King's Field II
7.5
King's Field II

Jeu (1996PlayStation)

Exploration d’un royaume nocturne et mort depuis longtemps

Il y a quatre ans j’avais réalisé un de mes rêves de gamer en jouant à mon premier King’s Field (oui j’ai des rêves modestes) et j’avais expliqué dans une critique combien cette saga m’avait toujours attiré. C’est pourquoi cette année j’en ai continué la découverte en lançant le troisième opus. Troisième dans l’ordre japonais, mais deuxième à sortir dans nos contrées rappelons-le. Et c’est cet opus qui a d’ailleurs été probablement le plus culte pour les joueurs occidentaux qui l’ont connu tant, cette fois-ci, j’ai pu trouver nombre de forums, topics, wiki et discussions lui étant consacrés. Et je pense que ce foisonnement d’échanges indique deux choses : déjà que le jeu a été plus joué que son aîné comme je le disais, mais surtout qu’il est aussi typiquement un « jeu à wiki ». King’s Field 3 est plus touffu et chargé en mystères que son prédécesseur, du moins c’est comme ça que je l’ai vécu.


Le jeu marque une différence nette avec son aîné. Il est immédiatement plus vaste du fait de larges zones ouvertes en extérieur. Il est aussi plus éclaté. Oubliez le design réticulaire de l’île de Melanat du second opus – design fabuleux qui ne fonctionnait qu’en circonvolutions autour du hub central – ici les zones s’étalent. D’ailleurs tout familier des Dark Souls pourra faire le parallèle suivant.


Si l’île de King’s Field 2 faisait penser a posteriori au monde de Dark Souls. Interconnectée, compacte, pleine de raccourcis ingénieux.


Le royaume de King’s Field 3, lui, rappelle étrangement Dark Souls 2. Villages hubs éloignés les uns des autres, reliés par des labyrinthes souterrains éclatant en divers chemins vers de nouvelles zones.


Si bien que l’aventure en est différente. Là où les chemins de KF2 me faisaient sans cesse revenir sur mes pas, explorer des zones contiguës, KF3 m’a fait voyager à travers un royaume, m’a forcé à m’éloigner toujours plus loin de mon point de départ, et pour alimenter cette vaste exploration, il a donc multiplié les mystères.


Et je pense que le mieux pour exprimer mon enthousiasme sur ce jeu est encore de raconter comment se présentent ces mystères.


Même si vous n’y comprendrez rien et que tout ne sera qu’une succession de noms étranges pour vous.


Raconter par exemple que sorti du village de Quist, j’ai d’abord cherché les clefs de « Silviera » (fonctionnant comme celles de Rhombus de KF2) pour entrer dans l’Ancien Champs de Bataille et que ma quête, bien obscure à ce moment, était de trouver les quatre mages puis de mettre la main sur les bijoux d’Ichrius dont j’ignorais encore la fonction.


Raconter comment il m’a fallu me perdre jusque dans la Forêt de Varde avant de gagner la « Pixie’s Map » enfin un item qui faisait office d’automap – ce qui signifie que pendant un long moment j’ai avancé à tâtons, seulement à la mémorisation des lieux.


Raconter ce qu’ont été les explorations de la Cave de Shudom remplie de golems de pierre qu’un squelette géant me demandait de tuer afin d’ouvrir un passage vers la « Magician key ». Raconter l’exploration du Chemin de Poison, réseau sous-terrain impossible à traverser sans antidote et lieu plutôt étrange qui cache en son sein, derrière un faux mur, le temple d’Orladin. Ce temple qui, justement, nous fait comprendre après coup la fonction de ces étranges clés d’Orladin qu’on a ramassées plus tôt. Raconter enfin l’ambiance poisseuse et étouffante du Passage des Voleurs, un endroit rempli de squelettes décapités qui nous paralysent avec leur magie noire.


Bref ! Ce résumé bordélique pour vous dire que King’s Field brille par tout un tas de choses.


  • Sa rétention d’informations : on ne sait jamais où on est, ni où on va, mais en se perdant on finit par gagner des items dont on finira par comprendre la fonction à un moment ou l’autre – ou jamais ? (notez d’ailleurs qu’une des règles d’or des KF est de tuer chaque ennemi, car bien souvent les items essentiels sont gardés par des monstres quelconques, et les coffres peuvent se révéler vides, visiblement c’était là l’esprit un peu trollesque de From Soft à l’époque).
  • Son exploration méticuleuse : arpenter chaque couloir, deviner les faux murs, se souvenir des coffres d’abord impossibles à ouvrir dont on trouvera les clés plus tard.
  • Ce sentiment de vulnérabilité qui nous tient lorsqu’on avance trop loin, qu’on atterrit trop tôt dans un endroit dangereux pour nous.
  • Et enfin son ambiance morne, l’ADN de la série : chaque lieu est une ruine, chaque PNJ est esseulé, chaque forteresse l’ombre d’une gloire anéantie. On traverse tout cela dans une ambiance lente et sépulcrale, qui lorsque je jouais tard en étant fatigué, me faisait l’effet d’un rêve fiévreux.

Et la musique appuie cela. Celle du « Passage of Thieves » par exemple me filait la pétoche – l’endroit est vraiment terrifiant. Ou encore celle de « Cason » qui habille si bien l'endroit, village déserté où une armée de spectre nous assaille, là aussi une zone terriblement déprimante et nocturne.


Enfin lorsque j’ai rassemblé les bijoux d’Ichrius et formé un objet me permettant de me téléporter aux fontaines, m’a été donnée la fameuse Moonlight Sword. Mais elle était brisée et j’avais donc le choix de mener une quête optionnelle pour la réparer afin d’aller affronter Seath le dragon blanc et obtenir la bonne fin. Ce que j’ai fait.

Mais jamais je n’aurais pensé que cette quête cacherait autant de choses. Je vais être franc alors, c’est cette ultime mission optionnelle qui me fait mettre 9/10 aujourd’hui. En choisissant de réparer la Moonlight Sword j’ai dû plonger dans les liens obscurs érigés par le jeu et donc consulter des wikis pour m’y retrouver.


Me rendre aux Ruines des Haut Elfes, y trouver comment activer les portails pour dénicher un donjon secret : Le Lieu du Commencement. Explorer ses couloirs piégés pour y trouver le fossile des fées, et lier ce dernier à la Couronne Fantôme cachée à Verdite pour ensuite me rendre dans les tréfonds du Cimetière Royal, et y faire réparer l’épée par un Dieu déchu nommé Guyra.


Je fais exprès de lister tous ces noms étranges, car après tout King’s Field c’est ça. C’est précisément ça que j’adore. Une exploration constante de lieux singuliers et de connexions entre des objets énigmatiques, comme par exemple ce crâne appelé « Clé du Démon » dont on comprend la fonction lorsqu’au fond de son palais on trouve le squelette décapité d’Orladin avachi sur son trône.


Cette ambiance unique, cette lenteur sale, cette façon de nous défier non pas avec des combats mais avec une exploration opaque, mais aussi…de manière plus prosaïque…ces lieux aux textures granuleuses, cette distance d’affichage réduite qui rend chaque couloir sombre, cette nudité des décors, et la rigosité de ce gameplay. C’est tout ça qui me fascine et m’hypnotise dans King’s Field.


Moi qui adore déjà le concept même des dungeon crawler, je trouve que la série inventée par From Software en offre une version délicieusement envoutante et qui présentait déjà à l’époque tout ce qui fera plus tard la grandeur de celle des Souls.

-Alive-
9
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Créée

le 8 oct. 2025

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