En cet été 2025, je viens d'avoir 33 ans (véridique). Je fixe au loin le monolithe, ce chiffre peint en son cœur, irradiant d'une lumière qui projette une ombre menaçante sur les derniers humains. De nombreux joueurs se sont déjà aventurés dans cette expédition, aucun n'en est revenu tout à fait indemne. Ce qu'ils y ont vécu les a marqués profondément, et ma curiosité a fini par l'emporter en dépit des dangers qui m'attendent. Il est temps pour moi de partir ; m'en sortirai-je sans rature ?
❤ Je jette un dernier regard à ce Paris de la belle époque, mourant petit à petit comme une flamme sur le point de s'éteindre. M'aventurer sur le continent m'a provoqué des frissons de peur au départ, mais très vite, ils se sont transformés en émerveillement. Ce monde baigne dans une mélancolie constante mais il éblouit par sa splendeur. Le jeu porte bien son nom : notre oeil est sans cesse attiré par les moindres couleurs, contrastes et formes que l'on rencontre. Ainsi, on explore autant pour progresser que pour contempler et la curiosité visuelle l'emporte souvent nous poussant à dévier du chemin. Chaque zone de type "donjon" possède également ses propres environnements uniques et immersifs, aux allures de toiles vivantes dans lesquelles on se laisse happer. C'est toute la beauté crépusculaire d'un monde semblant voué à disparaître qui transperce la rétine.
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❤ Je ne suis pas seule pendant cette expédition, je suis accompagnée par mes compagnons de fortune, ou devrais-je dire mes amis ? ou ma famille ? le lien qui nous unit dépasse ces concepts. La courageuse et jeune Maëlle, le protecteur Gustave, l'exigeante Lune, la lumineuse Sciel... les âges diffèrent et s'en ressentent, mais les conversations sont sincères et touchantes. Pas besoin d'en dire trop ; les regards, les silences et les expressions en disent long. Ces liens sont essentiels car ils sont tout ce qu'il reste aux humains pour ne pas juste survivre, mais vivre pleinement. C'est une vie à aimer... même si ce n'est qu'éphémère. Chaque personnage croisé, les bons comme les mauvais, sont des noms, des visages, des relations, des rencontres qui ne seront jamais gommés de mon esprit.
❤ Ces rencontres sont également marquantes par leurs voix et leurs émotions. Le casting français est exceptionnel (il en va de même pour la version anglaise de ce que j'ai pu entendre) et insuffle encore plus de nuances et de vie aux personnages. Le jeu est aussi un véritable voyage musical, dans tous les sens du terme. Les musiques sont somptueuses et transmettent toute la palette d'émotions vécue pendant notre périple. D'ailleurs, elles dessinent petit à petit les contours de l'histoire, mélangeant paroles mi fictives et françaises, et se transforment au fil des révélations. Puis enfin, elles se déploient, ouvrant le voile sur les mystères du scénario comme si le monde lui-même nous sentait enfin prêt à entendre sa vérité. Un conseil toutefois aux francophones : ne tendez pas l’oreille trop tôt (avant d’avoir joué, s’entend), au risque de ne pas être ravis.
❤ Cette histoire, dans toute sa tragédie, est cependant magnifique et est un véritable appel à la découverte de son lore. L'univers est constamment cohérent dans son parallèle avec l'art ; les Gestrals représentant des pinceaux, le nom de certains personnages, la chroma... mais de nombreux secrets restent encore obscurs et incitent à aller toujours plus loin. De nombreux indices parsèment les environs, dissimulés dans les journaux d’anciennes expéditions ou nichés dans des détails infimes. Cependant la vérité finit par tomber, et il est difficile de rester de marbre. C'est le genre de prise de conscience qui fait tout reconsidérer et clairement, les futurs parties ne seront plus jamais les mêmes. A défaut d'être gommés, on aimerait que nos souvenirs soient effacés pour redécouvrir le jeu comme la première fois. Mais il faut avancer... jusqu'à un choix crucial. Ce n'est pas tant un choix manichéen car si on observe bien, aucun n'apporte réellement d'issue favorable. C'est un choix qui nous demande d'assumer le poids des conséquences qui suivront, ce qu'apportera notre dernier coup de pinceau. Et c'est en cela qu'elle laisse une marque indélébile.
+/- Les combats ont été rudes mais construits sous forme de tour par tour comme j'aime tant, tout en restant dynamiques grâce au système d'esquives et d'attaques en QTE. Chaque ennemi rencontré a sa propre danse, ce qui ajoute une certaine touche ludique à l'apprentissage de leurs mouvements... non sans douleur car certains sont parfois confus et imposent de se prendre forcément des coups pour les comprendre. La parade, elle, reste également très exigeante en mode normal ce qui peut devenir aussi frustrant que gratifiant.
+/- Ces confrontations seront d'autant plus stimulantes grâce à l'acquisition de Pictos et de Luminas : au fil de l’exploration et de nos victoires, on débloque des compétences qui, une fois maîtrisées, deviennent passives pour l'ensemble de l’équipe. Cette mécanique ouvre alors un large champ d'expérimentation dans la composition de notre équipe et la gestion des combos à adapter selon le type d'ennemi. En revanche, l'interface dédiée manque de clarté au départ, et mériterait à être retravaillée pour une navigation plus intuitive.
+/- Il est facile de s'aventurer dans les différentes intersections des environnements, et la particularité de devoir nous guider sans carte est audacieuse. Cela nous pousse à ouvrir l'oeil et à scruter le cadre autour de nous, afin de ne rater aucun item important. Il est même assez amusant de repérer au loin un butin à récupérer et de chercher comment l'atteindre. Mais bien que le chemin soit structuré sous forme de couloir fermé, il n'est pas toujours évident de distinguer les surfaces franchissables car certains éléments du décors se ressemblent beaucoup. Le chemin principal quant à lui, n'est pas toujours bien esquissé ce qui oblige souvent à revenir sur ses pas de peur de manquer une voie annexe.
+/- L'exploration de ces terres affaiblies offre une liberté bienvenue, adaptée à la façon de jouer de chacun. Les adeptes de challenge pourront donc se confronter à de nombreux adversaires disséminés dans les zones. Quant aux plus contemplatifs, certains endroits leur accorderont des ballades bien plus apaisantes, faisant presque oublier le chaos environnant. Une chose me désole personnellement... ce dernier journal de voyage, juste derrière le dernier boss ultime de cet univers, et qui me semble hors d'atteinte... pour les amoureux de lore comme moi, c'est une déchirure, la dernière page de journal que je ne pourrais pas tourner.
✖ Aussi beau soit-il, il y a tout de même une ombre au tableau. Si les relations entre personnages forment le cœur du jeu, les romances possibles avec deux des personnages féminins, bien qu'optionnelles, semblent presque artificielles. Peindre l'amour certes, sauf si le geste manque de sincérité.
✖ Certaines zones prennent la forme de phases de parcours non obligatoires. Cependant, elles détonnent beaucoup trop avec le reste de l'univers, comme des couleurs débordant du cadre et brisant l'harmonie du tableau. La maniabilité étant de plus peu adaptée à ce type de gameplay rend cette expérience en un véritable défi mental. A côté, le gommage me semblait bien plus doux...
Je m'en suis allée vers le Lumi eternam. J'y ai trouvé beaucoup de tristesse et de désespoir, mais aussi cette force tenace qu'ont les humains pour savourer la vie tant qu'ils le peuvent. Comme le dirait notre cher Esquie : vivre c'est parfois du ouaiiiiiiiiiis mais aussi du bouuuuuuh. Et comme le clair-obscur, c'est la balance entre les deux qui rendent le monde si captivant. Est-ce un chef d'oeuvre ? Ce sera au reste des joueurs d'en décider. Ce journal en témoignera peut-être et je l'espère, vous guidera.
- Pour ceux qui viendront après.