Un propos bourgeois qui sonne creux

Je suis un peu toujours sous le choc quand je vis ce genre de jeu vidéo et je pense que seul le jeu vidéo et le jeu de rôle arrive à me faire ressentir de telles émotion. C’est à ce moment-là que tu sais qu'un jeu, ou même plus globalement une œuvre s'approche d'une certaine forme de "perfection", pas d'une perfection absolue mais d'une perfection dans ce qu'il a à proposer, dans le propos qu'il a mais aussi dans la manière de le raconter, càd la narration. Cette critique va spoiler à tour de bras car je me dois d’exposer ce qui fait que selon moi si Life is Strange est un bon jeu, ça n’est pour moi pas un grand jeu. Si je pense clairement que ce jeu est d'une intensité rare en émotion et que la qualité de la narration qu'il propose ne peut être correctement approché que par des enchainements de superlatifs, je pense aussi que le propos à la fin est un peu raté. Dans le sens ou ce qu'il fallait faire depuis le début, c'était... rien. Il fallait laisser mourir Chloë. Or un des propos fort du jeu pour moi jusqu'alors était que chaque choix compte, que chaque choix à un impact et que souvent les choix les plus juste sont aussi les plus difficile. Que choisir de faire le bien n'est jamais facile et qu'il est possible d'avoir un impact positif si on reste juste et ce même si on n’en voit pas toujours les effets directement. Notre propre cohérence interne est peut-être la chose la plus précieuse qui soit. Sauf qu'au final rien n'a vraiment été impactant sinon le dernier choix. Toute cette histoire se serait réglée toute seule d'elle-même Nathan butte Chloë, il se fait chopper il balance Jefferson et l'histoire se règle d'elle-même. Au revoir merci et bon week end !

Sauf que...

Je ne pense pas que mon analyse saurait être parfaitement complète sans ajouter que tous ces choix Max les as vécus, tous ces choix nous les avons vécus avec elle, on les a ressentis de manières fortes et profondes. Et ce sont tous ces choix qui poussent Max à accepter la mort de Chloë, qui nous pousse à accepter la mort de Chloë ... ou pas. Au final, l'expérience qu'on a vécue nous pousse à faire cet ultime choix qui au final représente la quintessence de ce qu'on aura vécu dans cette histoire. Donc même si ce choix est le dernier, tous les autres choix qu'on a vécu sont important car ils représentent un cheminement vers cette ultime décision. Du coup, à partir du moment, ou je formule cette réflexion c'est que ce jeu doit être de mon point de vue une franche réussite, une incroyable histoire dont le propos n'a d'égale que la narration et la richesse des personnages. Qu'au final ce qui est important c'est ce voyage avec des gens qui souvent "font au mieux" avec les armes qu'ils ont. Que ce qui est important ce sont ces gens complexes qui vivent des situations sociales parfois injuste mais souvent essaie de faire le bien ou qui sont emmenés bon gré malgré dans des situations qui les dépassent. Et je pense que ce jeu à réussit à capturer tout ça. Je pense aussi que ce jeu est un chef d'œuvre.

Et pourtant ...

Je ne peux m'empêcher de ressentir malgré toutes ces qualités une certaine amertume. Parce qu'au final Max aura évolué accepter la mort de son amie. Life is strange nous dit en creux que souvent notre évolution personnelle est une des choses les plus précieuses qui puissent exister et qu'accepter les choses et vivre avec est ce qui est parfois le plus juste à faire en l'état je peux être d'accord avec ce propos-là. Par contre, je ne peux accepter ce propos après tout ce que Max a vécu, je ne peux accepter ce propos alors que Max n'a pas arrêté de faire vouloir faire le bien et de se battre en permanence pour ce qui lui semblait juste pour tous. Je ne peux m'empêcher de voir ce propos entrer en contradiction avec son propre référentiel de valeur. Aider les gens compte ! Vouloir se battre pour eux compte ! Être gentil et sincère compte ! Et pas juste parce qu'au final on en ressortira grandit nous personnellement, mais parce que les gens valent la peine qu'on se batte pour eux ! Les gens valent la peine qu’on les écoute ! Parce que la gentillesse est en soi, en dehors de toute notion d'Ego, quelque chose de primordiale. Max n'aura jamais aidé Frank à faire son deuil. Max n'aura pas aidé Victoria à être une meilleure personne. Max n'aura pas aidé Chloë à voir la lumière au bout du tunnel et j'en passe... Non, et c'est même pire que ça dans le sens ou quelque part c'est sa gentillesse et son envie d'agir contre les injustices qui provoque la tempête. Je sais que le jeu veux parler de deuil mais en rendant cet éléments aussi central, tous les moments politiques de ce jeu se retrouvent en partie annulé par sa propre conclusion que je trouve, du coup, un peu bourgeoise. Ce que nous dit ce jeu c’est qu’au final, Max a aidé les autres, ce n'est pas grave si les autres ne s'en souviennent pas car elle au fond elle le sait et elle peut choisir de faire son deuil ou non... La lutte pour le bien serait donc inutile et le développement personnel serait l'alpha et l'oméga. Bien sur la fin est sublime et représente pour reprendre mes termes une forme de perfection dans la narration, c'est juste dommage que ça se fasse au détriment du propos parce que du coup ça sonne terriblement creux.