Enslaved est la preuve même que pour faire un jeu accrocheur, beau et envoûtant sur cette génération, on n'a pas besoin d'investir des millions et des millions dans la production d'un jeu. Je ne vais pas m'étaler sur une très grosse tartine de texte, le jeu est court et ses qualités comme ses quelques défauts sont assez évidents selon moi.

Son nom l'indique très justement, Enslaved: Odyssey To The West est un véritable voyage, dépaysant au possible. Dans un monde post-apocalyptique dépeuplé où la nature a repris ses droits après une guerre dévastatrice, l'heure est à la contemplation. Ninja Theory nous emmène loin des clichés d'un monde ravagé, meurtri par la bêtise des hommes. Au contraire il rend ce monde beau, éclatant, d'un vert vif et du bleu azur de l'eau sur laquelle se reflète le soleil à son zénith. L'occasion rêvée pour profiter de panoramas assourdissant, telle une vue imprenable sur l'océan Atlantique du haut d'un Manhattan Bridge tronqué, dont la partie centrale seule émergée se tient là, debout, comme l'ultime vestige d'une humanité lointaine et révolue. Oui, Enslaved se veut contemplatif. A chaque nouveau décor, on fait tourner la caméra, dans un sens, puis dans l'autre, ne serait-ce que pour admirer le travail de fourmi effectué sur les environnements. Et si l'on pouvait croire que la cohabitation entre une faune robotique et cette ambiance sonnerait fausse, il n'en est rien. Le contraste se ressent, bien sûr, mais le mélange fonctionne, bizarrement, mais efficacement. Tout comme le duo de héros pourrait-on dire.

En effet, entre une espèce de bête sauvage relativement primitive au début de l'aventure et une jeune femme vraisemblablement douée d'une certaine intelligence, le binôme promettait d'être rude à gérer. Mais l'idée de l'asservissement de Monkey, le héros, par Trip, l'héroïne, vient pallier à ce problème de façon relativement brillante. De même que l'évolution des protagonistes, très nette en seconde partie du jeu, aide à construire des dialogues assez savoureux et à s'enticher du couple. Certaines répliques appuyées par des mélodies particulièrement tragiques et une mise en scène relativement sérieuses font d'ailleurs penser à un vrai jeu d'acteur de cinéma. Prenant donc ! Le motion capture avec ses expressions faciales retranscrites avec une précision chirurgicale fait son petit effet. Surtout lorsqu'il est accompagné des doublages très vrais des acteurs.

Quant à son système de jeu, Enslaved est sympathique. Il ne révolutionne rien, n'invente rien, mais reste entrainant de par les doses d'adrénaline qu'il arrive à fournir. Cela en partie grâce à ses musiques de combat bien percutantes et les assauts incessants des robots, déboulant progressivement par vagues de trois, quatre, cinq... Il nous propose son lot de petites énigmes, sa ribambelle de phases de plateforme, somme toute agréables. Cela étant dit, Enslaved brille tout de même dans ses phases de boss, certes totalement scriptées, mais parfaitement achalandées. J'en veux pour preuve le coup de génie du boss final, qui combine à la fois l'épique, le titanesque et des phases pré-déterminées bien huilées. Il y a même un petit air de Wild Wild West.

Enslaved accuse cependant un scénario assez lacunaire, ou du moins de peu d'intérêt, bien que les relations entre les protagonistes soient intéressantes. En plus de cela il fait l'erreur de la surenchère de phase inutiles comme "aller trouver quatre pièces pour le bateau", ce qui pourra facilement être retenu contre lui. Heureusement la fin brillante qui soulève quelques légers questionnements fort intéressants (l'asservissement peut-il être légitime ? C'était mieux avant ? Jusqu'à quel point peut-on laisser autrui vivre dans l'illusion, aussi agréable soit-elle ?) relève un peu le niveau du tout.

Finalement Enslaved vaut définitivement qu'on lui accorde sa chance, même s'il n'a pas de très grandes ambitions. C'est un de ces titres qui souffle un vent d'air frais sur la production actuelle. Mais il s'agit aussi et surtout d'un très beau voyage, en fin de compte assez humain.
DocElincia
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le 21 janv. 2012

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DocElincia

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