Osez affronter la tragédie

En ce beau jour de juin 1983, dans le district de Shishibone, au petit village de Hinamizawa, les cigales chantent. Oh, à moins qu'elles ne pleurent, après tout, une tragédie vient d'arriver.
Mais retournons quelques temps en arrière s'il vous plaît. Au début du mois de juin, à l'arrivée de l'été, le jeune Keiichi Maebara emménage dans le village. Il intègre une école et se fait des amies très sympas avec qui il forme un club dont la principale occupation est de jouer à des jeux de société. Keiichi et ses amies s'amusent, ils jouent, donnent des gages plus ou moins tordus au perdant et tout, le monde est joyeux quoi. Sauf que voilà, un jour, Keiichi fait une découverte étrange, un journal relatant des faits quelques peu... sordides.
Mais que s'est il passé à Hinamizawa ?

C'est en gros sur ce plot que s'ouvre le Sanglot des Cigales (j'ai omis volontairement quelques détails, je ne vais pas raconter tout le prologue non plus hein), chef d'oeuvre de ces génies que sont Ryukishi07 et son frère. Bon le jeu est un Visual Novel, du texte avec des images et du son concrètement, je ne vais pas m'éterniser là dessus. C'est même plus précisément un sound novel puisque le visuel est minimaliste mais ne chipotons pas.
Et donc vous l'aurez remarqué, l'un des principaux attraits de Higurashi (son nom original au cas certains se demanderaient... ça va plus vite) c'est son mystère. Parce que le Sanglot des Cigales est un mystery-novel très très réussi. On se pose des questions tout le temps, le scénario distille les informations de manière à ce que le joueur (ou lecteur peut-importe) réfléchisse et se crée sa propre théorie sur les événements. Et nom de Dieu autant dire que pour ma part l'objectif a été atteint, et pas qu'un peu. J'ai pas arrêté de me demander ce qu'il se passait en tentant de trouver des réponses (et presque en vain même si j'avais deviné une petite partie des révélations). J'ai fini l'arc des questions d'Umineko il y a pas longtemps d'ailleurs et c'est encore plus poussé de ce coté là, absolument dingue.

Higurashi est constitué de deux parties, chacune composées de 4 tomes, pour un total de 8 donc (oui oui je suis fort en calcul mental).
Le premier arc est celui des énigmes qui pose tous les mystères du jeu (et c'est diaboliquement bien fait) tandis que le second est celui des réponses contenant donc les révélations sur tous les événements étranges s'étant produits à Hinamizawa.
Les deux arcs sont d'ailleurs assez différents quand on y pense.

Pour les premiers tomes, c'est un mélange entre du slice of life et du mystère/horreur. Qu'on se le dise, même si ce n'est quasiment que du texte, le jeu est quand même parfois terrifiant et sacrément malsain. En fait je crois que c'est le truc le plus flippant que j'ai fait de toute ma vie. Si on joue dans le noir avec un casque, l'immersion est parfaite, les musiques et bruitages mettent vraiment bien l'ambiance dans les passages sombres. J'ai aussi été traumatisé par un certain changement dans les dessins de quelques persos (si vous avez fait le jeu, alors vous savez TRES BIEN de quoi je parle).
On a le point de vue de Keiichi pendant à peu près tous les passages des trois premiers tomes (le quatrième n'est qu'un interlude il se déroule quelques années avant, donc pas de Keiichi) et on peut voir ses réactions (qui sont à peu près les même que nous en fait), c'est un point important qui a d'ailleurs été terriblement massacré dans l'anime au pasage.

L'arc des réponses, lui, fait moins peur en jouant plus sur l'émotion, un peu moins de tension donc, mais ça reste tout aussi réussi. Les musiques de cet arc sont également supérieures pour la plupart, à celles du premier (juste les musiques flippantes qui sont meilleures dans l'arc des énigmes je trouve).

Les personnages sont admirablement bien écrits, leur psychologie est vraiment très travaillée, ils ont tous leurs bons et mauvais cotés, ils sont attachants ou détestables selon les moments. On ne les oublie pas facilement en tout cas, ça c'est sûr. Leur chara-design est plutôt à chier par contre (je suis sûr que même moi je peux dessiner des mains mieux que ça) mais ça va, on s'habitue et les expressions faciales sont très bien retranscrites.

Autre point qui mérite d'être abordé, c'est que chaque tome raconte la même histoire, mais en changeant à chaque fois des détails ou même de point de vue dans la seconde partie. Ce qui change totalement l'histoire au final et permet de voir différentes facettes des événements et ainsi de pouvoir distiller quelques informations ça et là pour permettre au joueur de résoudre l'énigme (même si dans les quatre premiers tomes, c'est très dur de voir au delà du mystère puisqu'on ne nous montre que ce que l'auteur veut bien nous montrer, ce jeu est fourbe en fait).

Cela permet aussi de mettre les personnages dans des situations différentes, et c'est dingue de voir à quel point notre opinion peut changer sur eux. Un personnage qui nous semble très sympa dans le tome 1 peut se révéler être un enfoiré dans le tome 2 juste parce que sa situation est différente, que ses relations avec Keiichi n'ont pas été les mêmes dans les deux scénarios, etc...
Inutile de dire que ça marche aussi dans l'autre sens. Certains persos, qu'on croyait malveillants à un moment ne le sont pas en réalité... enfin peut-être que si ?
Et ça m'a personnellement beaucoup déstabilisé, plus le jeu avançait, plus je me demandait qui était de mon côté et qui ne l'était pas. Je devenais paranoïaque à chaque fois que je jouais au jeu d'ailleurs.

Pour finir parlons un peu du village de Hinamizawa quand même. C'est un point de l'univers qui fait fantasmer tout le monde visiblement, je ne serais pas aussi catégorique de mon coté (peut être parce que j'habite moi même dans la cambrousse profonde alors bon ça change pas trop de mon quotidien) mais ça reste un lieu très intéressant. Hinamizawa c'est le petit village de campagne où tout le monde connaît tout le monde et où tout le monde aide tout le monde dans le besoin. C'est le village où tu vas faire le con dehors avec tes amis parce que c'est cool et les gens te disent bonjout parce que comme je l'ai dit tout le monde se connaît et tout le monde est sympa. C'est le village où t'as envie de te balader, pour... tiens, aller déterrer des objets inutiles à la décharge, ça peut toujours faire plaisir à quelqu'un.
Oui, Hinamizawa possède un coté sombre, mais il y aussi ce coté qu'on voit en début de tome, cette joie de vivre, même si elle peut s'avérer un peu lourde (voilà le seul défaut du jeu à mon sens avec le niveau graphique) met quand même de bonne humeur . Les habitants de Hinamizawa, Rena, Mion, Satoko, Rika, Irie... On ne les oublie pas, oui je l'ai déjà dit mais putain ils doivent vraiment faire partie des meilleurs persos de fiction que je connaisse avec notamment Evangelion donc bon.

Euh, ça doit être à peut près tout, en espérant que si vous ne l'avez pas fait vous vous y mettiez un jour, car il vaut le coup, vraiment.
Je me rend compte que j'ai surtout parlé du jeu dans ma critique, pas trop de mon avis, sans doute répété beaucoup de choses qui avaient déjà été dites auparavant donc bon finalement le plus important c'est ça :

Higurashi c'est la vie. J'ai été terrifié devant le tome 1. Je me suis torturé l'esprit devant le mystère qui entoure Hinamizawa, mon cerveau a du exploser à la fin du tome 2. Je me suis senti mal pour Satoko dans le tome 3, et même pour tout le monde. Puis j'ai pleuré. J'ai chialé devant le destin des personnages, quand j'ai compris ce que signifiait les trucs écrits dans la boîte du Sanglot des Cigales R. J'ai chialé à la fin, puis j'ai crié au génie. Que pouvais-je faire d'autre ? Il est possible de se rebeller contre les lois régissant ce monde, mais là... Le destin a gagné, il est écrit et il restera écrit dans l'histoire de l'humanité que le Sanglot des Cigales = coup de maître.

Voilà, "même moi j'ai eu droit au bonheur".

P.S : Rika Best girl