Quand j'ai débuté Journey, je ne m'attendais pas du tout à ce type d'expérience de jeu. Lors du confinement, le Playstore permettait de recevoir des jeux gratuits, et c'est ainsi que j'ai eu celui-ci dans ma bibliothèque de jeux. Je n'y avais pas touché jusqu'à ce que l'une de mes meilleures amies me dise « J'ai commencé Journey mais je n'aime vraiment pas ». Intriguée, j'ai lancé le jeu. Pour ma part, ça a été une belle surprise. Comme quoi, les goûts et les couleurs !


Un univers mystérieux et onirique

Le début du jeu prend place dans un interminable désert. Nous jouons un voyageur masqué qui est capable de sauter haut quand son écharpe brille de mille feux. Au commencement, il est difficile de comprendre l'enjeu de l'histoire, alors on se promène, on avance, on teste des trucs. Il n'y a pas beaucoup d'actions possibles. J'ai très vite compris qu'il s'agissait d'un jeu dont le panorama prenait une grande place. Les décors sont magnifiques, immersifs et donnent envie de plonger dans le jeu. Ajoutons à cela la composition musicale d'Austin Wintory, et nous obtenons une épopée à la fois douce, intrigante et onirique.


L'enjeu du voyage

Le jeu est entrecoupé de petites illustrations animées nous montrant l'objectif du voyageur que l'on incarne. En effet, il a une quête, et elle est simple : atteindre une montagne. Pour ce faire, nous devons traverser le désert, des endroits sombres et lumineux, mais aussi des espaces enneigés. On comprend bien vite que le jeu base tout le sel du voyage sur le voyage en lui-même, non pas la destination. Ce but est présent dans l'histoire pour faire une allégorie aux rêves, aux objectifs : quand on se fixe un but, on fera tout pour l'atteindre, quitte à traverser un désert. Et, quand on arrive au bout, c'est là qu'on se rend compte de tous les changements qui se sont opérés en nous. Journey est un jeu qui se veut simpliste et ouvert à la réflexion. Il permet aux joueurs de l'aborder selon leur vécu, leurs émotions, leurs valeurs, leur vision de la vie. Comme le résumé l'indique, il s'agit d'une quête initiatique, tant pour le personnage que l'on incarne que pour nous-mêmes. Il peut aussi être interprété comme une allégorie à la mort, et pas seulement à la vie. Notre personnage peut se trouver dans une sorte de purgatoire, et la montagne peut tout autant signifier le retour à la vie ou le paradis. Si l'on continue sur celle lancée, nous pouvons aussi considérer qu'il s'agit de « l'avant-vie », comme dans le dessin animé Soul. La montagne peut représenter le début de la vie. Le voyage de notre personnage pourrait être vu comme la quête d'une personnalité propre, d'une pré-construction avant de plonger dans mille autres aventures. D'ailleurs, le design du pixar Soul, lorsque le personnage découvre le système de mentorat de « l'avant » m'a énormément fait penser à Journey. Je trouve que si l'on a vu le dessin animé et joué à ce jeu, nous pouvons considérer qu'ils se complètent, en quelques sortes.


Un jeu propice à la respiration en pleine conscience

Depuis que je me suis mise à la méditation, je remarque que l'on ne respire pas toujours en conscience. Pour ma part, quand je joue à un jeu calme, j'ai une respiration très posée. Si le jeu devient stimulant, stressant ou avec un poil d'action, bien entendu mes palpitations s'accélèrent. Vu que Journey est un jeu facile à prendre en main, à maîtriser et qu'il y a beaucoup de possibilité d'observation de paysages, il paraît évident que respirer en toute conscience pendant son expérience de jeu est possible. Et vraiment conseillé. Par qui ? Par moi ! C'est le meilleur moyen d'allier plaisir et détente. De plus, les musiques apaisantes qui accompagnent notre aventure permettent un vrai lâcher-prise. Il y a quelques moments un poil « stressants », quand on comprend qu'il y a des antagonistes sous forme de monstres. Notre respiration s'accélère pour redescendre assez vite après. Ces passages m'ont parfois un peu oppressée mais s'ensuivait souvent une suite plus calme, apaisante. Et puis que serait un jeu sans antagoniste ? Ce que j'ai apprécié, c'est que tout est sujet à interprétation dans ce jeu, même les monstres. Qui sont-ils ? Que nous veulent-ils ? Je les vois comme les doutes, les peurs, les blessures, tout ce qui fait obstacle à notre cheminement personnel mais qui, à la fois, permet de réfléchir. Sans ressentir la peur, comment l'identifier ? Les zones d'ombres font partie du voyage pour atteindre la lumière.


Simplicité et modestie

Concernant le gameplay, on ne va pas se mentir : c'est très simpliste. Nous n'avons pas beaucoup de possibilités hormis se promener et sauter. À la rigueur, nous pouvons de temps en temps cliquer sur une touche, mais sans plus. Au début, j'étais perturbée, je m'attendais à quelque chose de plus complexe. Pour les personnes habituées aux manœuvres, combo, etc, ce n'est pas un jeu qui vous plaira, en tout cas vous risquez d'être chamboulés les premières minutes. En ce qui me concerne, j'ai apprécié ce voyage, malgré sa simplicité. Le jeu se veut modeste, et ce gameplay dénué de superflu est un peu là pour nous dire « Eh oh, ce qui compte, ici, c'est le panorama, le voyage, la réflexion » ; il n'y a pas la place pour un gameplay plus poussé. Les angles de caméra restent bons, on peut se balader où on veut, sans limite de temps. Il est possible d'y passer des heures, rien qu'à se balader. Bien entendu, il y a une ligne conductrice, il faut suivre certains éléments qui paraissent évidents quand on y joue et qui permettent l'avancée de l'épopée. Cela apporte un côté déroutant au début car on ne sait pas trop ce qu'on doit faire. On apprend sur le tas. Un peu comme la vie... Malgré toutes les astuces que l'on nous donne sur la vie, il n'y a aucun moyen de comprendre comment elle fonctionne avant de l'expérimenter.


D'après Jenova Chen, le créateur de Journey, son jeu « s'apparente à une randonnée. Vous croiserez d'autres randonneurs qui pourront, si vous les appréciez, se joindre à vous » [source].


Un jeu pour tous les publics

Dans une interview, Jenova Chen a confié que son père de 70 ans avait testé son jeu, alors qu'il ne fait pas partie de ce domaine-là à la base. Il s'est même plutôt bien débrouillé ! Et c'est vrai que, pendant mon expérience de jeu, je me suis rendu compte que c'était un format accessible à énormément de personnes. Je pense que Journey peut plaire à tous les genres, tous les âges, que l'on soit fan de jeux-vidéos ou non, et chaque interprétation du jeu sera différente d'une personne à l'autre ! C'est ça qui est magnifique avec ce jeu. Et si l'on décide de faire un tour sur des forums, comme celui de jeuxvideo.com, on constate rapidement que des joueurs et joueuses ont partagé leurs visions de Journey :

— Boujean, 8 mars 2012 : « ​l'étoile dont tu viens repart pour retomber là où débute le jeu, je pense donc que le voyage est infini, un cercle, ça justifierai le nouveau périple possible »

— Anonyme, 12 avril 2013 : « C'est là que l'on entre en jeu, sous une nouvelle forme de vie, les êtres rouges. Les êtres blancs transcendés nous racontent l'histoire de leurs origines qui est aussi la notre puisque nous sommes une des âmes réincarnées des êtres blancs) et nous guident vers cette source au sommet de la montagne : sorte de pélerinage pour atteindre un niveau supérieur de conscience et au bout sortir du cycle de réincarnation et devenir à son tour un être supérieur comme eux (l'obtention de la tenue blanche, symbole de pureté, ne se fait qu'après avoir appris entièrement l'histoire de ces êtres blancs et en avoir tiré les leçons, pas vers la sagesse et l'élévation spirituelle). » [Cliquez ici pour en lire davantage]


Au final, dans cet article, vous n'avez accès qu'à mon interprétation, mes ressentis, mais c'est ce que je souhaitais partager, donc c'est cool. Si vous désirez explorer le jeu et vous faire des interprétations à vous, c'est le mieux. Il n'y a pas de réelle réponse, de vérité absolue, car la vie est faite d'incertitudes, de doutes, de réflexions. On avance en se posant des questions, tant que l'on espère pas des réponses claires car il n'y en a pas et il n'y en aura jamais. On suit le courant de la vie, naissant à un point A pour mourir à un point B. Notre but est de profiter de chaque magnifique moment entre les deux.


Grosso modo, Journey est un jeu indépendant créé pour remettre en avant le côté artistique du jeu-vidéo, parfois oublié dans les plus grosses productions. Avec simplicité et modestie, il permet aux joueurs et joueuses de se promener dans un univers onirique, utopique et merveilleux, en quête de soi et de la vie. Diverses interprétations existent sur ce jeu, il représente la métaphore de plein de choses, et je pense que c'est ce que souhaitait son créateur. Pour ma part, cette épopée apaisante m'a permis de respirer en conscience, m'évader quelques heures et me détendre. Et puisqu'il est tout public, j'en profite pour le recommander à tout le monde, que vous aimiez les jeux-vidéos ou non !

PapillonVoyageur
8

Créée

le 25 oct. 2022

Critique lue 7 fois

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