Limbo
7.5
Limbo

Jeu de PlayDead, Arnt Jensen, Dino Patti et Jeppe Carlsen (2010PlayStation 3)

C’était durant l’été 2010… Oui, cela fait bientôt dix ans que « Limbo » est sorti. C’était bien avant « Céleste ». C’était un an avant « Fez ». C’était quelques mois avant « Super Meat Boy ». Et l’air de rien, préciser tout ça, pour moi, c’est loin d’être anodin. Parce qu’après l’avoir quelque peu tâté au moment de sa sortie chez un ami, le hasard m’a remis ce « Limbo » dans les pattes, en mars 2019. Et – c’est fou – mais ce jeu n’a pas pris une seule ride. Malgré le fait que, depuis sa sortie, la scène indé ait pris son envol et que le platformer 2D soit revenu à la mode, « Limbo » garde ce caractère original, inventif, maitrisé et incroyablement bien dosé qui fait toute sa force, pour ne pas dire toute son identité…


Parce que oui, moi c’est bien tout ce que je retiens de ma récente expérience avec ce jeu. Dès le départ il sait poser une ambiance (sublime d’ailleurs). Il sait poser un gameplay simple et instinctif. Mais surtout il sait poser très intelligemment les bases de son gamedesign qui est – l’air de rien – très culotté pour son époque puisqu’il s’agit d’un gamedesign basé sur le « die and retry ». Alors oui – c’est vrai – « Limbo » ne se limite pas seulement qu’à ça. Ce n’est pas un « Super Meat Boy » ou un « Celeste ». Il y a aussi un côté « puzzle game » / réflexion qui est loin d’être anecdotique. Mais seulement voilà, la plupart des énigmes posées dans ce jeu sont quand même souvent basées sur le fait de devoir trouver la séquence de mouvements adéquats à accomplir afin d’éviter de voir notre pauvre petit avatar se faire trucider ou saucissonner dans l’instant. Essayer. Mourir. Réessayer. Mourir à nouveau. Apprendre… La séquence classique d’un « die and retry » en somme. Sauf que, contrairement à un vieux jeu Infogrames des années 1990 où les pièges avaient été pensés comme inévitables pour nous ralentir artificiellement dans la progression, dans ce « Limbo » aucune mort n’est réellement punitive. On n’a pas à se retaper dix minutes de niveau avant de retomber au moment coton où la mort nous attend à bras ouvert. On repope tout de suite au moment où on a fauté. On réessaye dans la foulée. On apprend… Et ça pour le coup c’est malin.


Alors c’est vrai qu’après être passé par les cases « Super Meat Boy » ou autre « Celeste » on trouve ce concept normal. Sauf que pour ma part, en 2010, je n’avais jamais joué à un jeu comme ça. Et malgré le fait d’être passé par « Celeste » avant de redécouvrir ce « Limbo », je dois bien avouer que ça ne m’a pas empêché de profiter de ce travail d’orfèvre. Ce jeu est tellement cohérent avec lui-même que je ne vois pas comment on ne pourrait pas y adhérer, même aujourd’hui. C’est progressif sans jamais se répéter. Il arrive à poser des mécaniques nouvelles mais sans jamais nous égarer. Il complexifie sans cesse sa démarche sans jamais rompre avec la logique d’ensemble.


Et ce qui est fou c’est que sa structure est tellement efficace que j’en viendrai presque à oublier de vous parler de ce qui m’a fait pourtant (re)venir initialement vers ce jeu : son univers. Pourtant il est loin de se limiter au simple rôle d’appât. Tout du long de l’aventure, la découverte de cet étrange endroit participe clairement à l’immersion. Bref tout marche. Et ça marche tellement bien que je pourrais même me demander pourquoi je n’ai pas attribué à ce jeu la note ultime de 10/10…


Eh bah je pense que ça tient à pas grand-chose, mais que ça tient quand-même à quelque chose qui n’est pas anodin : sa fin. Oui, ce serait sûrement le seul bémol que je ferais à ce jeu : sa conclusion a un aspect inabouti. Qu’il s’agisse aussi bien de l’histoire comme du gameplay, la fin m’est tombée dessus sans que je m’y attende et j’ai clairement eu l’impression que tout s’arrêtait avant d’être arrivé à une sorte de paroxysme final.


(Alors certes, je n’attendais pas forcément de boss ou bien encore de résolution à l’histoire, mais je ne peux m’empêcher de me dire que ça aurait un moindre mal en comparaison de ce final là.)


Alors après, je comprends la démarche qui consiste à laisser sa part de mystère à l’univers « Limbo ». Elle a du sens. Elle ne gâche pas non plus le jeu. Mais elle ne laisse pas le joueur avec une impression d’achèvement qui est pour moi au cœur de mes énormes claques de joueur. Mais bon, après ça ne retire rien à la qualité de cette expérience. « Limbo » est un jeu qui, à mon sens, a su marquer son temps ; à su inspirer des successeurs et qui surtout saura marquer les esprits. A défaut de chef d’œuvre, n’est-ce pas là malgré tout la marque d’un très grand jeu ?

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