Souvent cité par les défenseurs de la PSP, lorsque celle-ci est critiquée pour son manque d'exclusivités, "Jeanne d'Arc" est symptomatique de ce qu'aura été la console portable de Sony pour les joueurs. Pour qui regarde de l'extérieur, ce jeu n'existe pas. Uniquement en anglais, jamais importé en Europe, représentant d'un genre qu'on pourrait facilement qualifier de niche (le T-RPG), qui plus est sur-représenté sur PSP, il aura été plus facile de complètement passer à côté de ce jeu que d'en avoir un quelconque écho.

Passé par la case import, le jeu reste malgré tout assez disponible pour qui sait écouter les fans du genre, et qui cherche à aller un peu plus loin que la livraison classique FIFA/PES de chaque fin d'année.

Jeanne d'Arc. Oui, Jeanne d'Arc, celle qui entendait des voix. Celle dont la vie s'est éteinte (huhuhuhu !) sur un bûcher à Rouen. Oh, on se doute bien qu'il ne s'agit pas tout à fait de la même, que quelques libertés seront prises avec la trame historique afin de ménager un suspense plus à même de parler aux joueurs en quête de rebondissements. En même temps, pour une fois qu'on évite les gros clichés de base du RPG japonais, ne boudons pas notre plaisir.

Il va donc falloir fendre du crâne anglais, ce qui, en soit, est déjà une belle promesse.

Hélas, trois fois hélas, on comprend vite que ça va déraper. Le premier combat, déjà, nous met aux prises avec des sortes de combinaisons improbables entre des sangliers et des humains (enfin, humains... des anglais, surtout) qui combattent à coup de hache et sont dérigés par des soldats au service du Roi d'Angleterre. Soit.

Le problème, c'est quand Jeanne d'Arc se transforme en super-gerrière que rien n'effraye, au cours d'une animation digne des meilleurs moments de Gigi. On comprend tout de suite qu'on aura finalement droit aux forces des ténèbres, à la lutte du bien contre le mal et tout ce qui s'en suit.

Bref, n'espérez pas réviser vos cours d'histoire à travers ce jeu, car à part les noms de lieu et de certaines personnes, je ne vois pas vraiment ce qui le rapproche vraiment des faits tels qu'ils nous sont relatés par les historiens depuis des siècles. Oh, ne vous en faites pas, il y aura bien des anglais et un bûcher, mais pour le reste, on navigue en plein n'importe quoi. Le summum est d'ailleurs atteint au moment où La Hire (un croisement entre un homme et un lion) s'étonne de voir parler une grenouille rose qui s'appelle Cuisses.

Je crois que je ne comprendrais jamais pourquoi c'est nécessairement ainsi dans le jeu vidéo. La guerre en soit est déjà quelque chose de lourd, de grave, de violent. Pourquoi vouloir y ajouter une symbolique forcée et déjà vue des milliers de fois. Je dois être trop vieux pour y jouer, finalement.

Passons. Un jeu vidéo n'est après tout pas qu'une histoire, notamment pour un T-RPG, genre qui repose tellement sur le système de jeu. Dans le cas de Jeanne d'Arc, aucune surprise, aucun caractère spécifique. On a entre les doigts une mécanique qu'on dirait issue d'un manuel du T-RPG pour les nuls. Le jeu au tour par tour, les sorts, la gestion de l'équipement, les équipiers à positionner et déplacer sur le champ de bataille, rien, absolument rien ne déroge ni ne dépasse des règles classiques. Alors, certes, tout est du coup super efficace et bien équilibré, mais c'est aussi sans surprise.

Le jeu aurait pu compenser ce classicisme total par une difficulté ardue, obligeant à tout maitriser sur le bout des doigts, à devoir faire et refaire certains combats 3, 4 ou 5 fois avant de trouver la bonne combinaison, la bonne tactique et ainsi s'améliorer. Mais non, le jeu est relativement facile et linéaire, et sans avoir à faire des combats hors de la trame scénaristique, on devrait pouvoir voir le bout de ce jeu sans trop de soucis.

Alors, avec tout ça, donner une note de 7 peut paraitre généreux. Certes. Mais en même temps, il faut avouer que la réalisation globale est bonne et qu'à mon sens, aucun problème technique n'est venu gâcher mon plaisir. Les graphismes sont fort sympathiques, les zones de combat sont plutôt bien pensées, jolies, variées, la navigation dans les menus, les déplacements des personnages, tout ça se fait sans le moindre accroc. Par ailleurs, si la difficulté est à mon sens mal dosée, on sent une montée en expérience, une vraie progression dans les capacités et dans la puissance des personnages qui fonctionnent bien.

Et en définitive, entre le confort de jeu, la réalisation globale et le sentiment d'avancer dans l'histoire sans regarder en arrière, on finit par se laisser griser et se laisser porter par un jeu qui sait remplir son rôle. Il le fait sans génie, dans le strict respect des codes établis par ses pairs, mais sans présenter de défaut rhédibitoire, avec un level design intéressant et un rythme maitrisé. Il le fait aussi à la manière d'un jeu de niche qui se voudrait grand public : loin de justifier l'achat de la console, il saura vraisemblablement captiver la majeure partie des joueurs en mal de temps de jeu sur PSP.
G_Savoureux
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le 19 mai 2012

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