dernières années (on pensera à Persona 5, Dragon Quest XI ou Octopath Traveler), semble s'être globalement un peu perdu en optant pour des choix de gamedesign "modernes" et plus grand publique, nous offrant des jeux dignes d'intérêt mais sans le panache et l'éclat des sommets du genre. Le (premier !) jeu de Sandfall reprend le recette quasiment parfaite d'une structure classique qui fait l'équilibre entre montée en puissance narrative, enchaînement entre différentes régions qui arrivent à se renouveler dans leur bestiaire pour parfaitement mettre en avant le système de combat, ledit système étant sans doute l'un des meilleurs tour par tour de sa génération, exigeant puisque imposant d'esquiver et de parer (kom darque saoule) et gratifiant, puisque proposant une courbe de progression dans l'évolution de l'équipe et du challenge qui nous invite à aller de l'avant, pour en voir toujours plus.
Dans le cadre de son scénario original, il reprend là encore ce qui a fait l'âge d'or du JRPG; des "twists" et péripéties émotionnelles qui arrivent à point nommé pour créer un attachement puissant envers les protagonistes, pour un scénario et une révélation principale que je vais qualifier de convaincante, qui brille néanmoins davantage de part sa mise en scène que par son propos sur le fond, à mon goût.
Pour toutes ces raisons, Clair Obscur est là piqure du rappel de 2025, celle qui, espérons le, permettra à certains de réaliser qu'il n'est peut-être pas nécessaire de travestir tout un genre en le transformant par exemple en demi-BTA ou à d'autres, certains pour une raison que j'ignore, que le tour par tour est démodé. Le tour par tour des premiers temps peut-être (dont la dynamique se résume à attaquer/soigner) mais si à tout hasard vous sortez une PS2 avec un FFX ou un DraQue VIII : tout se passera bien.
Maintenant, un mot sur les médias et le retentissement médiatique (à l'heure précise de ces lignes, le jeu est le mieux noté sur Metacritic), une folie médiatique proche de l'hystérie collective : c'est très bien (et, dans une certaine mesure, sans doute sain) de s'enthousiasmer sur un grand jeu, mais pas au point d'en raconter n'importe quoi, à peu de frais et sans consistance : d'abord le jeu n'est pas sans défaut, et y'a quelques trucs assez pénibles comme l'absence de slot de sauvegarde, donc uniquement des save auto ou le level design qui a quelques errements, c'est pas toujours très maîtrisé, on a parfois l'impression d'un brouillon. Ensuite, plus grave, dire que c'est "Final Fantasy en bien" (en ayant bien sûr découvert la licence avec le 15), que c'est le meilleur RPG depuis 30 ans (en mettant son age dans sa bio twitter, qui indique une date de naissance qui correspond à la fin de vie de la ps3), ou dire avec aplomb que c'est enfin le retour du tour par tour depuis ff7 (si si, pas d'homme de paille, ça a bien été dit) : c'est un mélange entre review bombing positif (tout aussi idiot que le négatif), de mauvaise foi, et d'ignorance. Soucieux d'une certaine vérité et objectivité, on se doit de le dire.
Quoi qu'il en soit, bravo à Sandfall pour ce qui est, au minimum, un des grands jeux de 2025 (et probablement un des meilleurs jeux français de l'histoire), et prions que Expedition 33 fasse en sorte que les studios créateurs du genre reviennent à la raison (traduction : pour Dragon Quest XII, on se passera de combat en solo avec plein de combo à faire sur un gluant de mercure géant)