Pokémon Diamant
7.3
Pokémon Diamant

Jeu de Game Freak et Nintendo (2006Nintendo DS)

Difficile de prendre une marque aussi prolifique que Pokémon au sérieux. Peluches, dessins animés, jeux de cartes, et bientôt film live, tout y est passé ou presque. S'il semble désormais évident que l'idée des monstres de poche est un coup marketing de génie, il ne faut pas oublier ses objectifs initaux, et qui en est le créateur. C'est pourquoi il est nécessaire de revenir aux racines du projet, afin de comprendre pourquoi il a tant marqué les esprits.


Le conte pour enfants a une fonction très importante car il l'éveille et attise sa curiosité. L'enfant veut devenir le guerrier du temps et vaincre le tyran Ganondorf pour ramener l'ordre et l'équilibre, veut aller à l'école des sorciers car la vraie école est ennuyeuse et inadaptée, apprend à se méfier du loup, ou encore apprend à se défaire de l'autorité parentale pour devenir dresseur de dragons plutôt que de les chasser. Ainsi, arrivé à la difficile transition de l'adolescence à l'âge adulte, il doit choisir entre être une autre fourmi ou poursuivre ses rêves. C'est pour cette raison que des contes pauvres tels qu'Alita: Battle Angel ou des réécritures malintentionnés de contes classiques peuvent être très nocifs non seulement pour l'individu, mais aussi pour la société. Même si dire que tous les problèmes du monde viennent des mauvais contes serait exagéré.


Quel rapport avec Pokémon et les contes ? C'est que la série de J-RPG en est un. Si l'on en croit Wikipédia, l'idée des monstres de poche serait venu à Satoshi Tajiri de sa passion étant enfant pour la collection d'insecte. Comprenant la difficulté des plus jeunes à s'adapter à un monde post-industriel (rappelez-vous, Soichiro Honda a vu l'électricité s'installer dans son village alors que sa jeunesse était déjà bien entamée), il imagina un jeu leur permettant d'évacuer leur stress et de développer leur imagination et leur curiosité.


L'objectif de Pokémon n'est pas de faire s'affronter des créatures sauvages braconnées dans des combats à mort lucratifs. L'objectif est de partir à la découverte d'une région afin de remplir son pokédex, un ordinateur portable enregistrant les données des pokémons rencontrés pour aider un mentor dans ses recherches et ainsi faire avancer la science. Certes, devenir le champion de la Ligue Pokémon entraîne le générique de fin, mais le jeu n'est véritablement terminé qu'une fois toutes les espèces de pokémons rencontrées. Durant ce voyage, le jeune dresseur découvre les cultures locales, trouve des objets cachés, explore des cavernes, se fait des amis, et crée des liens forts avec ses monstres. Il croise également la route de criminels mal habillés cherchant à accomplir des actes... criminels mais partant souvent d'une intention louable en maltraitant les pokémons et en pensant pouvoir plier les monstres légendaires à leur volonté, qui finissent par échouer et les conséquences catastrophiques de leurs actions (ici dans Pokémon Diamant, le temps est arrêté par Dialga) leur font reconnaître leurs erreurs et disparaissent de la route du jeune dresseur, ou même deviennent ami avec lui.


Si la structure narrative est certes très réussi pour un enfant, Pokémon reste un jeu vidéo, et se doit donc de proposer un gameplay intéressant. Ce qui tombe bien, car il n'est pas simplement intéressant, il est révolutionnaire.


Pokémon est donc un J-RPG. Le joueur est invité à parcourir un monde vaste afin de suivre une histoire linéaire (c'est une remarque, pas une critique négative) et de participer à des combats au tour par tour. Cependant, le genre est réputé pour préserver des mécaniques archaïques qui nécessiteraient un sérieux remaniement. Pokémon balaie ces défauts avec beaucoup d'intelligence. L'un des principaux reproches faits aux J-RPG sont l'interruption répétée de la progression par des combats au tour par tour répétitifs. Ici, le fonctionnement des combats a été remanié. Chaque monstre a un ou deux types et des statistiques de combat (attaque, défense, vitesse, etc) différents, chacun ayant ses forces et faiblesses. Par exemple, un pokémon de type combat sera efficace contre le type roche, et beaucoup moins contre le type psy. De la même manière, le type insecte sera efficace contre le type plante, et beaucoup moins contre le type feu. Chaque faiblesse est déductible logiquement (le feu faible à l'eau relève du bon sens commun), et il devient nécessaire d'optimiser son équipe pour vaincre des dresseurs plus forts. Par exemple, avoir un pokémon acier, type avec le plus de résistances du jeu, avec beaucoup de défense, et compenser ses faiblesses avec un pokémon sol ou vol ayant beaucoup d'attaque et de vitesse. Sans parler des objets, des types d'attaques ou encore des EV. Avec autant de richesses, les combats peuvent ainsi devenir très difficiles et passionnants, surtout contre d'autres joueurs.


Reste le problème des rencontres aléatoires cassant le rythme de l'aventure. Une idée très simple pour remédier à ce problème: le repousse, un objet qui se consume au bout de plusieurs pas mais qui chasse les pokémons sauvages. Et quand bien même le joueur n'aurait pas de repousses, le jeu encourage ces rencontres aléatoires puisque sans elles, la complétion du pokédex serait compliquée. Et si ces séquences sont parfois nécessaires pour farmer ses monstres, le jeu récompense cette tache pénible non en rajoutant quelques points supplémentaires dans une statistique au hasard, mais en les faisant évoluer, ce qui signifie une apparence plus adulte (récompense visuelle très gratifiante) et un boost important de toutes les statistiques, certains changeant même de gameplay, passant de glass cannon à sac de pv.


La série résout d'autres problèmes récurrents comme celui des auberges, les remplaçant par des centres gratuits et auxquels le joueur peut accéder facilement grâce à certaines capacités, mais en crée aussi d'autres (les Capsules Secrètes nécessitant un pokémon esclave dans l'équipe est très certainement le plus important). Elle met son gameplay service au service d'un récit formateur. Du moins à ses débuts, car son succès l'aura complètement dénaturé, et passant ainsi d'un conte pour enfants à une marchandise au succès planétaire, conduisant la série à s'essouffler et trahir petit à petit ses propres principes. Les jeux deviennent de moins en moins difficiles, les pokémons de plus en plus ridicules (ce qui est inévitable, il fallait bien qu'à partir de la neuvième génération les idées viennent à manquer), et son aspect purement commercial prenant le pas sur ses objectifs initiaux, tentant de garder son ancien public par la nostalgie, comme semble le montrer le film live annoncé pour début mai. Ce qui n'est pas si grave, car elle reste l'une des meilleures séries de J-RPG jamais créée.

Rn_Ganon
8
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le 26 avr. 2019

Critique lue 317 fois

Rèné_Ganon

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