Metaphor: ReFantazio
7.6
Metaphor: ReFantazio

Jeu de Studio Zero et Atlus (2024PC)

L’ivresse d’un grand banquet… jusqu’à l’écœurement

J’ai longtemps hésité à me lancer dans Metaphor ReFantazio. J’étais un peu méfiant à l’idée de retomber dans un Persona déguisé avec des elfes et des épées. Franchement, bonne surprise. Atlus recycle sa formule, oui, mais cette fois ce n’est pas un simple reskin. C’est une vraie transposition, honnête et inspirée, de ce qu’ils savent faire de mieux dans un monde heroic fantasy qui tient solidement debout.

Aujourd’hui pourtant, le jeu me tombe des mains. Et c’est la deuxième fois que je décroche. Je sens que je suis proche de la fin, que tout s’accélère, mais je n’arrive plus à m’accrocher. Il y a des raisons concrètes que je vais développer, mais aussi cette sensation que j’ai parfois avec les RPG : suis-je celui qui change, ou les dev' qui ne savent plus doser ?

Probablement un peu des deux, ou alors c'est encore plus profond que ça, comme j'ai pu m'aider à le découvrir à l'écriture de ces quelques lignes...


Il y a eu des moments où j’étais totalement pris dedans, absorbé, incapable de m’arrêter. Puis d’autres où je restais devant l’écran titre, sans envie de lancer la partie. Le trop finit par étouffer l’envie. Comme un banquet où tout est délicieux mais où, à force, on rêve juste d’un simple et efficace.

L’introduction illustre bien cette idée. On sait qu’Atlus aime les débuts lents, mais là, on atteint des sommets. C’est probablement l’intro la plus longue que j’aie vue dans un RPG. Pourtant, c’est difficile de leur en vouloir. L’univers est dense, les mécaniques complexes, le contexte politique riche. On est jeté dans un chaos crédible, dans une course au trône, avec une gestion du temps, des missions en cascade, une progression sociale et martiale à faire évoluer.

C’est vertigineux.


Plus en détail maintenant...

Sur le papier, les combats sont un vrai régal. Le système est complet, malléable, personnalisable. Mais passé un certain cap, on retombe dans une routine, les mêmes combinaisons de touches, les mêmes patterns. Et quand un nouveau donjon s’ouvre avec les éternels gobelins ou loups recolorés, difficile de ne pas soupirer. Certaines classes sont clairement moins utiles que d’autres, et la progression devient un long couloir sans trop de surprise.


Heureusement, quelques trouvailles mécaniques méritent d’être saluées. Le gameplay mélange les codes de Persona et SMT, avec une légère touche de temps réel avant les affrontements. Mais le cœur du système reste du tour par tour exigeant et gratifiant. Mention spéciale à la fonction qui permet de relancer un combat à volonté. Parfait pour chercher les faiblesses des ennemis et rendre les affrontements plus stratégiques sans perdre de temps.

Le système d’Archetypes m’a agréablement surpris. Ils sont bien moins nombreux que les Personas, mais l’expérimentation est encouragée et récompensée. On peut transférer des sorts d’un Archétype à un autre, tester des combinaisons d’équipe, puis affiner par personnage. Moins flou que dans d’autres titres du studio, moins dépendant de l’aléatoire.

Une vraie réussite!


D'ailleurs, j'ai eu la surprise de décourvrir qu'au delà des synergies de groupes, on peut aussi faire des synergies sur des personnages, en combinant leurs divers apprentissages et j'ai trouvé ça grisant vers les dernières heures. Pour une fois dans un J-RPG, la progression et la monté en puissance ce fait d'une manière bien plus originale que prévu!


Mais cette richesse se paye...

À force de personnaliser, optimiser, paramétrer, les heures défilent à une vitesse folle.


La durée de vie impressionne, mais elle finit par user.

J’ai vraiment senti le coup de fatigue dans le dernier tiers. L’intrigue, pourtant bien posée au départ, commence à tirer sur la corde. Les retournements deviennent prévisibles, les émotions sont surjouées, et la finesse du début laisse place à des coups de théâtre un peu grossiers.

C’est dommage, car le monde qu’on parcourt est passionnant. L’univers est dense, les tensions politiques palpables. Les personnages ne sont pas révolutionnaires, mais ils existent vraiment. Et les liens sociaux, même s’ils ne sont pas aussi profonds que dans un Persona, offrent de vrais moments de répit et d’humanité. On sent qu’Atlus a voulu proposer quelque chose de plus intime, sans tomber dans le pur cliché.


Donc pas désagréable à parcourir en sommes. Mais comme vous pouvez le constater, c'est très dur d'en parler de manière bien plus courte. Tous comme pour ce qui est de l'enrobage graphique...

Au début, l’interface m’a dérouté. Trop d’animations, trop de boutons, des couleurs criardes... Très loin de la sobriété de Persona 5. Mais avec le temps, les menus deviennent un vrai terrain de jeu. On finit par tout maîtriser, à naviguer presque avec plaisir, à se perdre volontairement dans les détails. Les écrans de fin de combat et les raccourcis bien pensés participent à cette sensation d’aisance progressive.

Là où Persona 5 est un coca bien frais, les menus et la navigation de Metaphore a quelque chose de plus adultes et plus agréable, si et seulement si, on passe du temps à l'apprivoiser, presque comme un bon vin?


Visuellement, je ne suis pas difficile. Oui, les textures sont datées, les modèles un peu rigides. Pourtant, l’enrobage est agréable. Certains lieux sont vraiment mémorables, et même si les donjons sont répétitifs, les villes, elles, ont une vraie âme. La direction artistique, entre steampunk, rétro 70’s et médiéval baroque, peut diviser, mais elle a une identité forte. Et ça, j’aime.

Les musiques m’ont totalement embarqué. Le mélange des genres fonctionne très bien, entre chœurs religieux, nappes planantes et jazz discret. Certaines pistes tournent encore en boucle dans ma tête. Il y a un vrai souffle mystique dans la composition. Originales, variées, habitées. J’ai même ajouté quelques titres à mes playlists perso.


J’ai aussi aimé ce souffle nouveau dans l’approche. Sortir des fins du monde étouffantes de SMT, des néons cybernétiques de Soul Hackers, ou des ados lycéens de Persona, ça fait du bien. Enfin une fantasy japonaise qui ose sortir des sentiers battus, même si tout n’est pas toujours bien tenu. L’effort est là, sincère, parfois brouillon, mais jamais trop cliché.


Bref... Je ressors partagé.


Ce jeu a toute mon estime, mais aussi toute ma fatigue. Il ne m’a pas lassé par sa facilité, non. C’est plus subtil. Peut-être qu’il m’a tout donné trop vite, ou qu’il s’est un peu perdu en route. Je suis persuadé que s’il avait été deux fois plus court, il aurait été plus marquant, plus incisif, plus fort.


Je le recommande malgré tout. Pour sa richesse, ses mécaniques, son univers. Mais je ne suis pas sûr d’avoir eu l’énergie de lui consacrer cent heures. Il a l’ambition d’un Elder Scrolls, mais sans les mécaniques de liberté totale. Il nous enferme dans un calendrier, nous force à faire des choix lourds. Je trouve ça fascinant, mais épuisant.

Et pourtant, si Metaphor 2 est annoncé, je serai là. Pas au premier jour peut-être, mais curieux. Parce qu’il y a une vision derrière ce monde. Il manque juste un peu de souffle narratif, un peu de taille dans le gras, et il pourrait devenir une œuvre majeure.


Ce jeu m’a aussi fait réfléchir sur la différence entre RPG occidental et J-RPG. Les premiers cherchent une immersion réaliste, les seconds préfèrent des systèmes plus clairs mais plus stylisés, plus originaux, voir plus "arcade". Metaphor flotte entre les deux. C’est long à comprendre, rapide à maîtriser. Et c’est peut-être ce qui m’a tué. La courbe de progression est trop tôt domptée et les futurs défis ne se font plus que sur les boss, donc toutes les 5h à 10h? Puis entre temps, on s'ennui un peu...

Malgré ça, je le respecte. Je le conseillerais sans hésiter à celles et ceux qui ont le goût de l’exploration, de l’optimisation, et de la patience. Moi, je n’en avais peut-être pas assez cette fois.

Il y a du génie là-dedans. Mais il faut accepter d’en payer le prix et je n'ai pas assez de temps et aujourd'hui plus assez de temps à consacré à un jeu si long, avec si peut de choses qui vont me tenir en haleine.

KumaCreep
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il y a 1 jour

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Anthony

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