Dans la marée des remakes qui sortent en ce moment, je qualifierais MGS3 de candidat moyennement pertinent. D'un côté, il est certain qu'un jeu d'infiltration assez vieux pour ne pas voter Bayrou pourrait bénéficier de deux décennies d'avancées techniques, que ce soit en terme d'IA, de level design ou de mécaniques. De l'autre, cela est vrai pour n'importe quel jeu, et ne justifie pas artistiquement de revisiter un titre plutôt que d'en faire un nouveau. Et si MGS 3 est assez daté (sur certains points, depuis sa sortie), il reste une expérience qui survit au temps dont la technique n'empêche pas la proposition d'être correctement exécutée. Il y avait quand même de belles choses à faire avec une réactualisation.
Qu'importe, au final, puisque le jeu est strictement le même en dehors des graphismes et des contrôles. La principale opportunité légitimant l'existence de ce remake (et son prix) a été balayée au nom de la fidélité (quoi ? Flemme ? Mais non). J'admets toutefois que ces nouveaux contrôles donnent initialement un nouveau souffle à l'expérience. Mon principal reproche envers Snake Eater/Subsistence était sa propension à décourager l'expérimentation et l'exploration des systèmes. Les nouveaux contrôles, permettant des mouvements plus souples, ont rendus pour moi le jeu un peu plus propice à l'exploration et la créativité, qui reste malgré tout tout à fait marginale dans une boucle de gameplay centrée autour des headshots de tranquillisants et du camouflage.
On se rend malheureusement très vite compte que cette concession à la modernité ne fut pas implémentée avec tout le soin nécessaire. Que le personnage soit encore plus rigide que certains jeux sortis il y a vingt ans, passe encore, mais ce système de couverture automatique, un peu hasardeux, qui vous force à sortir d'un couvert en vous déplaçant pour attaquer un ennemi, l'impossibilité de changer de position si vous êtes immobile ou le système de mise en joue d'un ennemi à terre qui marche une fois sur deux, entre autres cafouillages, gâchent un peu la fête et ternissent le seul apport de gameplay de cette mouture.
Mais le principal argument commercial réside bien sûr dans les nouveaux graphismes. Même ici, le boulot est bâclé. Avoir un jeu aussi mal optimisé et buggé est déjà problématique, mais qu'il le soit dans les zones minuscules du jeu de base est absolument ridicule. Quand bien même cela fonctionnerait correctement, j'ai du mal à voir l'intérêt. Certes, la jungle est plus riche visuellement, mais étant donné les zones toujours aussi étriquées, j'ai pas trouvé l'exploration beaucoup plus immersive. Seul le passage dans les montagnes, au panorama réussi, a représenté une amélioration nette pour moi. Les cinématiques ont quant à elles carrément souffert du changement. Le rendu initial était très satisfaisant, et le côté moins réaliste faisait mieux passer le burlesque de certaines scènes et les mouvements exagérés des personnages. Foutre des graphismes photoréalistes dessus ne sert qu'à faire sombrer la moitié des personnages dans l'uncanney valley (les animations faciales paraissent même plus rigides qu'en 2004) en perdant en cachet au passage.
Reste Metal Gear Solid 3 sous la nouvelle peinture. Un chouette titre, capables des plus belles fulgurances (Ocelot est toujours aussi fantastique) comme de moments assez pénibles, comme ces scènes d'exposition maladroites, redondantes, interminables et battues dans l'ennui seulement par le technoblabla de MGS 4. C'est aussi un jeu d'infiltration plutôt solide, que j'ai jamais trouvé incroyable mais dont quelques idées permettent de nettement le distinguer. Tout cela est vrai pour Delta, mais ça l'est aussi pour les autres versions.
Difficile de voir en Metal Gear Solid Delta autre chose qu'un ratage fainéant doublé d'un sacré foutage de gueule. Il fait trop peu et trop mal pour justifier non seulement son existence, mais aussi le prix aberrant auquel il est vendu. Caché sous le fade écrin de l'Unreal Engine 5 reste toujours le charme du jeu d'antan, que même cette exécution branlante n'a pas réussi à effacer. C'est pas faute d'avoir essayé.